Comme dirait le philosophe, le gouvernorat, depuis la révolution, semble frappé par une malédiction : celle du pétrole et du gaz, dans un premier acte, et maintenant celle du plâtre, dans un second acte.

En effet, hier les sociétés énergétiques étrangères étaient la cible des grèves sauvages, sit-in anarchiques et autres revendications sociales les plus étonnantes, aujourd’hui ce sont des sociétés tunisiennes –mais étrangères à la région- qui investissent pourtant dans le gouvernorat où l’Etat a perdu son autorité, qui subissent le banditisme et le blocage anarchique de leurs productions.

Selon des sources dignes de foi, la Société industrielle du plâtre du sud-Ksour, considérée comme le fabricant numéro un sur le marché du plâtre en Tunisie, souffrirait dans le silence, et ce depuis plusieurs années.

Face à la passivité étonnante des autorités, devant les blocages imposés par les protestataires, son site de production dans la région de Oued El Ghar subit des fermetures subites et illégales suite pour des raisons souvent insignifiantes, comme les disputes entre agents, le refus de l’application des lois du travail, le chantage…

Ces fermetures, qui peuvent durer de quelques jours à plusieurs semaines, auraient connu leur apogée en 2020. Car, outre la fermeture imposée pendant la première période de la pandémie de la COVID-19 pour des raisons sanitaires, la production est bloquée depuis le mois d’août à cause d’un problème entre familles de la région.

L’affaire aurait éclaté suite aux sanctions prises par la direction de la société contre des employés qui auraient commis de graves écarts disciplinaires. L’un d’eux aurait même agressé le directeur des ressources humaines de la société. Mais les sanctions prises à son encontre auraient déplu aux protestataires, qui ont bizarrement été soutenus par des personnes influentes de la région.

Du coup, depuis le 20 août, ils ont bloqué les accès à l’usine et imposé l’arrêt total de son activité en réclamant la réintégration des employés licenciés.

Cet arrêt de la production a causé des pertes colossales à la société qui produit en temps normal 1 000 tonnes de plâtre par jour dont 300 tonnes destinées au marché local et 700 à l’exportation.

La valeur des pertes étant estimée à 150 000 dinars par jour, la société a donc perdu quelque 15 millions de dinars depuis le début de ce dernier blocage.

D’un autre côté, ces multiples fermetures subites des chaînes de production occasionnent de sérieux dommages aux équipements de l’usine, puisque la société n’a pas le temps nécessaire pour planifier des arrêts dans les règles de l’art avec des précautions de conservation de ses produits pour de longues durées.

Ainsi, une cargaison de 20 mille tonnes de plâtre emballée depuis l’été et prête pour l’expédition à l’étranger a péri à l’usine et n’est plus commercialisable, parce que la société n’a pas réussi à la sortir à cause du blocage imposé par les protestataires.

Mais avec les multiples perturbations des livraisons de son produit à l’export, ses clients internationaux l’ont abandonnée pour s’approvisionner désormais auprès de ses concurrents égyptiens, marocains ou turcs.

Heureusement, après de multiples appels aux autorités pour sauver cette société, pour préserver ses 250 emplois directs et des centaines de postes indirects, le dialogue entamé avec les protestataires a finalement abouti et a mis fin au sit-in qui a bloqué la production durant de longs mois.

Sauf que la joie de la reprise de l’activité, entamée le 23 novembre 2020, n’a été que de courte durée, puisque les protestataires ont envahi de nouveau les locaux de la société, mercredi 9 décembre 2020, et bloqué encore sa production pour réclamer la réintégration des employés licenciés.

Face à cette tournure inquiétante des événements qui ne menacent pas seulement la pérennité de cette société mais aussi l’économie nationale, les autorités sont appelées à intervenir pour mettre fin à ce cirque et protéger les investissements dans cette désormais très chaude région de Tataouine.