Tunisie – Tourisme : Hydrothérapie, l’aile d’avenir du tourisme de santé?

Hydrothérapie, l’aile d’avenir du tourisme de santé?

thalasso-djerba-yadis-1-2010.jpgLe
tourisme de santé s’impose de plus en plus comme une activité susceptible
d’intéresser une clientèle de luxe qui s’intéresse au bien-être. Outre nos
cliniques qui attirent de plus en plus de patients étrangers qui viennent se
soigner ou se faire plus beaux et belles, la Tunisie possède des richesses
thermales qui lui valent d’être une ‘’destination de luxe’’. Etant la deuxième
destination pour la thalassothérapie, elle est appelée à améliorer la qualité de
son offre pour maintenir ce positionnement, ou mieux le dépasser.

Durant les travaux du séminaire sur l’exportation des services des centres
d’hydrothérapie, organisé par l’Office du Thermalisme tunisien, du 25 au 28
février 2010, les intervenants ont insisté sur la nécessité d’adopter une
nouvelle stratégie de promotion du secteur, ciblant de nouveaux marchés et
proposant de nouvelles offres attractives. «Les atouts de la
thalasso en Tunisie
sont multiples. Le cahier des charges promulgué en 2006 fixe des normes
draconiennes d’hygiène. On dispose d’un littoral propre avec une eau non pollué
et biologiquement vivante. Notre personnel est qualifié. Le climat est très
agréable, procurant un dépaysement total avec l’Europe», a indiqué M. Béhi
Bouekkaz, directeur d’un centre de thalasso.

Diversification du produit touristique…

Il faut avouer que les cures et les soins proposés dans ces centres sont
inspirés de notre tradition. Le hammam comme espace de convivialité et de
bien-être a été transposé pour présenter les vertus de notre patrimoine
culturel, subsistant jusqu’aujourd’hui. Ces cures, même si elles sont dites de
bien-être, ont des vertus médicales qui ont été testées par les spécialistes du
domaine. Un atout de plus qui vient conforter la réputation de ces centres.
«Nous voulons faire sortir le citoyen de sa passivité. D’habitude, on ne recourt
au médecin qu’en cas où on est malade, alors qu’il est plus sage de pense à
préserver sa santé. Ces centres d’hydrothérapie et de thalassothérapie
permettent au citoyen d’avoir un rôle actif, celui de préserver sa santé et de
se prémunir contre la maladie», a affirmé M. Umberto Solimane, directeur de la
Fédération mondiale du Thermalisme et du Climatisme (FEMTEC).

Cependant, ces atouts cachent certaines faiblesses qui peuvent entraver cette
marche en avant du secteur. La qualité de services n’est pas encore à la hauteur
dans certains centres. La formation du personnel pose également problème. M.
Jallel Bouricha, hôtelier et représentant de la Fédération Tunisienne
d’Hôtellerie au Sud, en témoigne, tout en nuançant. «Il faut préciser que la
thalassothérapie a été initiée par les hôteliers qui ont voulu apporter une
diversification du produit touristique. La qualité est sûrement un souci. Il y a
certains manquements. Mais je dois dire que nous avons des centres qui ont un
bon écho à l’étranger», a-t-il précisé.

Qualité de la formation…

Ce souci s’ajoute à la problématique de la formation, surtout au niveau de
l’agrément des écoles de formation et leur homologation en plus de la qualité de
la formation. «Les écoles sont tenues d’encadrer leurs stagiaires. Dans les
centres, nous n’avons pas besoin de formateurs mais d’encadreurs», a signalé M.
Mohamed Tellili, directeur d’un centre. A l’encontre des centres, il ajoute
qu’il faudrait profiter des encouragements de l’Etat et d’agir au profit de la
qualité. «C’est à nous de garantir la qualité». De son côté, Mme Chida,
responsable formation auprès du ministère de la Santé, a ajouté qu’il est
impératif que les établissements de formation soient habilités à l’encadrement.
«D’ailleurs, on est en train d’homologuer les centres de formation afin de leur
faire bénéficier des chèques formation, leur permettant d’avoir une prise en
charge de 65% de la formation», a-t-elle expliqué.

Au niveau des universités, des diplômes de technicien supérieur ont été lancés
et des mastères professionnels thalassothérapie et thermalisme sont en vogue à
l’heure actuelle, et qui s’adressent essentiellement aux médecins. Mme Chida a
affirmé qu’une vingtaine d’étudiants poursuivent leurs études de mastères à la
faculté de Médecine de Sousse alors qu’une autre trentaine poursuit des études
de techniciens supérieurs à l’Ecole des sciences et techniques de la santé de
Sousse.

Par ailleurs, il n’est pas inutile de rappeler que la recherche scientifique
reste encore le maillon faible de la chaîne dans le secteur de l’hydrothérapie.
«Même si des recherches existent, elles sont insuffisantes ou parfois elles
manquent de pertinence», a indiqué M. Solimane. De son côté, M. Michel
Boulanger, professeur à l’Université de Nancy, a ajouté que l’industrie
pharmaceutique est très puissante dans ce domaine parce qu’elle ne publie jamais
des rapports non convaincants. Il affirme que les contraintes budgétaires
peuvent parfois entraver la recherche scientifique dans certains pays.

