Crise : l’UE met la pression sur les Etats-Unis avant le sommet de Washington

[08/11/2008 16:35:32] BRUXELLES (AFP)

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ésident français Nicolas Sarkozy (d) et le président de la commission européenne José Manuel Barroso, le 7 novembre 2008 à Bruxelles (Photo : Gérard Cerles)

Les Européens sont convenus vendredi de coordonner leurs politiques face à la récession annoncée et ont mis la pression sur les Etats-Unis avant les préparatifs du sommet de Washington du 15 novembre sur la réforme du système financier mondial.

Les dirigeants européens sont “tous d’accord sur la nécessité absolue d’une coordination des politiques économiques” pour faire face à la crise, a déclaré le président français Nicolas Sarkozy, dont le pays préside actuellement l’Union européenne, à l’issue d’un sommet extraordinaire des 27 à Bruxelles.

M. Sarkozy a annoncé que l’Europe avait “une position commune assez détaillée”. Elle ira donc à Washington “avec la volonté de défendre une ligne, celle de la transparence et de la refondation”.

La présidence de l’UE a confirmé vendredi que l’Espagne pourrait participer au sommet du G20.

Signe de leur détermination, les dirigeants européens ont proposé la tenue d’un nouveau sommet mondial “100 jours” après celui de Washington, soit une fois le président américain élu Barack Obama entré en fonction. Selon la Maison Blanche, M. Obama ne devrait pas participer aux discussions du 15 novembre.

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ère allemande Angela Merkel, le 7 novembre 2008 à Bruxelles (Photo : John Thys)

Ce nouveau sommet aurait à l’ordre du jour un rapport sur la mise en oeuvre des premières mesures arrêtées le 15 novembre.

Le Premier ministre tchèque Mirek Topolanek a toutefois relativisé l’unité de l’UE, assurant que Nicolas Sarkozy se rendrait au G20 avec un “mandat vague” en raison des divergences des 27.

“Le mandat donné à M. Sarkozy est très large, après que nous avons réalisé qu’il y avait des opinions diverses sur la façon dont ces choses devaient être réglées”, a-t-il déclaré.

Un nouvel accrochage a par ailleurs opposé M. Sarkozy au ministre allemand des Finances Peter Steinbrück, qualifié par le président français de “moins aimable” que la chancelière Angela Merkel, sur fond de frictions entre la France et l’Allemagne au sujet du degré de coordination des politiques économiques européennes.

M. Sarkozy s’est cependant efforcé de minimiser cet incident, soulignant que “sur le fond, il n’y a pas de désaccord”.La préparation du sommet du G20 se poursuit ce week-end à Sao Paulo, au Brésil, avec une réunion des grands argentiers des puissances industrielles et des économies émergentes.

Les principaux pays émergents -Brésil, Chine, Inde et Russie- ont déclaré vouloir “une réorganisation du système financier mondial”, estimant que le G7 (économies les plus avancées), ne pouvait plus faire face seul à une crise globale comme celle qui balaie aujourd’hui toutes les économies, a dit le ministre brésilien de l’Economie Guido Mantega.

Au cours de sa première conférence de presse à Chicago, le président élu des Etats-Unis, le démocrate Barack Obama, a annoncé que “la première mesure” qu’il prendrait en tant que président serait de mettre en place un nouveau plan de relance.

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ésident élu des Etats-Unis, Barack Obama, le 7 novembre 2008 à Chicago (Photo : Stan Honda)

“Nous avons besoin d’un plan de sauvetage pour la classe moyenne”, a dit M. Obama, entouré de grands noms de l’économie, comme Paul Volcker, Robert Rubin et Larry Summers, tous pressentis pour prendre le poste de secrétaire au Trésor.

La gravité de la crise a sans doute été un aiguillon pour les Européens.

Après les prévisions catastrophiques du Fonds monétaire international (FMI) pour la croissance mondiale, les chiffres officiels de l’emploi aux Etats-Unis ont encore alourdi le climat vendredi: le chômage y a bondi en octobre à 6,5%, son plus haut niveau depuis plus de 14 ans, l’économie américaine ayant encore supprimé 240.000 emplois pour son dixième mois successif de licenciements nets.

Ces chiffres dépassent les craintes des analystes. Ceux-ci tablaient sur 200.000 suppressions d’emplois et un chômage à 6,3%, après 6,1% en septembre, le plus haut taux depuis cinq ans.

Le constructeur automobile General Motors a annoncé une perte de 2,5 milliards de dollars au troisième trimestre, deux fois plus que prévu par les analystes. Il a précisé qu’il risquait de se retrouver début 2009 avec un niveau de liquidités ne lui permettant plus de poursuivre ses opérations. Son action a été suspendue à Wall Street.

M. Obama a promis des aides d’Etat à ce secteur automobile.La Bourse de New York a rebondi après deux séances de chute, malgré l’importante dégradation du marché de l’emploi américain et des pertes abyssales de General Motors, au bord du dépôt de bilan: le Dow Jones a gagné 2,85% et le Nasdaq 2,41%.

Les places européennes, qui avaient subi de lourdes pertes jeudi, se sont également redressées: Paris a terminé à +2,42%, Londres à +2,17 (bilan révisé) et Francfort à +2,59%.

Auparavant, la tendance avait été mitigée en Asie, Tokyo perdant 3,55%, alors que Hong Kong et Shanghai avaient terminé en hausse, respectivement de 3,3% et 1,75%.

Jeudi, le FMI avait prédit pour 2009 une décroissance de 0,3% dans les pays développés — du jamais vu depuis la Seconde guerre mondiale.

Selon ses prévisions, tous les grands pays seront touchés par la récession: Etats-Unis (-0,7%), Japon (-0,2%) ou zone euro (-0,5%). Seule exception, le Canada devrait voir son PIB progresser de 0,3%.

Le président de la Banque de réserve fédérale d’Atlanta, Dennis Lockhart, a affirmé vendredi que les Etats-Unis étaient d’ores et déjà entrés en récession. Premier membre de la Fed à reconnaître ouvertement la réalité d’une récession, il a déclaré que les chiffres d’octobre indiquaient que le recul du PIB, déjà de 0,3% au 3e trimestre, serait probablement encore plus important au quatrième.

La zone euro sera “très probablement en récession en 2009”, a confirmé vendredi le président de l’Eurogroupe, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, alors que la Commission européenne prévoyait encore une très légère croissance (0,1%).