Tourisme médical : le plan d’attaque de la Tunisie

L’objectif de la Tunisie est de s’imposer comme destination
régionale incontournable et d’avenir à travers l’exportation des services de
santé. Pionnière sur se secteur, elle élabore un plan d’action ambitieux, pour
devenir un pôle d’exportations et de services de santé d’ici à 2016.

Chirurgie-esthetique1.jpgLe
tourisme médical n’est d’ailleurs, pas si nouveau pour la Tunisie. Elle y
opère au niveau essentiellement maghrébin, depuis plus de deux décennies.
Chaque année, près de 40 000 patients des pays riverains viennent s’y faire
soigner (Libye et l’Algérie notamment). Le secteur s’est développé, entre
autres, grâce à cette forte demande régionale. Il faut dire que le pays a
placé la santé au cœur de ses priorités. Les dépenses dans ce domaine ont
atteint 7,5% du budget de l’Etat. Cela représente actuellement près de 6% du
PIB.

En 2007, environ 102 000 Européens sont venus se faire soigner en
Tunisie. Lors d’un déjeuner-débat organisé récemment par la chambre
tuniso-américaine de commerce (TACC), Mondher Zenaidi, Ministre de la santé,
a précisé que la Tunisie clôturera l’année avec une moyenne de 150 000
Européens venus effectuer des soins en Tunisie. A titre comparatif, le
nombre des patients étrangers se faisant soigner en Tunisie en 2003 n’était
que de 43 000 patients. La chirurgie esthétique reste la spécialité la plus
demandée. L’orthopédie, l’ophtalmologie, la chirurgie cardiovasculaire et la
médecine dentaire enregistrent toutefois, une hausse au niveau de la
demande.

La proximité géographique de l’Europe, un groupement des principaux pays
émetteurs de touristes médicaux, est un atout de taille. « Le Tourisme
médical est encore une jeune industrie, mais c’est une industrie à forte
croissance et d’avenir grâce au vieillissement des populations occidentales,
principale cause des importants déficits de leurs systèmes d’assurance
maladie »
affirme Amor Dehissy, directeur général d’Esthtika Tours, tour
opérateur pionnier du tourisme médical dans le pays et leader sur le marché
français.

Une partie du parc hôtelier tunisien, 200 000 mille lits pour quelques
600 hôtels, peut être considéré comme un écrin de qualité pour le
développement du secteur de la convalescence pour de longues durées, ou
encore adaptable pour le séjour des personnes âgées dans des structures
hôtelières équipées à cet effet.

55 millions de dinars de recettes

Ce créneau est une réelle opportunité pour la Tunisie. Par son biais,
c’est aussi un juste retour des choses. Démuni de ressources et de richesses
naturelles, le pays a toujours parié sur les ressources humaines et
capitalisé sur la matière grise de ses citoyens, du lendemain de
l’indépendance à ce jour. Ces atouts considérables humains, sont
aujourd’hui, à même de supporter et assumer une politique qui valorise ce
choix. Celui de la santé en est un exemple concret. Il s’y adosse largement.
Ce secteur, contribuera à résorber le chômage, surtout parmi les jeunes
diplômés. Ce défi est l’un des majeurs qu’affronte le pays. D’autre part,
cette politique, participera à « sauver » un secteur en souffrance. Le
tourisme tunisien endure, entre autres, d’une assez forte saisonnalité et
réalise des performances assez médiocres en termes de revenue à la nuitée.

En 2006, les recettes des soins médicaux dispensés aux étrangers ont
atteint 55 millions de dinars Ce taux a enregistré une hausse de 22,2% par
rapport à 2005, selon le dernier rapport de la Banque Centrale de Tunisie (BCT).
Il est aussi à retenir, que la moyenne des dépenses d’un patient est de 3
000 euros par patient. Un touriste dépense, en moyenne entre 300 et 400
euros.

Du côté du Ministère de la santé, la mise à niveau de la formation va bon
train. La formation de nouvelles spécialités telles que la gériatrie, par
exemple s’accélère. (60 nouveaux médecins dans cette spécialité sont formés
chaque année). Il est à retenir qu’en Tunisie, chaque année quelques 15 00
étudiants s’orientent vers la médecine. 25% d’entre eux, se destinent à
devenir spécialistes.

La langue française largement pratiquée par toutes les équipes médicales,
para médicales et les structures d’accueil sont aussi un atout considérable
»Parler au médecin et communiquer lui a été l’élément décisif dans ma prise
de décision finale du choix de la destination ». A compétences, garanties et
tarifs égaux, « je préfère passer moins de temps pour le transport aérien et
parler en français »
résume Marie, largement satisfaite d’une implantation
mammaire qu’elle vient de subir.

