« La documentation, c’est la mémoire d’un pays, car le quotidien d’aujourd’hui, c’est l’histoire de demain » écrit le conservateur de musée, collectionneur de photographies et le peintre sénégalais, Adama Sylla, considéré l’un des précurseurs de la photographie au Sénégal.

Une série de photographies captées par le photographe qui a, durant quarante ans, documenté et archivé la vie de son pays et plus abondamment celle de l’ancienne capitale du Sénégal, Saint-Louis, est présentée dans le cadre d’une exposition de photographies “L’histoire de demain” qui se tient au 32bis au coeur de Tunis, du 23 février au 31 mars 2024. L’intitulé de l’exposition organisée en collaboration avec la galerie d’art contemporain parisienne Talmart est tiré du livre « L’Histoire de Demain » premier ouvrage photographique édité sur Adama Sylla dans la collection Art/Photo de la maison d’édition tunisienne Lalla Hadria Editions, venant accompagner l’exposition.

Parution de ce mois de février 2024, le livre bilingue (français anglais) et réunissant près de 60 photographies dans un texte de l’artiste et curateur ivoirien Ange-Frédéric Koffi, est l’aboutissement de l’important travail sur les archives d’Adama Sylla fait par Marc Monsallier, galeriste à Paris, et Ange-Frédéric Koffi, le commissaire d’exposition. Un travail qui mène en février 2023 à deux expositions à Paris, à la galerie Talmart et la galerie La La Lande, avant de débarquer à l’espace 32bis à Tunis en 2024.

L’exposition, qui sera accompagnée de programmes publics avec notamment une série de rencontres et des projections de films, donne à voir des moments que le photographe a capté comme une fête improvisée, des instants à la plage, un mariage… et à saisir l’œuvre d’un photographe qui ne se contente pas de pratiquer son art en studio mais qui circule avec ses appareils photo dans des espaces divers, ce qui élargit son champ d’action : le plein air de jour ou de nuit, l’espace intime, la ville, le fleuve, la mer, la brousse…

Dans son œuvre, Adama Sylla donne aux personnes qui s’y intéressent, l’occasion de compléter une connaissance parcellaire de la photographie en Afrique, en apportant à l’édifice, la compréhension du continent et met en lumière les sophistications de la culture sénégalaise.

La carrière de Sylla, né en 1934, débute au musée de la Mer de Gorée où ses études d’architecture l’amènent à devenir assistant du conservateur du musée en 1956. Un an plus tard, de retour à Saint-Louis, il commence l’apprentissage de la photographie à la Maison des Jeunes où il ne tarde pas à devenir le directeur de la reproduction photographique.

L’année de ses trente ans, en 1964, sera décisive pour son approche documentaire de la photographie. Sous l’influence du directeur du Centre de recherche et de documentation du Sénégal à Saint-Louis (CRDS, ancien IFAN) d’alors, il bénéficie d’une bourse de l’Unesco pour voyager en France et apprendre aux côtés de Jean Rouch au Musée de l’Homme à Paris. L’enseignement portera sur le « cinéma-vérité ».

Sur les traces des pionniers de la photographie africaine, l’œuvre de Sylla, lit-on dans le livre, loin des images prises par les photographes reporters ou scientifiques occidentaux, met alors en lumière la modernité des formes principalement urbaines du Sénégal.

Poursuivant son archivage en étant attentif aux corps, aux regards et aux détails formels qui viennent composer ces images, Adama Sylla n’est pas dans un rapport esthétique. Il saisit les histoires personnelles qui l’entourent. Par sa pratique acharnée, il développe une écriture visuelle propre à lui et surtout il révèle les vérités et les formes universelles qui nous unissent. Son oeuvre est l’achèvement d’un processus qu’il aura mis quarante ans à accomplir, laissant derrière lui une histoire et des archives à analyser.