“La planche à billets fonctionne à plein régime en Tunisie depuis décembre 2020. Mais le rythme s’est beaucoup accéléré en 2022 et encore plus en 2023”. C’est en tout cas ce qu’affirme l’économiste Ezzeddine Saïdane, dans un post publié mercredi 26 avril 2023 sur sa page Facebook.

“En 2022, le recours à la planche à billets s’est élevé à environ 5 milliards de dinars, souligne-t-il. Depuis le début de cette année, on en est à environ 4 milliards de dinars”.

Saïdane précise toutefois que “… lorsqu’on parle de planche à billets, il ne s’agit plus d’impression physique de billets de banque avec une imprimerie, du papier et de l’encre, mais plutôt de tout financement du déficit du budget de l’Etat par la Banque centrale de manière directe ou indirecte à travers les banques”.

Toujours selon lui, “en 2023, l’Etat s’est permis d’augmenter son budget de plus de 22% en une seule année, alors que le pays souffre de difficultés économiques, financières et sociales sans précédent”, regrette l’économiste.

D’après l’expert, au cours de ce même exercice 2023, “l’Etat a prévu un recours au financement local de près de 10 milliards de dinars, alors que la capacité du système bancaire et financier local ne dépasse guère 2 à 3 milliards de dinars par an. D’où le recours comme d’habitude à la planche à billets”.

“Les rapports récents du FMI, de la Banque mondiale, des agences de notation et des grandes banques qui ont l’habitude de financer la Tunisie mentionnent tous le danger de continuer à monétiser le déficit budgétaire. Monétiser le déficit budgétaire veut dire le recours à la planche à billets !”, a-t-il encore noté.

Saïdane affirme que “la planche à billets est de toute évidence une des sources de l’inflation en Tunisie, puisqu’il s’agit d’injections de liquidités sans contrepartie en termes d’activité économique”.

Il s’interroge, à ce propos, sur les véritables raisons de l’augmentation du taux directeur. Et de répondre en disant qu’il s’agit juste “de servir l’image des autorités monétaires qui, en procédant ainsi, donnent l’impression de lutter contre l’inflation qu’elles ont contribué à créer”.

Dans une déclaration accordée récemment à une radio locale, la directrice générale de la politique monétaire à la BCT, Rym Kolsi, a pourtant démenti le recours de l’Institut d’émission à la planche à billets pour financer le budget de l’Etat. Selon elle, la loi n°2016-35 du 25 avril 2016 portant fixation du statut de la Banque centrale interdit tout financement direct ou indirect du budget de l’Etat ainsi que toute avance ou découvert.

Elle a souligné que la BCT ne finance pas directement le Trésor public mais plutôt les banques, notamment durant cette conjoncture marquée par un manque de liquidité.
S’agissant des nouvelles émissions monétaires, la responsable a fait savoir qu’il s’agit d’opérations méthodiques dans la mesure où la BCT évalue les besoins de l’économie en liquidité ainsi que la croissance pour décider de nouvelles émissions.

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