L’économie tunisienne et l’emploi

Un des principaux objectifs d’une politique économique est d’éliminer les
distorsions qui peuvent exister dans le marché du travail en vue de
promouvoir la création d’emplois et les exportations.

La Tunisie souffre d’un taux de chômage qui se situe autour de 14% de la
force de travail. Le chômage est un déséquilibre économique sérieux. Il
implique une importante perte en termes de croissance et de création de
richesses.

La nature du chômage a fait l’objet de plusieurs études réalisées par le
BIT (Bureau International du Travail) concernant plusieurs pays. Le chômage
peut être le résultat d’une accumulation insuffisante de capital due à une
épargne faible, à l’exode de zones rurales vers les zones urbaines, à un
décalage entre l’éducation et la formation requise par l’économie, ou à des
distorsions dans les préférences des consommateurs privilégiant les produits
importés aux produits locaux.

Dans certains pays, les contrôles excessifs de l’administration sur
l’investissement, le marketing et les prix gênent le développement du
secteur privé et accentuent le problème du chômage.

Peu de pays en développement ont réussi une croissance qui s’appuie
pleinement sur leurs ressources en main-d’oeuvre et qui absorbe de manière
continue les excédents de main-d’oeuvre. Les pays qui ont réussi ont en
général choisi une économie de marché avec une croissance tirée par les
exportations, des technologies créatrices d’emplois et ont pu éliminer les
distorsions majeures de leur économie.

Les distorsions pourraient constituer un handicap majeur pour la création
d’emplois et l’absorption de la main-d’oeuvre. Celles-ci peuvent avoir
plusieurs origines liées aux marchés des facteurs et des produits et à
l’environnement réglementaire et institutionnel. Les contrôles des prix, les
barrières douanières, les taux de change surévalués, les taux d’intérêt
artificiellement bas, les subventions et les taux d’imposition excessifs
peuvent causer des distorsions dans l’économie. Les obstacles à la
concurrence et à l’accès au marché peuvent aussi créer des distorsions et
encourager une concurrence monopolistique.

Alors que les grandes réformes visant à libéraliser l’économie et à
promouvoir le développement du secteur privé sont essentielles pour une
stratégie d’emploi, les distorsions liées au marché de l’emploi doivent être
éliminées. Un marché du travail concurrentiel, libre de toutes les
distorsions est une condition nécessaire à la création d’emplois.

Plusieurs pays en développement ont hérité un droit du travail venant de
pays industrialisés, ce qui a sérieusement diminué leur capacité à créer des
emplois. Ces lois imposent un salaire minimum qui dépasse souvent la
productivité marginale, interdit le licenciement, limite le nombre d’heures
de travail et impose à l’employeur un coût excessif de sécurité sociale. Au
vu du coût élevé de la main d’oeuvre, des contraintes législatives, et d’une
main-d’oeuvre peu qualifiée et peu disciplinée, les entreprises dans
plusieurs pays en développement ont opté pour l’usage massif des machines
dans les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et de la construction aux
dépens de la création d’emplois.

Dans plusieurs pays, les salaires sont prédéterminés, aussi bien dans le
secteur public que dans le secteur privé et ils sont considérés comme des
coûts fixes. Cependant les ventes ainsi que les prix de vente peuvent
baisser et les entreprises peuvent subir des pertes d’exploitation. Les
entreprises doivent absorber toutes les pertes et ne peuvent en transférer
une partie à leurs employés à travers un ajustement à la baisse des
salaires. De manière similaire, l’Etat peut subir une importante chute des
impôts et taxes, mais les salaires des fonctionnaires sont prédéterminés. L’Etat
ne peut pas ajuster les salaires en fonction de ses pertes de revenus et
doit par conséquent gérer un déficit budgétaire. La rigidité des salaires a
souvent été à l’origine d’une perte d’emplois, et de tensions
inflationnistes.

La dominance du chômage structurel en Tunisie ou dans tout autre pays en
développement fournit la preuve d’une certaine redondance du travail et
d’une faible productivité marginale du travail. Lorsque l’on compare la
valeur de la productivité marginale du travail dans l’agriculture,
l’industrie et la construction, au salaire moyen effectif dans ces secteurs,
une distorsion majeure apparaît. Une telle distorsion empêche le plein
emploi de la main-d’œuvre à court terme.