Remise en ordre dans le nucléaire français pour éviter un nouveau fiasco à l’export

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à l’Elysée à Paris (Photo : Eric Feferberg)

[28/07/2010 16:02:28] PARIS (AFP) L’Elysée tente de tirer les leçons de l’échec retentissant d’Abou Dhabi pour la filière nucléaire française, qui avait raté en décembre un gigantesque appel d’offres pour quatre réacteurs, en la poussant à revoir ses pratiques à l’exportation pour éviter un nouveau fiasco.

“Les entreprises du secteur ont à faire de considérables efforts d’amélioration de leur offre face aux autres géants du secteur”: le constat dressé dans le rapport Roussely, qui a servi de base de travail à l’Elysée, est sans appel.

Sur un marché en plein développement -le rapport de l’ex-PDG d’EDF évalue à 250 les centrales qui devraient être mises en chantier d’ici 20 ans-, l’enjeu est de taille.

L’Elysée a donc repris plusieurs des propositions du rapport pour éviter que ne se reproduisent les couacs ayant émaillé la candidature française à Abou Dhabi.

Première conséquence: “S’agissant de l’exportation des centrales nucléaires, EDF et Areva mettront en place, chaque fois que les besoins des clients le nécessiteront, une organisation s’appuyant sur la compétence d’exploitant et d’architecte-ensemblier d’EDF”.

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Les logos des deux entreprises, Areva et EDF (Photo : Jean-Pierre Clatot)

En réaffirmant ainsi nettement le rôle de chef de file d’EDF à l’international, l’Elysée entend mettre fin à plusieurs mois de querelles entre EDF et Areva, et plus généralement, espère mettre en place une meilleure gouvernance de “l’équipe de France” du nucléaire.

Pour le gigantesque contrat de 20 milliards de dollars à Abou Dhabi, l’équipe tricolore était initialement composée de GDF Suez, Areva et Total. Mais face à la forte concurrence du coréen Kepco, qui a finalement emporté la mise, les groupes français avaient dû revoir leur copie et appeler EDF à la rescousse.

L’électricien, qui ne faisait pas d’Abou Dhabi un de ses pays cibles, avait finalement mené le projet avec GDF Suez, sur demande expresse de l’Elysée.

“On a vu des discordances dans les derniers mois entre les acteurs de la filière, ce qui risquait d’impacter notre image, alors que la France a une excellente image dans le nucléaire à l’international”, résume Colette Lewiner, directrice énergie chez Cap Gemini.

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ésident d’EDF Henri Proglio visite le réacteur EPR de Flamanville, le 26 novembre 2009. (Photo : Mychele Daniau)

Pour améliorer la coordination des acteurs de la filière, le rapport Roussely prône également la création d’une “structure industrielle destinée à l’exportation” qui puisse “au nom de tous, identifier et recenser les demandes”.

Si l’Elysée n’a pas retenu cette dernière piste, il a en revanche décidé de pousser à l’élargissement de la gamme de réacteurs proposés.

Mis en cause après l’échec d’Abou Dhabi, le réacteur EPR d’Areva “est parmi les meilleurs modèles de troisième génération”, estime le rapport Roussely, qui appelle toutefois à son “optimisation”.

Mais “comment soutenir une politique d’exportation avec un seul produit, a fortiori aussi typé?”, interroge-t-il.

“Il faut pouvoir offrir une réponse diversifiée aux clients potentiels”, acquiesce Ladislas Poniatowski, président UMP du groupe énergie au Sénat.

Plus puissant que ses concurrents, plus cher à cause notamment de critères de sûreté très élevés, l’EPR ne correspond pas nécessairement aux besoins de tous les pays. “Un réacteur de 1.600 MW, dans certains pays, c’est une contrainte sur le réseau électrique”, rappelle Mme Lewiner.

Rejetant l’idée de développer un réacteur “low cost” en sacrifiant les exigences de sûreté, François Roussely, comme l’Elysée, préfère mettre l’accent sur des réacteurs plus petits, notamment l’Atmea 1 développé par Areva et le japonais Mitsubishi Heavy Industries, mais aussi les nouveaux réacteurs de plus petite puissance développés par des groupes étrangers.