C’est démoralisant de constater que les exportateurs publics et privés tunisiens continuent à faire la sourde oreille aux appels du pied que leur lancent, depuis des années, des diplomates asiatiques accrédités, à Tunis.  Ces derniers, convaincus du potentiel d’échange commercial énorme qui existe entre le sud-est asiatique, un marché de plus de 2 milliards de consommateurs,  et la Tunisie ont constamment invité à maintes reprises  les structures d’appui à l’exportation et le patronat tunisiens, à prendre des initiatives pour vendre dans leurs pays,  sans quotas,  tous genres de produits tunisiens : huile d’olive, vin, dattes, phosphate, tourisme….

Pour ne citer qu’un exemple récent, l’ambassadeur du Japon en Tunisie Takeshi Osuga s’est « porté volontaire pour faire le promoteur de l’huile d’olive tunisienne au Japon».

L’huile d’olive et les feuilles d’olivier prisés par les japonais

En visite à Sfax, à l’occasion, de la tenue du « souk  Ezzeytouna », plus connue sous la dénomination officielle 5ème édition du Festival International de l’Olivier de Sfax qui s’est tenu, du 29 janvier au 06 février 2024, sous le signe « Sfax une destination du tourisme oléicole», le diplomate japonais a révélé un chiffre fort intéressant sur l’opportunité qu’offre le marché nippon pour l’écoulement de l’huile d’olive tunisienne.

Selon lui, « sur 12 bouteilles d’huile d’olive vendues dans les grandes surfaces japonaises, une seule est d’origine tunisienne ». La part des exportations d’huile d’olive tunisienne vers le Japon ne représente que 0,7% du total des exportations de ce produit.

Pour lui, c’est une présence très faible au regard de la grande qualité confirmée à l’échelle internationale de l’huile d’olive tunisienne.

Il a ajouté que les feuilles d’olivier sont, également, prisées au Japon pour leurs multiples bienfaits. Les japonais utilisent à des fins diverses ces feuilles et désirent en disposer, sur leur marché, de manière durable et régulière.

La Corée du sud, un des plus grands pays importateurs d’huile d’olive et de vin

Les sud-coréens sont également intéressés par les produits de terroir tunisiens. Leurs diplomates ne cessent de le dire. A titre indicatif, interpellé par un magazine de la place sur les frustrations qu’il a connues durant son mandat en Tunisie, l’ancien ambassadeur de Corée du sud, Cho Koo-Rae, s’est déclaré “étonné de constater que rien n’est fait du côté tunisien pour écouler, sur le marché sud-coréen des produits de terroir de qualité comme l’huile d’olive et le vin lesquels sont en plus de bonne qualité”.

Il a ajouté que « la Corée est un des plus grands pays importateurs d’huile d’olive et de vin dans le monde. Quelque, 10 millions de coréens visitent chaque année le monde entier et consomment énormément de l’huile et du vin. Nous importons ces produits d’Australie et d’autres pays dans le cadre du libre-échange. La Tunisie peut faire autant ».

S’interrogeant sur les raisons qui empêchent la Tunisie d’exporter ces produits de terroir vers la Corée, le diplomate sud-coréen a déclaré que « si le gouvernement ne peut pas faire quelque chose dans ce domaine, il faut au moins que les privés se démènent, dans le cadre des chambres mixtes, pour créer des écosystèmes favorisant l’impulsion des échanges ».

Abstraction faite des exemples japonais et sud-coréens, d’autres pays comme l’Indonésie, la Chine et la Malaisie, ont également exprimé, lors de la visite d’officiels en Tunisie, le besoin d’importer de Tunisie de nombreux produits dont certes les produits de terroir, mais également du phosphate.

Lors de sa dernière visite en Tunisie, fin décembre 2023, la ministre indonésienne des Affaires étrangères Retno Marsudi est venue paver le terrain pour la conclusion d’un partenariat stratégique avec la Tunisie.

Au plan économique, la Tunisie et l’Indonésie ambitionnent de conclure un accord commercial préférentiel.

Les détails seront examinés par les experts des deux pays en prévision de la 11ème session de la commission mixte prévue, Djakarta, en 2024.

Cesser de regarder petit

Concrètement, on s’attend à ce que les échanges commerciaux se renforcent de manière significative, particulièrement, en matière d’exportation vers l’Indonésie de plus grandes quantités de phosphate de produit de terroir (huile, d’olive, dattes…).

Mention spéciale pour le phosphate. « Nous envisageons la signature d’un accord pour multiplier les exportations de phosphate tunisien vers l’Indonésie », a déclaré Retno Marsudi à Tunis.

Cela pour dire au final, que la balle est, désormais, dans le champ tunisien. C’est aux structures d’appui à l’exportation et aux exportateurs privés tunisiens de s’organiser en partenariat public privé (PPP) pour conquérir le marché sud-est asiatique. Il y a de l’argent à gagner. Pour le faire, ils sont invités à changer de mentalité et à cesser avec leur tendance à regarder petit et à privilégier les bénéfices et profits de court terme avec des petits volumes.

A bon entendeur.