Les perspectives de croissance économique en Afrique du Nord restent positives avec des taux de croissance du PIB réel (4,5% en 2022 et 4,2% en 2023), légèrement supérieurs à la moyenne africaine, selon le rapport sur les “Perspectives économiques en Afrique du Nord 2022” de la Banque africaine de développement (BAD), rendu public mercredi 16 novembre 2022 à Tunis.

Libye, championne de la croissance en Afrique en 2021

Selon ce rapport, hors reprise exceptionnelle en Libye, la croissance régionale a rebondi à 3,9% en 2021, soit une augmentation de 4,2 points de pourcentage. En considérant la Libye, la croissance moyenne du produit intérieur brut réel en Afrique du Nord a été la plus élevée de toutes les régions du continent en 2021, à 11,7% en raison d’une très forte reprise dans ce pays (177,3%).

“Les fondamentaux macroéconomiques se sont améliorés au lendemain de la pandémie de Covid-19, toutefois les performances varient d’un pays à l’autre”, précise le rapport de 103 pages.

Des politiques budgétaires et monétaires expansionnistes en Afrique du Nord

Pour stimuler la relance de la croissance, les gouvernements d’Afrique du Nord ont maintenu des politiques budgétaires et monétaires expansionnistes. Ainsi, en 2021, le déficit budgétaire régional moyen, à 5,4% du PIB, est resté l’un des plus élevés d’Afrique. Ceci étant, l’inflation en Afrique du Nord (4,6% en 2021) était inférieure à la moyenne continentale (13%). Malgré la reprise des échanges commerciaux et l’amélioration des transferts de fonds des travailleurs à l’étranger, le déficit du compte courant a été l’un des plus importants d’Afrique, à 4,1% en 2021.

Mais les soldes des comptes courants se sont améliorés dans les pays exportateurs de pétrole (Algérie et Libye) alors qu’ils se sont détériorés ou ont stagné dans les autres pays d’Afrique du Nord.

Gare à l’inflation !

Bien que les perspectives de croissance économique en Afrique du Nord soient positives avec des taux de croissance du PIB réel légèrement supérieurs à la moyenne africaine, la hausse des cours mondiaux des denrées alimentaires et de l’énergie devrait alimenter l’inflation et peser sur les dépenses publiques, surtout dans les pays où ces produits sont fortement subventionnés (Algérie, Libye, Tunisie).

Le conflit entre la Russie et l’Ukraine demeure une source majeure d’incertitude pour la région, compte tenu de ses liens économiques étroits avec l’Europe.

Par ailleurs, ce conflit a permis de rappeler le caractère stratégique de la souveraineté énergétique et la nécessité d’amorcer un virage vers les énergies renouvelables et de renforcer l’efficacité énergétique.

Les pays d’Afrique du Nord restent grandement dépendants des énergies fossiles, du fait que la région constitue une importante zone de production d’hydrocarbures dans le monde, lit-on dans la synthèse du rapport de la BAD.

“Si les économies d’Afrique du Nord font généralement preuve d’une meilleure résilience aux effets des changements climatiques que les autres pays du continent, elles demeurent très vulnérables avec un niveau élevé de stress hydrique. L’élévation des températures et du niveau de la mer et la répétition des épisodes de sécheresse représentent une réelle menace pour la sécurité alimentaire, les populations, la biodiversité ainsi que le patrimoine culturel et touristique”.

La transition vers les énergies renouvelables essentielles pour atténuer l’impact du changement climatique

Le rapport précise que la transition énergétique des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables est essentielle pour atténuer l’impact des changements climatiques en Afrique du Nord. Malgré un potentiel considérable en matière d’énergie solaire et éolienne, l’écart entre la capacité installée de production des combustibles fossiles et les ressources renouvelables reste important et continue de se creuser.

Les ressources financières constituent un levier important pour réussir la transition vers des économies faiblement carbonées et résilientes aux changements climatiques. Les financements disponibles en faveur du climat sont cependant bien en-deçà des besoins, estimés sur la période 2020-30, à 363,3 milliards de dollars américains pour l’Afrique du Nord.

Si la région perçoit le même montant annuel de financements climatiques que celui reçu sur la période 2016-20 (3,96 milliards de dollars par an), le déficit de financement qui en résulterait serait de plus de 29 milliards américains par an pour la période 2020-30, ce qui limiterait considérablement la capacité de la région à renforcer sa résilience climatique.

L’énergie de source solaire accapare l’essentiel des financements extérieurs

Le rapport alerte sur l’importance du financement privé de l’action climatique pour atteindre les objectifs climatiques et relève que l’Afrique du Nord continue à se heurter à des obstacles liés à leur mobilisation.

Selon le document, les flux de financement international destinés aux pays d’Afrique du Nord se sont concentrés sur la production d’énergie de source solaire. Il note que les pays d’Afrique du Nord doivent attirer davantage d’investissements dans les technologies de production et de gestion des énergies renouvelables et des ressources hydriques.

Réformer les mécanismes des subventions…

Les auteurs du rapport recommandent ainsi de continuer à investir dans des sources d’énergies renouvelables, de réformer les subventions aux combustibles fossiles et de mobiliser les financements en faveur du climat en Afrique du Nord. Maintenir et promouvoir la sécurité alimentaire dans la région demeure un objectif majeur.

Aussi, l’adoption et la diffusion de nouvelles technologies agricoles et de cultures résilientes aux aléas climatiques avec de meilleures stratégies de gestion des ressources en eau et des sols, revêtent une importance capitale pour soutenir la productivité agricole et la sécurité alimentaire.

Ce nouveau rapport appelle les gouvernements nord-africains à mobiliser leurs efforts pour mettre en place les institutions compétentes et créer les conditions d’investissement et de mise en œuvre d’une transition juste dans les pays.