Le Tourisme en 2030 : Cataclysme défis et perspectives


Par Amel Djait Belkaid

cataclysme1.jpgLes prévisions pour 2010, 2015 nous semblaient lointaines. Pourtant, c’est
déjà demain.
Les rapports confidentiels, les scénarii catastrophes, les projections
optimistes, les prévissions alarmistes s’évertuent à imaginer de quoi seront
faites les prochaines décennies. Experts, stratèges, analystes, concepteurs,
consommateurs et observateurs sont pris de court. Le monde bouge et change.
Il change vite, extrêmement vite et avec le net, il est de plus en plus
hyper interactif.

De quoi seront faites les tendances touristiques de demain ? Quels défis
s’érigent face à un secteur qui restera l’activité la plus dynamique au
monde ? Les stations de ski survivront-elles avec la fonte des neiges ? Le
Sahara tunisien résistera-t-il à l’érosion ? Vivrons-nous jusqu’à 110 ans?
Restera-t-il du pétrole pour faire voler les avions? Combien de touristes
ferons-nous ? Quel impact auront les mégaprojets actuels sur notre activité
touristique ?

Faute de trouver des réponses sur la Tunisie des années 2030, je me suis
tournée vers ce que deviendra l’industrie du tourisme en 2030. Au lieu de
trouver des réponses, je croule sous les questions. Plein de questions,
beaucoup trop de questions me donnent le tournis. Les questions se
multiplient et les hypothétiques réponses sur de quoi seront faites les
prochaines décennies demeurent.

La population mondiale compte près de 7 milliards de personnes en 2008 et
atteindra plus de 8 milliards en 2030. Cette croissance démographique
proviendra majoritairement d’Asie et de l’Afrique. La Chine devrait être
dépassée par l’Inde en 2030.Selon un rapport de l’Organisation des Nations
unies (ONU), l’Inde sera le pays le plus peuplé du monde en 2030, soit cinq
ans plus tôt que prévu lors des précédentes estimations.

La population croît c’est sûr, mais elle change aussi de profil

En 2006, environ une personne sur 13 avait plus de 65 ans. Cette proportion
pourrait passer à une personne sur 8, soit 1 milliard de personnes en 2030.
Face à cette population vieillissante, l’on est en droit de se demander, qui
se prépare à recevoir une clientèle touristique du 3e et même du 4e âge?

Les pays développés vieillissent et une forte immigration des pays moins
développés vers les plus riches pointe à l’horizon, alors que nous sommes
aujourd’hui plus que jamais dans la lutte contre toutes formes
d’immigrations.

Le tourisme de bien-être s’est affirmé durant cette dernière décennie. Il
s’affirme d’autant plus qu’il se tourne davantage vers le tourisme de santé
qui s’érige en véritable tendance. Le tourisme médical concerne des
personnes originaires de pays occidentaux qui se déplacent à l’étranger dans
le but de recevoir des soins médicaux, dentaires ou chirurgicaux tout en
séjournant dans des lieux de villégiature ou en visitant la région dans des
conditions qui ressemblent à des vacances traditionnelles.

Ces dernières décennies, la famille s’est aussi complètement métamorphosée.
Les différents modes de cohabitation, le nombre élevé de divorces, de
naissances hors mariage, de parents célibataires et de familles recomposées
s’accentueront davantage dans les prochaines années.
La densité des villes, les dettes des étudiantes et l’augmentation du coût
des propriétés pousseront les enfants à rester avec leurs parents plus
longtemps.

L’offre touristique devra donc être créative et flexible pour répondre aux
intérêts de toutes les familles et générations possibles: des familles où
les grands-parents vivront de plus en plus longtemps grâce aux progrès de la
médecine et de la qualité de la vie. Les parents qui auront des besoins de
détente liés aux stress et au rythme du travail. Des petits-enfants avec les
loisirs créatifs, sportifs et soif de découvertes.

L’heure sera à inventer des offres qui contenteront des intérêts
contradictoires, tout en les réunissant dans des méga centres touristiques
alliant l’hébergement à l’animation en passant par les spectacles, …La
société de demain comptera aussi encore plus de célibataires et de personnes
seules. Il faudra leur permettre de se joindre à des groupes qui ont les
mêmes centres d’intérêt qu’eux et répondre à leur besoin de nouer des
contacts humains et dont le tourisme pourrait bien être l’outil.

Le rapport Horizon 2020 de l’OMT (Organisation mondiale du tourisme) prévoit
1,6 milliard de touristes en 2020 avec des recettes annuelles qui
atteindront 2.000 milliards de dollars. Les échanges se feront
principalement par l’intermédiaire des nouvelles technologies qui
remplaceront les contacts humains. Le citoyen de 2020 de plus en plus
urbanisé voudra voyager pour aller à la rencontre de l’autre.

