Le pétrole cher creuse la fracture entre pays riches et pauvres

 
 
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Une pompe à essence (Photo : Behrouz Mehri)

[03/08/2007 10:56:55] PARIS (AFP) La flambée des prix du pétrole, qui atteignent de nouveau des records, n’ébranle pas les économies des pays industrialisés et profite aux pays émergents producteurs d’or noir, mais aggrave la situation des pays en développement importateurs d’énergie.

Les cours du pétrole sont montés pour la première fois mercredi jusqu’à 78,77 dollars le baril. “On ne peut pas dire que ça ait le moindre impact sur l’économie mondiale”, juge Philippe Chalmin, professeur d’économie à Paris Dauphine et spécialiste des matières premières.

“Les pays riches ont su assez remarquablement s’adapter à des prix du pétrole très significativement plus élevés” depuis quatre ans, constate Francis Perrin, directeur de la revue Le pétrole et le gaz arabes.

Une situation qui paraît durable. La demande pétrolière a bondi ces dernières années à cause de la soif d’or noir des pays émergents, de la Chine en particulier, et d’une forte croissance mondiale.

Elle augmente aujourd’hui bien plus vite que les capacités de production, ce qui devrait garder les prix sous pression et les empêcher de retomber à leurs niveaux d’il y a cinq ans, quand le baril de brut ne valait que 25 dollars.

Mais malgré la récente flambée des cours, le Fonds monétaire international (FMI) vient de relever à 5,2% sa prévision de croissance mondiale pour 2007 et 2008, grâce aux meilleures performances des pays émergents et surtout de la Chine. S’il reconnaît que les prix du pétrole représentent un risque pour l’économie mondiale, il ne s’en alarme pas.

Les pays industrialisés sont aujourd’hui “moins dépendants du pétrole” qu’il y a 30 ans, constate Manouchehr Takin, expert du Centre for Global Energy Studies (CGES).

A la suite des chocs pétroliers des années 70 et 80, ils ont diversifié leurs sources énergétiques, en se tournant notamment vers le nucléaire, et ont amélioré leur efficacité énergétique.

M. Takin s’attend toutefois à ce que les prix, “qui ont triplé depuis quatre ans (…) freinent la croissance et accélèrent l’inflation”.

“Supposons qu’on dépasse 80 dollars le baril: il pourrait y avoir des effets de seuil psychologiques, qui pourraient peser sur le moral des ménages ou les perspectives d’investissement”, renchérit M. Perrin.

Certains pays du sud producteurs d’hydrocarbures ont largement bénéficié de l’envolée des pétroliers, à l’instar du Venezuela, de l’Algérie ou de la Libye.

Mais, insistent de nombreux commentateurs, la flambée du brut est une calamité pour les pays en développement importateurs d’énergie. Leur facture pétrolière s’est considérablement alourdie, aggravant leur déficit commercial et entravant la lutte contre la pauvreté.

Claude Mandil, directeur de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), qui défend les intérêts énergétiques des pays consommateurs, parlait récemment de “catastrophe épouvantable pour les pays les plus pauvres”, à tel point que “dans ces pays, le pétrole est subventionné par l’Etat”.

Selon lui, le coût de ces subventions pour le budget de ces pays pauvres est cinq fois plus élevé que les économies représentées par les annulations de dette par les pays du G8.

L’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), dont dépend l’AIE, indique dans son dernier rapport sur les perspectives économiques africaines que “l’inflation a franchi à nouveau la barre des 10% dans les pays” du continent “importateurs de pétrole, sous l’effet de la flambée des cours”.

En outre, le développement de la production de biocarburants, à partir d’oléagineux ou de céréales, accentue le retard de certains pays en provoquant une envolée du cours des denrées alimentaires.

 03/08/2007 10:56:55 – © 2007 AFP