Sami AYARILes pays l’un après l’autre affichent leurs ambitions avec détermination, traçant ainsi le chemin vers un avenir où l’innovation et la technologie, notamment à travers la publication de leur stratégie nationale de l’IA, forgent la future économie. Dans cette ère numérique, ils façonnent un paysage économique dynamique, propulsé par la créativité et la puissance transformative de la technologie IA.

  • La France: la stratégie nationale pour l’intelligence artificielle a pour ambition de préserver et consolider la souveraineté économique, technologique et politique de la France et de mettre l’IA au service de l’économie et de la société,
  • Le Royaume-Uni a publié sa stratégie nationale d’IA en 2021, un an après le Brexit. La stratégie de Londres donne la priorité aux investissements et à la planification pour répondre aux besoins à long terme de l’écosystème de l’IA, au soutien à la transition vers une économie fondée sur l’IA et à la gouvernance nationale et internationale grâce à des mécanismes de coordination renforcés, voire à la création de nouvelles institutions,
  • La stratégie des Emirats arabes unis en matière d’IA a une orientation différente de celle de ses homologues, avec l’objectif de devenir “le pays le plus préparé au monde pour l’intelligence artificielle, Être le pays le mieux préparé signifie bien plus que mettre en œuvre des lois […], cela implique de changer le monde de manière dynamique et volontaire […] Les Émirats vont construire une économie basée sur l’IA et non pas attendre l’arrivée d’une telle économie”.
  • Nation la plus peuplée du monde, l’Inde est également l’une des grandes économies dont la croissance est la plus rapide, et joue un rôle important et croissant dans l’écosystème de l’IA. La stratégie de New Delhi en matière d’IA, publiée en 2018 et mise à jour en 2022 vise à faire de l’Inde un leader mondial dans le domaine de l’IA, tout en garantissant que l’IA profite à tous les citoyens.#AIforALL

et la Tunisie dans tout ça ?

En Tunisie, la première initiative pour doter la Tunisie d’une stratégie nationale en IA a été lancée par le Secrétariat d’Etat de la Recherche Scientifique Khalil Amiri En 2018, une task force a été créée, pour développer cette stratégie, des ateliers de cadrage et de réflexion avaient eu lieu en partenariat avec l’Agence Nationale pour la Promotion de la Recherche Scientifique du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique.

Sur le thème de “Stratégie nationale d’IA : Libérer le potentiel des capacités de la Tunisie”, et depuis nous attendons la libération de cette stratégie nationale des tiroirs ou plutôt des PC, ou encore mieux du coffre-fort numérique d’un ministère..

L’IA est une révolution en marche, et la Tunisie ne peut pas se permettre de rester à la traîne

Depuis 2019, le Ministère de l’Industrie, des mines et de l’énergie avait poursuivi ces efforts, avec la mise en place d’une feuille de route sur trois ans et se déclinant en quatre axes :

1. Sensibilisation et vulgarisation de l’IA
2. Renforcement de l’écosystème
3. Lancement de pilotes
4. Adoption d’une stratégie nationale en IA

En Septembre 2021, le gouvernement tunisien lançait l’élaboration de la Stratégie Nationale en Intelligence Artificielle (IA) de la Tunisie, portée par quatre ministères, le ministère de l’industrie, des mines et de l’énergie, le ministère des technologies de la communication, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, et le ministère de l’économie et de la planification. avec l’appui de la GIZ et de The Future Society (TFS), mandatée par le Ministère fédéral allemand de la Coopération Économique et du Développement (BMZ) et dans un deuxième temps Fondation Konrad-Adenauer (Konrad-Adenauer-Stiftung)

Avec pour vision me dit-on, rendre la Tunisie un hub technologique rayonnant sur la région, attirant les talents, entraînant une croissance inclusive et favorisant une meilleure qualité de vie pour tous ses citoyens à l’aube de 2030 grâce à l’IA.