Chaud,… l’avenir sera chaud !

Selon un rapport récent intitulé Holiday 2030, la température globale va
augmenter de un à deux degré d’ici 2030. Ce changement pourrait avoir des
répercussions notables sur bon nombre de destinations touristiques.
Certaines destinations «SOLEIL» souffriront d’une chaleur trop forte qui
aura des répercussions notables sur leur saisonnalité. La hausse du niveau
de l’eau contribuera à l’érosion des côtes et les risques d’ouragan, la
dégradation des récifs coralliens est aussi des conséquences possibles.

Les destinations «NEIGE» seront également touchées. Le déclin des sports
d’hiver est déjà une réalité. Les perturbations climatiques obligent déjà
les stations de ski à repenser leurs concepts et à le faire évoluer vers le
tourisme de bien-être, le tourisme actif avec la randonnée et les sports
extrêmes…

Selon une étude prospective de l’Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE), le nombre de stations de ski européennes
devrait fondre. Au Québec, la saison de ski sera plus courte et reposera de
plus en plus sur l’enneigement artificiel. Mais, dans un contexte d’économie
des ressources, les canons à neige gourmands en eau et en énergie auront-ils
libre jeu? Et quel sera le prix d’un billet d’une remontée mécanique?

Les enjeux liés aux transports

On comptait 24 millions de passagers aériens en 1950 et 2,1 milliards en
2006. L’Association internationale du transport aérien (IATA) en prédit 2,75
milliards en 2011… Imaginez combien de passagers voyageront en 2030? Combien
d’aéroports devront être construits d’ici là ?

Le prix du pétrole aujourd’hui pose déjà problème. Les recherches actuelles
réfléchissent à des avions qui consommeraient moins et transporteraient
encore plus d’individus. Airbus s’est engagé à réduire de 50% les émissions
de dioxyde de carbone de ses avions d’ici à 2020. On parle aussi de machines
très plates et triangulaires qui accueilleraient des passagers dans leurs
ailes baptisées les «ailes volantes». On envisage de remettre les
dirigeables en service qui consommeraient quatre fois moins que les avions
et qui seront compétitifs dans le fret.

Afin de faire front aux prévisions du flux grandissant des voyageurs, il
faudrait aussi multiplier les aéroports dans le monde. Les projets sont
largement en cours, en Tunisie y compris.

La question d’avenir est de trouver le moyen de gérer et d’éviter
l’encombrement du ciel. La question du contrôle aérien demeure. Le système
actuel est «humain», donc limité par le nombre d’avions qu’un contrôleur
peut diriger à un moment donné. Le monde de l’aviation espère toujours créer
des avions totalement indépendants, qui auraient à leur bord les instruments
nécessaires pour leur permettre d’éviter les collisions sans aucune
intervention humaine.

L’avenir du tourisme de masse

Le simple forfait Avion-Plage ou Soleil/Mer sera encore moins au goût du
jour en 2020. Les individus préféreront les voyages excitants, ludiques,
riches en expériences et émotions et en découvertes culturelles. L’industrie
touristique devra relever le défi de conjuguer tourisme de masse et
authenticité.

Tous les rapports tiennent ce même discours, cependant le décalage entre les
attentes des voyageurs des pays émergents et celles des pays qui ont de
l’expérience en matière de voyage ne peuvent aller de pair. Les exigences
des Chinois et des Indiens, par exemple, sont celles d’un Européen des
années 1970 ou d’un Japonais des années 90.

Tout ceci n’est qu’un simple préambule!

La société comporte combien d’autres facettes qui seront différentes demain.
Pensons à la révolution médicale, qui prolonge notre espérance de vie et
offre des possibilités infinies de retouches esthétiques.

Le net en deux décennies a révolutionné les comportements et continue de
provoquer un véritable cataclysme dans le monde du travail, des loisirs de
la consommation et de la communication. Imaginez-vous, vivre et travailler
dans un monde où Internet sans fil est omniprésent permettant des formules
de travail ultra-flexibles, mais aussi une surveillance technologique et un
partage de l’information personnelle à grande échelle.

Réfléchissez à ce que sera votre voiture de demain, à la présence de robots
dans notre vie quotidienne… Spéculons sur l’avenir des grandes villes,
toujours plus audacieuses, plus peuplées, plus modernisées, etc.

Cette vision semble peut-être encore un peu futuriste, voire digne d’un
roman de science fiction, mais elle est déjà à nos portes.
 

Sources:
– Le Monde hors série, 2007.
– Vivre en 2020», Le Monde hors série, octobre 2006.
– Agence France-Presse. «Le tourisme a encore de beaux jours devant lui
jusqu’en 2030».
– Guardian Special. «The World in 2020»,
– Le Globe Veilleur. Maithé Levasseur