Faire coup double à Djerba, c’est possible. Jumeler le Sommet de la Francophonie avec un deuxième round du Sommet Afrique – France, c’est plausible. Donner au continent une ambition commune.

Par Ali Abdesslam

Le Haut comité de coopération tuniso-français (HCC) a convenu d’une salve de 15 accords en matière de coopération. Tout est bon à prendre, par temps de disette. Malgré les effets d’annonce, la récente réunion du HCC était à caractère “Business as usual“. Les projets convenus ne semblent pas hautement impactants pour le futur économique des deux pays. La France est le premier partenaire économique de la Tunisie hors énergie, mais on a le sentiment, contrariant hélas, que comme dans un vieux couple, cette relation sature. On ne voit point de projets structurant se dessiner à l’avenir. Et le succès du projet de faire de la Tunisie une place régionale de l’innovation paraît aléatoire.

Comment redonner du panache à ce tandem ?

Convertir le HCC en levier de planification stratégique

L’après-Covid-19 est en train de se jouer, à l’heure actuelle. Le monde traverse bien une période de révision planétaire des choix économiques. La France elle-même, à l’instar de beaucoup de puissances occidentales, entend rapatrier de certains sites asiatiques ses entreprises à caractère stratégique. Et en la matière, la cartographie des IDE pourrait changer de physionomie, en faveur du voisinage européen. Et ce serait bien que la Tunisie reprofile son attractivité à l’effet de capter davantage d’IDE français.

Beaucoup de partenariats importants peuvent être négociés. L’avenir est en train de prendre forme et autant y faire bonne figure. A examiner le chemin de la délocalisation de l’industrie automobile, on a le sentiment que les jeux sont faits étant donné que les constructeurs français ont choisi leur partenaire dans la région. Et là on se dit qu’il faut davantage continuer à explorer et trouver des arrangements sur des chaînes de valeur prometteuses.

Dans cette perspective, le HCC apporterait davantage aux uns et aux autres, s’il se convertissait en un levier de planification stratégique.

A l’heure actuelle, la proposition qui consiste à faire de la Tunisie une plateforme de l’innovation reste à issue hypothétique car les compétiteurs ne manquent pas sur la région. Il est vrai que cette initiative est en ligne avec l’écosystème créé par le Start Up Act. Cependant, cette ambition gagnerait en réalisme si on lui donnait une envergure continentale. Et, par conséquent, deviendrait raisonnablement viable.

AfriqueFrance : la première frappe à Montpellier et le rebond à Djerba

Au mois de novembre 2021, la Francophonie, majoritairement africaine, il est bien de le rappeler, organisera sur l’Ile de Djerba, son dix-huitième sommet. Son thème, assez prémonitoire, comporte deux composantes imparables, à savoir la connectivité ainsi que la diversité. Il s’agit de voir dans quelle mesure « le numérique pourrait être un vecteur de développement et de solidarité dans l’espace francophone ».

En plus du traditionnel “Village francophone“, se tiendra un Forum économique, à cette occasion. Ce dernier est de faible portée car la vocation du Sommet reste essentiellement culturelle et sociétale. Il se trouve que le Sommet Afrique – France se focalisera sur un thème compatible à savoir « les personnes qui incarnent le renouvellement générationnel ». Et le thème est en phase avec une stratégie tunisienne qui vient d’être activée à travers l’initiative “Diaspora Mobilisation Act“ (DIMA).

Ce sommet se tiendrait au mois d’octobre de cette année, dans la ville de Montpellier. A un mois d’intervalle, il est tout à fait concevable qu’il puisse tenir un deuxième round à Djerba, étant donné qu’il mobilise le même collège de dirigeants que celui de la francophonie.

Nous avons connu cela avec le Sommet Mondial de la Société de l’Information (SMSI) de 2005. Son premier round s’est tenu à Genève en Suisse, lequel a été suivi par le rendez-vous de Tunis.

La Francophonie et l’Africanité sont deux initiatives fongibles l’une dans l’autre. Et coupler les deux sommets qui leur seront consacrés, c’est accroître les chances de trouver des pistes prometteuses de partenariat économique.

Quant au projet de plateforme de l’innovation, il connaîtrait, à cette occasion, un test de vérité, car Djerba serait la terre d’accueil des plus grands opérateurs des deux bords. On serait fixé tout de suite sur son sort.