Mercredi 3 novembre 2021, à la clôture des travaux de la conférence sur la mise en œuvre et l’impact des décisions de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples, organisée du 1er au 3 courant à Dar es Salam en Tanzanie, les participants ont recommandé l’adoption d’une approche holistique pour évaluer le respect des décisions de la juridiction en tenant compte des différentes évolutions du cadre global de gouvernance dans les Etats concernés.

Ils ont mis l’accent sur l’importance pour la Cour africaine d’être plus précise dans ses décisions. Une des principales critiques formulées par les représentants des Etats membres lors des travaux, étant, justement, l’ambiguïté des décisions rendues par la Cour et qui selon eux, justifie le faible taux de leur mise en œuvre estimé à seulement 7 pc.

Les participants ont recommandé la mise en place d’un mécanisme plus efficace de suivi et de contrôle de l’exécution des décisions. Ils ont appelé les Etats membres de mettre en place, à leur tour, des mécanismes nationaux de suivi de la mise en œuvre des décisions de la Cour.

Le besoin d’assurer la liaison avec le conseil exécutif de l’Union africaine en vue d’engager des discussions avec les autorités nationales sur la mise en œuvre des décisions a également été souligné.

De leur côté, les Etats sont appelés à adopter des lois qui donnent effet ou renforcent les dispositions constitutionnelles sur les droits de l’Homme ainsi que les institutions internationales, ont-ils suggéré, mettant l’accent sur l’importance de donner un nouvel élan au dialogue entre la Cour et les Etats.

Pour faciliter la mise en œuvre des décisions de la Cour, les participants recommandent une collaboration optimale avec la société civile, les instances nationales chargées des droits humains, les juges et les avocats.

Adapter les législations et pratiques administratives à la jurisprudence de la Cour

Concernant l’impact des décisions de la Cour sur les systèmes nationaux, une thématique longuement débattue lors des travaux, les participants ont notamment appelé les gouvernements à la nécessité d’adapter leurs législations et pratiques administratives à la jurisprudence de la Cour.

Ils ont souligné le rôle que peut avoir la société civile en plaidant en faveur de la ratification, par les Etats africains, du Protocole de la Cour et le dépôt des déclarations de reconnaissance de la compétence de la juridiction.

Il faut supprimer l’article 34 du protocole relatif à la déclaration 

D’ailleurs, une des propositions formulées par les participants est d’abroger l’article 34 du protocole relatif à la déclaration car ils estiment qu’elle est contraire à l’objectif visé derrière la création de la Cour et de l’engagement pris par les Etats membres en ratifiant le protocole.

Les participants ont mis en évidence l’importance, pour la Cour d’être au fait des développements jurisprudentiels dans les juridictions nationales et qui peuvent affecter l’interprétation et l’application du droit africain des droits de l’homme.

Ils ont invité les organes délibérants de l’UA à adopter la double approche consistant à persuader, d’une part, les Etats membres à se conformer aux décisions, et, d’autre part, à recourir à la coercition en imposant des sanctions aux membres récalcitrants.

Lors des discussions, les participants ont mis en avant le rôle que la Cour africaine, elle-même, peut jouer pour assurer une application optimale de ses décisions. Ils sont, à cet égard, souligné le besoin de davantage de clarté au niveau des décisions, encourageant la Cour à tirer profit de l’opportunité offerte par la réforme institutionnelle de l’UA pour rendre le système africain des droits de l’homme plus efficient.

Deux nouvelles adhésions

La conférence a été marquée par l’annonce du dépôt par deux nouveaux pays, La Guinée Bissau et le Niger, de la déclaration de reconnaissance de la compétence de la Cour, une condition pour les citoyens et les ONG de saisir directement la Cour, après épuisement des voies de recours au niveau national.

Avec ces deux nouvelles adhésions, le nombre des pays concernés par cette déclaration sera porté à 8.

Plus de 200 délégués représentant 44 Etats membres de l’UA, des organes de l’Union, des juridictions régionales et sous-régionales des droits de l’homme, des pouvoirs judiciaires et législatifs, des institutions nationales des droits de l’homme, des académiciens, des associations de la société civile et des conseils des barreaux, ont pris part à la conférence.

Une rencontre qui a tenté d’analyser la manière dont les décisions de la Cour sont reçues et mises en œuvre au niveau national et leur impact sur les systèmes judiciaires nationaux