Anne GUÉGUEN
Anne GUÉGUEN, Ambassadrice de France en Tunisie

A l’occasion d’une rencontre avec la Presse en Tunisie, l’ambassadrice de France en Tunisie, madame Anne GUÉGUEN, a déclaré : “Nous sommes en début d’année, et je veux regarder vers l’avenir, mais je commencerai par un mot rétrospectif. 2023 a été une année éprouvante. Je ne peux ni ne veux commencer mon discours de vœux sans avoir d’abord une pensée pour tous ceux qui souffrent. Nous vivons une époque brutale, qui interpelle les cœurs et les consciences, que ce soit en Palestine, en Israël, en Ukraine, au Soudan, et dans bien d’autres parties du monde.

La réponse ne peut être que dans la solidarité et la fraternité. Et c’est cela que je voudrais souligner, en rappelant que la France s’est montrée solidaire et continue à l’être. Liberté, égalité, fraternité sont des principes qui guident l’action de la diplomatie française et c’est un honneur, en tant qu’ambassadrice de France, d’avoir pour mission de servir ces valeurs.

Autre sujet sensible pour nos pays, et qui est parfois source de malentendu, celui des visas et de la mobilité. En cohérence avec ses partenaires Schengen et l’UE, la France est engagée dans un effort important pour mieux organiser la mobilité professionnelle et étudiante et de manière générale rendre plus fluide la circulation de tous ceux et celles qui sont au cœur des échanges entre les deux rives, notamment dans les domaines économiques, scientifiques, culturels et artistiques. Vous devez savoir que 70% des visas Schengen délivrés en Tunisie le sont par le Consulat général de France à Tunis.

Autres améliorations réalisées : sur l’année 2023, près de 77% des demandes de visa ont abouti à des réponses positives, les délais d’obtention de rendez-vous pour les visas professionnels et les demandes de renouvellement de visas ont baissé (entre 10 à 15 jours).

Dans cette période de crises complexes, je souhaiterais évoquer trois idées sur notre relation avec la Tunisie :

1/ La première est que la relation de la France avec un pays partenaire et voisin comme la Tunisie ne doit pas être uniquement centrée sur nos échanges bilatéraux, mais doit permettre d’affronter ensemble les défis et les menaces de l’époque. Nous avons des intérêts et des besoins communs, et nous avons beaucoup à gagner à intensifier le dialogue et la coopération pour réussir ensemble la transition écologique et énergétique, pour assurer la sécurité alimentaire et sanitaire de nos pays, mais aussi relever le défi de la transformation numérique et des nouvelles technologies de la communication et nourrir l’innovation.

2/ La seconde idée est que notre proximité géographique et humaine sans pareil ne veut pas dire que la compréhension est acquise d’emblée ou définitivement. Nous devons y travailler, c’est une grande part de notre responsabilité de diplomates et de journalistes. Les défis de l’éducation, de la connaissance mutuelle, de l’information à l’heure des réseaux sociaux et de l’IA sont immenses si nous ne voulons pas laisser le champ libre à l’exploitation de l’ignorance et du préjugé. Les risques sont connus.

L’acte constitutif de l’UNESCO, dans une expression forte, dit que c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix – je pense que c’est important, autant que les solidarités matérielles auxquelles nous travaillons. 2024 est l’année des JO et du sommet de la Francophonie. Ce seront de formidables occasions pour se rencontrer et exercer cet esprit de fraternité.

3/ La troisième idée, c’est la nécessité renouvelée de la coopération. Face à la multipolarité conflictuelle du monde, il faut sortir des jeux à sommes nulles. Le gagnant-gagnant n’est pas un concept chinois. La densité du partenariat de la France avec la Tunisie est exceptionnelle. Ce partenariat se modernise, nous devons veiller à ce qu’il serve la paix, la justice, la liberté, la sécurité et la prospérité pour nos concitoyens. Je crois que nous gagnons tous lorsque nous cherchons sincèrement l’équilibre et la conciliation de nos intérêts – il faut de la realpolitik dans ce sens-là, mais je reste également fondamentalement convaincue de notre solidarité intellectuelle et morale, entre les deux rives de la Méditerranée, et que l’idéal démocratique de dignité, d’égalité et de respect de la personne humaine n’a pas de nationalité et doit nous unir.

A titre d’exemple, notre action de coopération et d’action culturelle aura, quant-à-elle, connu une activité intense cette dernière année. Je vous livre quelques chiffres qui donnent une idée de son intensité :

• 14 000 étudiants tunisiens en France, 1ère destination
• En 2024, près de 2,5 millions d’euros [budget annuel + FSPI confondus] pour la coopération universitaire et scientifique dont 1 million d’euros de bourses délivrées à des étudiants tunisiens et 770 000 euros par an pour les deux PHC dédiés à la mobilité des chercheurs entre nos deux pays
• 18 000 apprenants de français sur tout le territoire tunisien
• 18 000 élèves dans le réseau d’enseignement français en Tunisie dont 2/3 de Tunisiens
• Plus de 3 millions d’euros pour la coopération et l’action culturelle en 2024
• 15 000 personnes de la société civile soutenues ces deux dernières années à travers des projets de 25 associations sur le territoire tunisien
La réalité de la relation bilatérale est là.