Le Conseil Tunisien des Relations Internationales (CRI) présidé par Khemaies Jhinaoui, ancien ministre des Affaires étrangères, a récemment organisé un colloque intitulé « La Ceinture et la Route, dix ans après, Les acquis et les opportunités ». Une initiative dont la Chine vient de célébrer l’anniversaire en présence de 151 pays et 41 organisations internationales.

C’est Khemaies Jhinaoui, lui-même, qui a signé, alors ministre des Affaires étrangères, le 11 juillet 2017 à Beijing au nom du Gouvernement Tunisien le Mémorandum d’Entente sur l’adhésion de la Tunisie au projet « La Ceinture et la Route » a déclaré à l’ouverture du colloque : « Notre ambition était d’intégrer notre pays dans ce grand projet chinois et d’ouvrir la voie à une coopération plus dense et diversifiée entre nos deux pays amis ».

Pour rappel, « La ceinture et la route » projet annoncé en octobre 2013 par le Président Xi Jinping vise à stimuler les échanges et la connectivité entre l’Asie, l’Europe et l’Afrique, en améliorant les infrastructures et en facilitant l’investissement, le commerce et les contacts entre les peuples.

“Notre ambition était d’intégrer notre pays dans ce grand projet chinois et d’ouvrir la voie à une coopération plus dense et diversifiée entre nos deux pays amis.” (Khemais Jhinaoui, ancien ministre des Affaires étrangères)

Selon les estimations de la Banque Mondiale, l’Initiative génèrera chaque année 1600 milliards de dollars US soit 1,3%du PIB mondial, d’ici 2030, injectant ainsi une forte impulsion au développement macro-économique à travers le monde. « Parce qu’ils permettront de faire baisser le coût du commerce, les projets de transport entrepris dans le cadre des nouvelles routes de la soie peuvent conduire au développement des échanges commerciaux, à la hausse des investissements et à la réduction de la pauvreté » estime-t-on à la Banque mondiale.

Plus de 150 pays et 30 organisations internationales ont signé des documents de coopération à la « Ceinture et la Route », plus de 20 plateformes de coopération multilatérale ont été créées dans des domaines spécifiques, et des milliers de projets de coopération pratique ont été réalisés, catalysant près de 1.000 milliards de dollars d’investissements.

Une réponse aux échecs de la mondialisation made in Occident !

Survenant après la grande récession due à la crise financière de 2008, l’initiative chinoise a été la réponse aux échecs des politiques économiques occidentales. Elle vise d’après ses initiateurs à accroître les échanges, l’investissement et la croissance économique, renforcer la confiance dans les instances politiques chinoises et développer la connectivité régionale en Eurasie.

Même si considéré par l’Occident comme étant un projet menaçant dans la logique de « diviser pour mieux régner », à plein d’égards le bilan de l’Initiative « la Ceinture et de la Route » est positif.

Son excellence Wan Li, ambassadeur de Chine en Tunisie, a rappelé lors de la rencontre que le 3èmeForum organisé récemment en Chine sur la Ceinture et la Route « a envoyé le message le plus clair de la solidarité, de la coopération, de l’ouverture et du gagnant-gagnant au monde. Il a permis d’atteindre le consensus, le plus important, sur l’ouverture d’une nouvelle phase de la coopération de qualité dans le cadre de l’Initiative « la Ceinture et la Route ».

“L’Initiative génèrera chaque année 1600 milliards de dollars US soit 1,3%du PIB mondial, d’ici 2030, injectant ainsi une forte impulsion au développement macro-économique à travers le monde.” (Banque mondiale)

Pour précision, des contrats commerciaux de l’ordre de 97,2 milliards de dollars américains, ont été conclus pendant la Conférence des entrepreneurs organisé en marge du Forum en Chine, ce qui contribuera à la création de plus d’emplois et à la croissance économique dans les différents pays.

A l’Otan, on a une autre lecture de la grande réalisation chinoise. On estime, à ce propos, que le financement et la construction d’infrastructures « pourrait faciliter l’expansion militaire de la Chine, encourager les pratiques de prêts opaques, véritables pièges à endettement, faciliter l’espionnage par le biais de la route de la soie numérique, encourager des pratiques de travail douteuses et fermer les yeux sur la corruption, qui affaibliraient les efforts internationaux visant à une meilleure gouvernance » (sic).

La réalité économique et l’expansion de « La Ceinture et la Route » dans le monde démentent cette lecture.

« Le projet se déploie sur plusieurs continents et implique plus de cent cinquante pays. Entre 2013 et 2022 les échanges commerciaux entre la Chine et ses principaux pays partenaires ont connu un boom sans précédent enregistrant une croissance annuelle de l’ordre de 8,6% » indique Khemaies Jhinaoui.

Les investissements entre la Chine et ses partenaires se sont établis à plus de 270 milliards de dollars US et les contrats BTP ont atteint un chiffre record de 1.200 milliards de dollars US. D’innombrables infrastructure comme les routes, les ponts, les ports et de connectivité digitale sont entrés en service améliorant sensiblement les réseaux de connexion terrestre, maritime, aérienne et numérique à l’intérieur et entre les nations concernées. De nombreux parcs industriels dans des pays asiatiques et africains ont été aussi réalisés.

“La Tunisie pourrait être un partenaire de la Chine et réduire son déficit commercial avec le géant économique si le cadre réglementaire évolue vers plus d’ouverture et devient moins bloquant.” (Khemais Jhinaoui)

Rien qu’en Tunisie, nous pouvons compter l’hôpital militaire de Sfax, l’académie diplomatique, le Centre de Cancérologie à Gabès, les complexes sportifs dédiés à la jeunesse tunisienne à El Menzah et à Ben Arous et tout récemment la station photovoltaïque de Kairouan de 100 Mw.

La Tunisie pourrait être un partenaire de la Chine et réduire son déficit commercial avec le géant économique si le cadre réglementaire évolue vers plus d’ouverture et devient moins bloquant. « La Tunisie pourrait assumer le rôle de partenaire de choix dans sa région en stimulant les contacts, les échanges et la coopération entre la Chine et certaines zones géographiques. Autant notre pays a besoin de développer la connectivité physique et digitale à l’intérieur de son territoire autant il peut servir de pont pour les entreprises chinoises souhaitant explorer de nouvelles opportunités en Europe, en Afrique et dans le monde arabe » relève M. Jhinaoui.

“L’initiative de gouvernance mondiale de l’intelligence artificielle lancée par la Chine lors du Troisième Forum «La Ceinture et la Route» confirme la volonté de la Chine de développer des routes de soie numériques qui pourraient bousculer l’ordre établi.” (Khemais Jhinaoui)

L’initiative de gouvernance mondiale de l’intelligence artificielle lancée par la Chine lors du Troisième Forum « La Ceinture et la Route » confirme la volonté de la Chine de développer des routes de soie numériques qui pourraient bousculer l’ordre établi. Elles visent entre autres, le contrôle des câbles sous-marins ce qui équivaut au contrôle de la transmission des informations à l’international.

La position stratégique de la Tunisie au croisement de l’Afrique et de l’Europe est idéale en la matière. Les dirigeants actuels sauront-ils capitaliser sur leur positionnement géostratégique ?

Nous y reviendrons.