La Tunisie met en avant et à niveau la modernité de son infrastructure et
les compétences humaines nécessaire pour profiter de la mondialisation de la
santé. Dans le pays, on enregistre 100 cliniques privées à vocation mono et
multidisciplinaires avec près de 2 600 lits représentant 15% du nombre total
de lits disponible dans le pays. 1393 cabinets dentaires, 99 centres de
dialyses, 3371 cabinets médicaux dont 50,9% sont des spécialistes.

Autant d’atouts appréciés comme « très satisfaisant », mais qui peut
tendre « à plus de qualité » selon un rapport de la Banque Mondiale publié
en 2006.Tous les efforts sont tournées vers cet objectif.

L’industrie pharmaceutique et parapharmaceutique est aussi en forte
croissance, puisque la production locale correspond désormais à 47% du
marché.

Création d’une cité médicale et de cités sanitaires destinées à l’exportation

Quand elle met un plan d’action, récemment décidé par le Président de la
République Mr Zine Abeddine Ben Ali au cours d’un CMR, la Tunisie se donne
les moyens de ses ambitions.

« Cette vision est en fait, un bond qualitatif. Je mentionne
l’encouragement tous azimuts, en matière d’investissements tunisiens et
étrangers. La création d’une cité médicale et de cités sanitaires destinées
à l’exportation. La création d’un organisme publique autonome et indépendant
qui a pour tâche l’évaluation et l’octroi des attestations d’accréditations.
La certification répond à un cahier de charge encore plus pointu. Cette
démarche sera accompagnée d’une réglementation souple et adapté. Nous
envisageons aussi, la révision de la TVA pour l’importation de certains
équipements pour faciliter le travail des promoteurs. L’urgence et de
répondre aux besoins des prestataires et veiller à ce que cela soit plus
facile et efficace dans la rigueur et la sécurité totale pour nos patients
et les patients étrangers. »
résume le directeur général de la santé
publique

Les projets vont d’ailleurs bon train. La Tunisie a entamé un ambitieux
programme pour conforter sa position de centre international d’expertise.

A titre d’exemple, Bled el Ward (la cité des roses, ancienne dénomination
de l’Ariana) est un projet qui s’inscrit parfaitement dans cette stratégie.
Al Maabar Company, consortium constitué des cinq plus grandes sociétés
immobilières d’Abu Dhabi, finance un projet colossal, à hauteur de plus de
10 milliards de dollars sur 20 ans et qui est axé, entre autres, sur
l’édification d’une cité de santé de premier ordre et d’envergure
internationale : centre de recherches médicales équipé de matériel
ultramoderne, structures spécialisées, facultés de médecine, cliniques off
shore, … .

Le Ministre de la Santé a confirmé, que les négociations vont bon train
concernant le projet de coopération mixte tuniso-japonaise pour la création
du premier hôpital privé en Tunisie. Le groupe hospitalier Tokushukai
Medical envisage, de mettre en place le premier hôpital pluridisciplinaire
du genre en Afrique et dans le monde arabe. Son cout est estimé à 65
millions de dinars (37 millions d’euros). Il vise à employer 750 personnes,
dont 80 médecins et 500 cadres paramédicaux. Cet hôpital aura une capacité
initiale de 400 lits. Le groupe hospitalier nippon est le premier groupe,
sur le plan quantitatif au niveau des institutions médicales privées au
japon. Il est le troisième groupe hospitalier dans le monde.

D’autre part, cette politique s’adosse surtout, à de solides acquis. La
Tunisie a élaboré une politique sanitaire efficace au lendemain de son
indépendance. Elle affiche aujourd’hui des indicateurs de santé très
performants.

L’espérance de vie y atteint 74 ans en 2007, alors qu’elle n’était que de
51 ans en 1966. Le taux de la mortalité infantile est passé en dessous de la
barre des 18,8% pour 1000 accouchements. Le taux de vaccination a atteint
97% et l’on décompte un médecin pour 900 habitants. En 2005, l’OMS a classé
la Tunisie 52eme mondial (sur 190 pays) en termes de performances globales
de systèmes de santé nationales.

La politique de santé en Tunisie a surtout contribué à la création d’un
plateau technique et de savoir faire incontestable. Les compétences
tunisiennes sont à ce titre, recherchées dans les pays du Moyen orient, en
Afrique du sud et même en Europe, où souvent, les médecins sont retenus par
des offres alléchantes. Il est à noter, qu’en termes de formation, le pays
est quasiment autosuffisant.

La fuite des compétences est un épineux problème, mais les médecins à
l’étranger diffusent l’image de marque de la Tunisie. Ils reflètent aussi de
la qualité des études médicales et paramédicales qui y sont assurés.

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