“Les pays d’Afrique du Nord doivent repenser leurs politiques agroalimentaires sur le court et le long termes afin de relever plusieurs défis, telles que la forte dépendance de la production pluviale aux changements climatiques et la surexploitation des ressources hydriques”. C’est en tout cas ce qu’a affirmé Abdelhalim Guesmi, directeur général de la Direction générale des études et du développement agricole au ministère tunisien de l’Agriculture.

“Sur le court terme, les pays de la région d’Afrique du Nord, très dépendants des importations de céréales et donc de la fluctuation des marchés mondiaux, doivent mettre en oeuvre toutes les solutions disponibles et réalisables pour faire face aux crises alimentaires auxquelles ils sont confrontées”, a-t-il ajouté, mardi 18 octobre 2022, lors d’un webinaire organisé par le Bureau de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA) en Afrique du Nord sur le thème : “Sécurité alimentaire et énergétique en Afrique du Nord sur fond de crise mondiale multiforme”.

Investir encore et encore dans l’agriculture

Sur le long terme, Guesmi plaide en faveur de la mise en place d’un système économique régional intégré à concrétiser à travers l’application des différents engagements des pays de la région dans le cadre des accords d’Agadir, de l’UMA (Union du Maghreb arabe), de la zone de libre-échange arabe et la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).

Il s’agit également de concevoir des politiques nationales d’atténuation des impacts du changement climatique pour régler l’insécurité hydrique et alimentaire sur le long terme, estime-t-il.

Guesmi appelle les pays d’Afrique du Nord à miser sur le développement du secteur de l’agriculture et à investir dans l’innovation scientifique et technologique appliquée à l’agriculture, tout en mettant en place une agriculture climato-intelligente. “L’objectif est d’améliorer les chaînes de valeur agroalimentaires et de réduire les pertes et les gaspillages de nourriture”, a-t-il expliqué.

Le responsable rappelle que la sécurité alimentaire et énergétique dans la région de l’Afrique du Nord constitue un sujet à la fois sensible, stratégique et complexe par ses multiples dimensions et impacts politique, économique, social, culturel et environnemental.

Selon lui, la crise économique sans précédent liée à la pandémie de Covid-19 et le conflit russo-ukrainien ont interpellé les pays de la région sur la nécessité de se pencher sur les solutions à même de prévenir les futures crises, d’atténuer et de s’adapter au changement climatique.

En attendant la réunion de Marrakech au Maroc

De son côté, la directrice du Bureau de de la CEA en Afrique du Nord, Zuzana Schwidrowski a annoncé que les recommandations issues de ce webinaire contribueront à alimenter les échanges lors de la réunion conjointe des Comités intergouvernementaux d’Afrique du Nord et de l’Ouest qui se tiendra du 1er au 3 novembre 2022 à Marrakech (Maroc).

Elle rappelle que cette rencontre vise à recenser les actions prioritaires en matière de sécurité alimentaire et énergétique qui permettront de garantir la résilience des économies nord-africaines et le bien-être de leurs populations.

Les effets de la Covid-19 et de la guerre…

D’après les experts de la CEA, les effets persistants du choc engendré par la COVID-19, aggravés par les changements climatiques, la guerre en Ukraine et les bouleversements commerciaux en cours, ont provoqué un ralentissement économique mondial et amplifié les défis structurels actuels liés à la sécurité alimentaire et énergétique en Afrique du Nord.

Les prix élevés des denrées alimentaires et de l’énergie et leur volatilité menacent de faire basculer les populations vulnérables dans l’extrême pauvreté, aggravant ainsi la faim et la malnutrition et mettant en péril les acquis du développement, estiment les experts.

A l’heure actuelle, l’Afrique du Nord importe une part significative de ses besoins en céréales, laquelle (part) représente 16 à 17% des importations mondiales de blé.

Une double ambition…

Pour l’ancienne ministre de l’Environnement et du Développement durable de la Mauritanie, Marieme Bekaye, les pays de l’Afrique du Nord doivent avoir une double ambition dans leurs stratégies énergétiques. Il s’agit de satisfaire la demande interne en énergie, stimuler la croissance, créer des opportunités économiques et réduire la dépendance énergétique.

Ils doivent doivent, également, contribuer à l’action climatique globale pour devenir un acteur clé de la transition énergétique mondiale et à même d’exploiter le potentiel de production d’hydrogène vert et ses produits dérivés( ammoniac, méthanol), a-t-elle indiqué.