La corruption, qui compte parmi les principaux facteurs qui ont alimenté la Révolution, continue de saper la confiance des citoyens dans les institutions tunisiennes, notamment depuis sa généralisation à plus grande échelle. C’est ce que révèle la Banque mondiale dans son rapport intitulé “Diagnostic systématique pays” publié jeudi 10 novembre 2022.

Généralisation de la corruption…

“Entre 2009 et 2011, un important changement s’est opéré au niveau de la perception de la corruption, lorsque le pourcentage de citoyens convenant de l’existence de pratiques de corruption au sein même des institutions gouvernementales est passé de 57% à 92%, pour se stabiliser par la suite.

Ce constat correspond à la tendance généralement observée dans les pays en transition après un régime autoritaire, où les citoyens aspirent à des changements politiques capables de freiner la corruption, outre l’ouverture et la liberté d’expression qui permettent de jeter plus de lumière sur les affaires de corruption.

Limites des initiatives anticorruption…

De nombreuses initiatives anticorruption ont été prises au lendemain de la Révolution, allant de la mise en place de l’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) à l’adoption de la loi portant déclaration des biens et des intérêts, de la lutte contre l’enrichissement illicite et le conflit d’intérêt (2018).

L’impact de ces initiatives est toutefois resté limité, en partie à cause des retards de mise en œuvre, du manque de ressources budgétaires et humaines et de la faible performance du système judiciaire, dans son ensemble, ce qui n’a pas permis au système judiciaire de sanctionner efficacement les fonctionnaires et hommes d’affaires inculpés de corruption.

On estime que la corruption s’est ’démocratisée depuis la Révolution, devenant endémique et largement répandue parmi la population et les milieux d’affaires”.

56% d’entreprises désignent la corruption comme obstacle à leurs activité

Les données provenant de l’enquête que la Banque mondiale a menée auprès des entreprises montrent que le pourcentage d’entreprises ayant désigné la corruption comme obstacle majeur à leurs activités est passé de 36% à 56%, sur la période allant de 2013 à 2020, un chiffre supérieur à la moyenne en vigueur dans la région MENA (43%).

A cela s’ajoute “l’augmentation de la proportion d’entreprises ayant identifié le système judiciaire comme étant une contrainte compromettant la primauté du droit (de 3,2% à 12,6%). La corruption a étendu ses tentacules jusqu’au processus électoral : le rapport – largement partagé – que la Cour des comptes a produit sur les élections de 2019, la présidentielle et les législatives – a fait état de nombreuses violations de la loi électorale, comme le financement illicite”.

L’Institution de Bretton Woods estime que la frilosité de la réaction institutionnelle aux cas de corruption et infractions à la loi électorale a contribué à miner la confiance des citoyens dans l’intégrité des autorités et des élections.