Régions – emploi : la nécessaire réconciliation


Par Maha Ouelhezi

La place qu’occupe la
région dans le schéma de développement économique de tout pays est
incontestée. La richesse de ses ressources naturelles et surtout humaines
fait qu’elle a un rôle primordial dans l’impulsion de la croissance
économique. Reste que cette place tarde encore à se concrétiser, faute de
souffle susceptible de booster le développement économique dans les zones
intérieures.

C’est autour de cette problématique que le Comité de consultation nationale
de l’emploi a organisé une réunion pour débattre de «l’emploi et la
croissance». Selon une enquête réalisée par le Comité dans le cadre de
ladite consultation, quatorze gouvernorats connaissent un taux de chômage en
hausse de plus de 20% (Jendouba, Gafsa et Siliana), et ce malgré une baisse
de deux points au niveau national.

A un autre niveau, des gouvernorats qui sont traditionnellement connus par
leur capacité à gérer la question du chômage enregistrent des taux assez
élevés : 15% à Ben Arous, 9,5% à Nabeul et 10% à Bizerte.
Selon M. Mongi Bédoui, responsable de l’enquête, cette situation est due à
des infrastructures régionales encore gérées par l’investissement public,
des stratégies non claires du marché, une rentabilité incertaine du secteur
agricole et une industrie agroalimentaire qui manque encore de capacité en
raison du manque de programmes pour développer les zones industrielles
classiques. Les structures (pôles, pépinières, etc.) mises en place pour
impulser la création des projets ne sont pas bien exploitées. Les zones
industrielles présentes ne répondent pas aux critères requis d’un
développement efficace.

Pour ce qui est des services, une absence du marché régional des services
est constatée avec la présence de structures financées essentiellement par
l’investissement public.

La formation professionnelle connaît aussi des difficultés liées au manque
d’alternance et la présence d’un nombre limité d’entreprises. Au niveau des
conseils municipaux et régionaux, M. Bédoui a remarqué qu’ils ont besoin de
se développer davantage tout en repositionnant la problématique de l’emploi
et de l’investissement. Notons qu’à ce niveau, l’UGTT n’a pas de
représentant dans les conseils régionaux, ce qui peut constituer un handicap
à l’impulsion de l’emploi dans les régions.

Ceci dit, il a été relevé que le monopole de l’Etat dans la création des
projets entrave leur développement qualitatif puisqu’il y a un manque de
concurrence sur le marché. Même les associations de développement ne sont
pas en mesure d’accomplir leur mission à cause d’absence d’outils de
financement. Ajoutons à cela une absence de plan de formation et la
diminution de la main-d’œuvre dans les secteurs agricole, du bâtiment et du
tourisme.

D’un autre côté, il a été constaté l’absence de planification régionale à
moyen et long terme et un manque d’échange avec le marché extérieur.

Comme propositions, M. Bédoui a affirmé qu’il est primordial de
congestionner la question de l’emploi avec l’économie. «Il n’est plus
adéquat d’associer l’emploi avec les affaires sociales alors qu’il concourt
d’une façon fondamentale au développement économique», a-t-il expliqué. Il a
ainsi appelé à l’élaboration d’un rapport régional pour le développement
humain ainsi qu’au redressement d’une typologie précise de la structure du
chômage qui prendra en compte le vécu des régions.

M. Bédoui souhaite le développement d’un marché régional des services,
parallèlement avec les bureaux d’études, la création d’un fonds d’insertion
et d’adaptation régionale ainsi que le développement d’un programme
sectoriel de l’emploi dans les régions.

Au niveau de l’industrie, il est impératif de combiner entre
l’investissement privé et public dans les terrains d’Etat, d’impulser la
coopération étrangère et de développer des sociétés d’entreprises agricoles.
L’élaboration d’un plan de reconversion aura l’avantage de développer une
base de produits diversifiés.

In fine, le nouveau souffle dont aura besoin la région pour se développer et
résoudre la problématique de l’emploi ne pourrait se concrétiser sans la
prise en compte de son vécu et de toutes les problématiques qui lui sont
liés ainsi que le repositionnement de l’emploi comme priorité au
développement économique.