Le temps perdu est précieux, et il est urgent de mettre en place une stratégie nationale d’IA ambitieuse et efficace

Je termine cet aperçu historique, en traçant dans le temps ce processus ô combien bureaucratique, qui n’étonne pas par ailleurs les tunisiens, me rappelant les séries télé des années 90.

La finalité, pour rappel, est de rédiger un document de 60-70 pages avec quelques objectifs chiffrés et des dates pour mettre en œuvre une stratégie nationale digne de ce nom.

Des questions, qui m’arrivent à l’esprit tout de suite, pourquoi on n’y arrive pas 6 ans plus tard ?

Alors que certains pays avaient publié leur stratégie 2.0, le Canada est le premier au monde à publier sa stratégie nationale et c’était en 2017 à titre d’information.

Quelques chiffres pour comprendre les enjeux et la situation, le classement actuel de la tunisie dans l’indice «Government AI Readiness Index» 2023 d’Oxford Insights: 4e en Afrique, 9e dans le monde arabe, 11/19 en région MENA, derrière la Jordanie, le Liban, 81e dans le monde parmi 193 pays

Selon Oxford Insights, le classement de la Tunisie, dans l’indice de préparation à l’IA du gouvernement a été :

En 2020 : 69/172, en 2021 : 77/160, en 2022 : 70/183 et en 2023 : 81/193 enfin.

Singapour (81,97), la Corée du Sud (75,65) et le Japon (75,08) obtiennent des scores exceptionnels dans tous les piliers.

Ces trois économies obtiennent plus de 80 points sur 100 dans les piliers “Gouvernement” et “Données et infrastructures”. En ce qui concerne le pilier du secteur technologique, ces pays – ainsi que la Chine, Taïwan et la Malaisie – figurent parmi les 25 pays les plus performants au monde.

Plus particulièrement, Singapour est le leader mondial dans les piliers “Gouvernement” (90,40) et “Données et infrastructures” (89,32).

la Tunisie obtient un score de 46,07 avec dans les piliers “Gouvernement” (48,31), “secteur technologique” (38,47) et “Données et infrastructures” (51,44), nous sommes effectivement trop trop loin !

Pour la publication des stratégies nationales, jusqu’en 2021, 64 pays avaient publié leurs stratégies complètes en matière d’IA (16 projets), toujours selon Oxford Insight.

D’après le rapport de l’OCDE sur les politiques d’IA : En décembre 2023, l’OCDE a publié un rapport indiquant que 103 pays avaient mis en place des politiques nationales d’IA, dont 72 incluent des documents stratégiques complets.

Ce nombre concorde avec celui de l’observatoire de l’IA, une initiative de la Commission européenne, qui recense 74 pays ayant publié des stratégies nationales d’IA.

Nos décideurs sont-ils au courant, je dirai oui, Sont-ils conscients de ce gap, ont-ils compris les enjeux, je dirai, non, alors qu’est ce que nous attendons, dans un monde en pleine effervescence, qui vit une nouvelle révolution avec l’IA générative, des pays qui se disputent les meilleurs talents, les meilleurs chercheurs, qui attirent les meilleurs investisseurs, une ruée massive vers les brevets …

L’intégration des compétences tunisiennes de l’étranger est essentielle pour le développement de l’IA dans le pays

Des pays qui placent l’IA comme un enjeu de sécurité nationale et une opportunité irréfutable pour asseoir sa puissance et sa domination économique et géopolitique.

Pourquoi tout ce temps perdu pour la Tunisie et pour l’économie tunisienne et surtout aux talents et chercheurs tunisiens ?!

Je suis submergé par un mélange de sentiments d’amertume et de frustration profonde, même indigné en posant toutes ces questions… Lech Walesa disait “Il n’est guère possible de construire quoi que ce soit si la frustration, l’amertume et un sentiment d’impuissance prévalent.”

J’essaie d’être constructif en travaillant sur le “non-soi”, surmonter ces sentiments négatifs et comprendre pourquoi

Amer, Oui amer parce qu’ils ont écarté voir exclu les hautes compétences tunisiennes en IA et je dis bien tunisiennes résidentes à l’étranger Canada, Etats-unis, Europe, etc..

