Tourisme TunisieDepuis l’identification, dans les années 80, des limites du balnéaire, sur la base duquel a été promu le tourisme tunisien dans les années 60 et 70, et partant de l’impossibilité de continuer sur cette voie, de nombreux travaux de réflexion ont été entrepris pour remédier à la monotypie du secteur. Le résultat est, toutefois, décevant : rien n’a pratiquement changé.

Des études stratégiques multiples

Pourtant, l’ensemble des parties concernées par le développement du secteur — État tunisien, bailleurs de fonds (Banque mondiale…), agences de coopération internationale (JICA japonaise, GIZ allemande, AFD française…), agences onusiennes spécialisées (Programme des Nations unies pour l’environnement), agences de notation, experts, architectes et experts indépendants — ont pris l’initiative d’élaborer de nombreuses études stratégiques.

Diagnostic récurrent des vulnérabilités

Ces études, concoctées sur la base des vulnérabilités structurelles du secteur, estiment que l’industrie touristique tunisienne est un modèle économique à rénover. Ce secteur souffre de problèmes structurels : surcapacité hôtelière sur le littoral (90 %), faible diversification du produit touristique, pouvoir de négociation défavorable des prix de vente pour les hôteliers, stratégie marketing étroite et endettement élevé des entreprises hôtelières.

Des pistes de réforme

Tout en reconnaissant la solidité du secteur comme levier de développement pérenne, ces études recommandent l’exploration de pistes pour aider la Tunisie à faire face à la concurrence internationale et à augmenter la valeur ajoutée de cette activité. Dans le détail, elles suggèrent d’agir sur quatre volets : territorialisation (tourisme des régions) et diversification (création de nouveaux produits), gestion intégrée de la qualité, innovation et formation.

« De nombreux travaux de réflexion ont été entrepris pour remédier à la monotypie du secteur. Le résultat est, toutefois, décevant : rien n’a pratiquement changé. »

Une situation inchangée

Malheureusement, au regard des résultats sur le terrain et après une prise de conscience, depuis presque un demi-siècle, des vulnérabilités structurelles, la situation est toujours la même. Le secteur demeure monotypique, axé sur le balnéaire.

Les solutions pragmatiques récentes

Au niveau de l’État tunisien, au moins deux études stratégiques ont été mises au point ces quinze dernières années (2011–2025).

L’étude de l’ère Nejla Bouden

La plus récente a été élaborée au temps de la cheffe du gouvernement Nejla Bouden (2022–2023). À la lire de près, cette étude, menée à la hussarde semble-t-il, est une véritable « feuille de chou », juste une liste de généralités et de professions de foi galvaudées.

« Ce secteur souffre de problèmes structurels : surcapacité hôtelière sur le littoral (90 %), faible diversification du produit touristique… »

L’initiative de l’IACE

Le think tank, l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE), a fait mieux que le gouvernement en proposant, lors de son 9ᵉ forum (18 septembre 2025), des actions pragmatiques et applicables. L’Institut, qui a investi dans ce qui est possible, a opté pour une approche réglementaire chiffrée de créneaux à haute valeur ajoutée, insuffisamment exploités : tourisme de haut de gamme, tourisme de santé et de retraite, maisons d’hôtes, tourisme rural et chez l’habitant.

Concrètement, ces recommandations, si elles sont réalisées, permettront de générer des recettes totales de l’ordre de 13,17 milliards de dinars à l’horizon 2030, soit 24,45 % des recettes totales du secteur.

L’étude de 2011

La deuxième étude stratégique, effectuée en 2011 par le ministère du Tourisme, a mis l’accent sur l’intérêt à développer des filières à portée de main, comme les séjours courts et le tourisme des régions. Elle recommande aussi aux hôteliers de faire preuve d’innovation, de s’appuyer sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication, d’être à l’écoute des attentes de la clientèle et d’adopter des technologies permettant de pérenniser l’activité touristique.

Enfin, elle insiste sur la formation, gage de nouvelles figures professionnelles capables de créer des compétences dans le domaine du patrimoine, du tourisme et de l’environnement.

« Malheureusement, la situation est toujours la même. Le secteur demeure monotypique, axé sur le balnéaire. »

Le défi de la vision

Au-delà des conclusions des différentes études stratégiques, ce ne sont pas les solutions qui manquent. Ce qui fait défaut, c’est une vision sur plus de 25 ans et une volonté politique capable de confirmer, voire d’imposer, le tourisme comme levier de développement pérenne et à portée de main.

Abou SARRA

EN BREF

  • Le tourisme tunisien reste centré sur le balnéaire malgré 40 ans d’études.
  • Les vulnérabilités structurelles identifiées : surcapacité, faible diversification, endettement.
  • L’étude de 2011 proposait innovation, séjours courts, tourisme régional et formation.
  • L’IACE, en 2025, a avancé des solutions pragmatiques chiffrées : haut de gamme, santé, rural, maisons d’hôtes.
  • Les recettes projetées atteindraient 13,17 milliards de dinars en 2030, mais l’absence de vision et de volonté politique bloque la transformation.