Sur 5 enfants, 1 a des difficultés d’apprentissage, 2 parmi 3 ne sont pas détectés et 35 % quittent l’école. C’est beaucoup et c’est dramatique pour les enfants et les parents. C’est là où intervient Hidayet Ayadi, «Sghartoon» et son application mobile comprenant des outils de thérapie adaptés.

Hidayet Ayadi a, avec le soutien de son professeur devenu co-fondateur, conçu une plateforme B2B où parents et enfants peuvent s’adonner à des exercices pour déceler les difficultés d’apprentissage chez les enfants, être orientés vers les thérapeutes les plus proches, disposer d’un agenda pour gérer les rendez-vous avec le thérapeute, planifier les séances d’apprentissage et travailler sur des jeux thérapeutiques interactifs qui facilitent l’évaluation du niveau de performance des enfants et l’identification des difficultés d’apprentissage.

C’est une expérience personnelle qui a déterminé le destin de Hidayet qui a vécu jusqu’à l’âge de 16 ans en Egypte. Sa sœur avait des difficultés d’apprentissage, n’arrivait pas à avoir de bonnes notes et n’assimilait pas le savoir avec aisance. On n’en comprenait pas les raisons. De retour en Tunisie, il y a eu remake du même scénario égyptien dans les écoles tunisiennes.

Son diplôme d’ingénieur de video-game en main, l’idée déjà en tête et un professeur mentor l’appuyant et l’encourageant, Hidayet Ayadi a démarré l’aventure Sghartoon, en 2018. «Ça n’a pas toujours été facile, nous avons essuyé des échecs à nos débuts mais nous avons tenu bon, et aujourd’hui nous nous imposons dans un marché important et demandeur, celui de la zone MENA, entre autres l’Arabie Saoudite et Oman. Tous les enfants ont le droit d’accéder au savoir, notre rôle à nous est de les aider et de les assister pour que parents et enfants puissent saisir les raisons des blocages ».

Les deux premières levées de fonds de Sghartoon n’ont pas été très importantes, n’ayant pas dépassé les 200 000 dinars ; la troisième, par contre, est assez conséquente, il s’agit de 1 million de dollars que Hidayet compte investir dans l’amélioration de ses applications, l’élargissement de son champ d’action et la conquête de nouveaux marchés.

Sghartoon a conçu une plateforme B2B destinée aux thérapeutes et aux écoles, comprenant une bibliothèque de jeux thérapeutiques, un service clients personnalisé et un agenda pour l’organisation des rendez-vous avec les patients.

L’abonnement des thérapeutes à la plateforme s’élève à un peu plus de 300 dinars tunisiens (environ 100 $) par mois. Le business model B2C inclut le prélèvement de 5% de commission sur toute consultation effectuée et permet l’usage d’outils de suivi de la progression de l’état des patients online.

Mais il n’y a pas que le B2B, il y a aussi le B2G qui touche les ministères et les organismes gouvernementaux qui peuvent profiter des solutions offertes par la plateforme Sghartoon pour gérer les problématiques se rapportant aux difficultés d’apprentissage chez les enfants.

A travers des dessins animés, Sghartoon ambitionne, avec l’assistance des thérapeutes, d’accompagner l’enfant dans l’assimilation des connaissances. Il s’agit, grâce aux jeux et aux applications éducatives, d’évaluer sa compréhension et ses compétences.

Les dessins animés ou les jeux vidéo éducationnels permettent à l’enfant de se familiariser de façon ludique aux informations qu’il reçoit sans contrainte et sans coercition. Et parce que le dessin animé fournit différents types d’indices visuels et auditifs, il favorise le maintien des capacités attentionnelles de l’enfant.

La bibliothèque Sghartoon offre gratuitement 87 jeux via sa plateforme facile d’accès aux enfants et aux parents.

Depuis le mois de décembre 2021, 31 thérapeutes se sont abonnés à Sghartoon, 2 000 enfants ont testé l’application et 3 grandes compagnies profitent de ses services.

Les objectifs visés pour 2024 c’est de passer de 150 thérapeutes, 3 000 parents et de 10 écoles en 2023 à 300 thérapeutes en Tunisie, 300 thérapeutes en Arabie Saoudite, 6 000 parents, 20 écoles et 1 million de dollars de revenus.

Le marché de l’éducation destiné aux enfants en difficultés a atteint, en 2020, 18,65 milliards de dollars dans le monde. On lui prévoit une croissance régulière de 6,24% chaque année jusqu’en 2028.

C’est grâce à ces initiatives et pareils projets que l’ont peut rompre avec la culture de l’échec dans des pays comme les nôtres et que nous pouvons donner leurs chances à ceux qui assimilent le savoir différemment.

« Nous ne sommes plus dans une posture plombante et culpabilisante des enfants qui n’arrivent pas à absorber aisément la connaissance, mais dans la culture de rebond, celle qui pourvoit les enfants – qui ne parviennent pas à maîtriser les enseignements qu’ils reçoivent et qui ne sont pas outillés intellectuellement pour cela – des instruments didactiques pour réussir. Les applications que nous concevons permettent de rendre les enfants plus perméables au savoir et donnent aux enseignants les moyens de détecter les difficultés des enfants en un laps de temps », précise Hidayet Ayadi.

Les partenaires de Sghartoon sont l’Université centrale, TopNet et Innovative Transformation.

Amel Belhadj Ali