En tant que fondateur de RECONNECTT et co-fondateur du Tunisian AI Society qui regroupe les meilleurs au monde, dans les GAMMA, les meilleurs laboratoires, les meilleures universités,.. j’en sais quelque chose, oui, je sais et je connais leurs compétences, leur patriotisme et leur fidélité.

Le capital humain est la clé du succès de l’IA, et la Tunisie doit investir dans la formation et l’éducation de ses jeunes

Mes compatriotes de la diaspora ont laissé leurs places involontairement à des hauts fonctionnaires qui n’ont rien à voir des fois avec l’IA, avec tous mes respects bien sûr.

Les décideurs de l’époque auraient préféré les compétences étrangères de TFS, même nos compétences locales ont été intégrées dans quelques ateliers à partir de 2022.

Frustré et indigné, parce que nous avons perdu un temps inestimable pour redresser notre pays et amorcer les premiers dessins d’une économie de connaissance et de savoir,
et surtout retenir nos talents qui quittent faute d’horizons et perspectives.

Selon le rapport Government AI Readiness Index» 2023

“il est pertinent d’observer de près les initiatives stratégiques en matière d’IA dans la région, avec trois pays; Irak, Tunisie et Bahreïn”. L’intégration efficace de l’IA dans les opérations gouvernementales dépend de l’existence d’une main-d’œuvre qualifiée.

À l’avenir, un domaine potentiel de progrès dans la région MENA est le capital humain, où le score moyen s’élève à 44,70.

L’IA peut être un moteur de croissance inclusive et de meilleure qualité de vie pour tous les Tunisiens

Dans ce contexte, la région présente des initiatives prometteuses qui ont le potentiel de cultiver une main-d’œuvre plus compétente selon le rapport.

Et voilà, “la Tunisie un hub technologique rayonnant sur la région, attirant les talents, entraînant une croissance inclusive et favorisant une meilleure qualité de vie pour tous ses citoyens à l’aube de 2030 grâce à l’IA”

serait -il possible en 6 ans ?

Croisons les doigts et espérons que le vent de la chance souffle dans notre direction, embrassons l’incertitude avec espoir en espérant que nos hautes compétences résidant à l’étranger soient intégrées dans la mise en œuvre de cette stratégie, une fois publiée !

Sami AYARI
co-fondateur et coordinateur général du Tunisian AI Society.
Fondateur et Président de RECONNECT

PS : Ce classement est basé sur 39 indicateurs répartis en 3 piliers, Gouvernement, Secteur de la technologie, Données et infrastructure

le pilier Gouvernement
Un gouvernement devrait avoir une vision stratégique de la façon dont il développe et régit l’IA, appuyée par: réglementation appropriée et prise en compte des risques éthiques (gouvernance et éthique). En outre, elle doit posséder une forte capacité numérique interne, y compris les compétences et les pratiques qui favorisent son adaptabilité en le visage des nouvelles technologies.

le pilier Secteur de la technologie
Un gouvernement est tributaire d’une bonne offre d’outils d’IA provenant du secteur technologique du pays, qui doit être suffisamment mûre pour approvisionner le gouvernement. Le secteur devrait avoir un niveau élevé d’innovation la capacité, soutenue par un environnement économique favorable à l’esprit d’entreprise et une bonne circulation des des dépenses de R-D. De bons niveaux de capital humain — les compétences et l’éducation des travailleurs dans ce secteur — sont également cruciaux.

le pilier Données et infrastructure
Les outils d’IA ont besoin de beaucoup de données de haute qualité (disponibilité des données) qui, pour éviter les biais et les erreurs, doivent également être représentatif des citoyens d’un pays donné (représentativité des données). Enfin, ces données le potentiel ne peut être réalisé sans l’infrastructure nécessaire pour alimenter les outils d’IA et les fournir;
aux citoyens.