Les centres thermaux, mal exploités…

Au côté de la thalassothérapie, le thermalisme est un domaine qui attire de plus
en plus de touristes étrangers mais aussi de Tunisiens. Les centres thermaux ne
sont pas nombreux en Tunisie, quatre seulement:
Hammam Bourguiba, Djerba, Djebel
Ouest et Korbous. En comparaison avec les autres pays leaders dans ce domaine,
il faut savoir qu’il en existe 105 en France qui attirent 2 millions de curistes
; en Allemagne, ils attirent plus de 4 millions, en l’Italie environ 1,3
million.

Selon le rapport le plan de mise à niveau des unités relevant du secteur thermo
minéral en Tunisie, il y a une absence de standards. Les normes d’hygiène ne
sont pas respectées, tels que la qualité de l’eau de baignade, l’évacuation des
eaux usées, l’aménagement des locaux, etc.

Au niveau de la gestion, le management, public ou privé, a rarement une vision
entrepreunariale, avec un personnel rarement formé. On évoque alors une
sous-utilisation de la capacité installée, soit un taux de fréquentation de 39%
en 2009. L’offre ne suit pas, dit-on, dans le domaine où la demande est en
pleine croissance.

M. Jallel Dahas a affirmé que l’avenir du thermalisme repose sur la
diversification médicale. «Les séjours santé d’une durée de six, neuf ou douze
jours de soins thermaux permettent de prendre en charge des affections telles
que la fibromyalgie, la surcharge pondérale, états psychosomatiques, etc.»,
a-t-il précisé. On s’oriente désormais vers la prévention et vers la mise en
place de programme d’éducation thérapeutique lié par exemple à l’hygiène de vie,
la gestion du stress, le mal de dos, l’accompagnement du vieillissement. Il
serait judicieux, selon M. Dahas, de constituer un pôle médical dans chaque
station accompagné d’une diversification des compétences médicales présentes
dans les stations (nutritionnistes, sophrologues, ostéopathes,
physiothérapeutes, médecins esthétiques…), une diversification de la clientèle
(jeunes, familles, amicales d’entreprise…) et une diversification des activités
(médicales, touristiques, sportives, loisir, etc.).

Remboursement des caisses sociales…

Autre faiblesse concernant les services d’hydrothérapie, c’est le remboursement
par les caisses sociales. Les cures ne sont pas fréquemment prises en charge par
les caisses sociales, surtout pour la thalassothérapie, même si ça commence à se
développer dans certains pays européens, tel qu’en Allemagne. En Tunisie, les
cures thermales sont pour la plupart des cas prises en charge mais avec des
plafonnements inadéquats. Pour la thalassothérapie, on n’en parle pas encore
parce qu’elle n’est encore considérée que par la seule médecine dite «sérieuse»
qui est concernée par le remboursement et non le bien-être même pour des fins
médicales.

N’empêche, des projets sont en cours. Ainsi, on annonce l’ouverture de deux
centres de thalassothérapie au cours de cette année, à Hammamet et à Sousse. Le
ministre de la Santé, M. Mondher Zenaïdi, a souligné, lors de la clôture du
séminaire, que la thalassothérapie se trouve à la croisée de deux axes qui sont
la diversification de l’offre et l’amélioration de la qualité des soins. Il a,
ainsi, déclaré que six projets de hammams sont programmés, à savoir hammam Bent Jedidi au Cap Bon, hammam Mellag, hammam Beni M’tir, hammam Sidi Abdelhamid à
Sousse, hammam Sidi Boulâaba à Kasserine et hammam Sidi H’med Zarrouk à Gafsa.
Un grand projet de complexe sanitaire est aussi programmé à Gabès (Hamma). Le
ministre a indiqué qu’un cahier des charges a été élaboré ainsi qu’un plan
architectural pour la mise à niveau.

Recommandations…

Les services d’hydrothérapie sont l’aile d’avenir pour le tourisme de santé en
Tunisie. Les recommandations du séminaire de l’OT ont attiré l’attention sur la
prestation de services du secteur. On a appelé au développement de la
coopération internationale en matière de prise en charge des cures de
thalassothérapie et de thermalisme par les caisses sociales, le renforcement de
l’Etat dans le financement et l’encadrement de la recherche scientifique.

Concernant les normes de qualité, il est recommandé de mettre en place un
système de certification adopté à l’échelle nationale, l’adhésion des centres
d’hydrothérapie au système d’assurance qualité pour mieux se positionner sur le
marché international.

On appelle à la constitution d’une commission technique chargée de fixer les
critères d’homologation des produits locaux utilisés dans les centres
d’hydrothérapie, la création d’un label qualité pour les
hammams thermaux et
l’homologation des établissements de formation professionnelle et les programmes
de formation au BTP. Les participants au séminaire ont, d’ailleurs, recommandé
de développer une stratégie de communication du produit d’hydrothérapie basée
sur les nouvelles technologies, la communication personnalisée et la crédibilité
des produits proposés en ciblant de nouveaux marchés tels que les pays
scandinaves, les pays de l’Europe Centrale et les pays maghrébins.

Last but not least, on a proposé aux professionnels du secteur de la
thalassothérapie de se regrouper en consortiums en vue de les représenter à
l’étranger mais aussi de drainer une clientèle locale à travers des tarifs
préférentiels compatibles avec le revenu du citoyen moyen tunisien.