Qualifié par ses auteurs de « réaliste », le projet de la nouvelle loi de finances pour l’exercice 2021 (PLF 2021) vient d’être soumis pour examen à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) à la date limite constitutionnelle du 15 octobre 2020. Il devrait être adopté après débat, à une autre échéance constitutionnelle, le 15 décembre de la même année. 

1- Principales caractéristiques : Le PLF 2021 s’articule autour de quatre axes : poursuite des réformes fiscales et modernisation de l’administration ; impulsion de l’investissement et de l’épargne ; renforcement des ressources de l’Etat et amélioration du recouvrement fiscal ; lutte contre l’évasion fiscale et promotion du decashing.

A en croire le document du PLF 2021, aucune augmentation de taxes ou création de nouvelles taxes n’y a été incluse.

2- Croissance : Elle sera positive, soit de l’ordre de 4%. Le budget a été établi sur la base d’un prix du baril de pétrole de 45 dollars. Mais silence radio sur l’autre paramètre de calcul, la parité du dinar par rapport aux deux principales monnaies d’endettement et d’investissement : l’euro et le dollar.

3- Montant du budget : Le PLF 2021 prévoit un budget d’un montant de 52,6 milliards de dinars pour l’exercice 2021 contre 47 milliards de dinars en 2020, soit un taux de croissance de 4% et un déficit budgétaire prévu de 8 milliards de dinars. En principe, si on respecte la continuité de l’Etat, ce budget est préparé dans un horizon pluriannuel avec comme finalité ultime le ciblage de résultats et de performances en harmonie avec les objectifs fixés et les enveloppes programmées pour les atteindre.

4- Recettes : Le projet du budget 2021 sera financé par des ressources de l’ordre de 33,009 milliards de dinars. Ces ressources sont réparties en ressources fiscales (29,725 milliards de dinars), en ressources non fiscales (2,484 milliards de dinars) et en dons (800 millions de dinars).

Pour la première fois, les autorités tunisiennes pourraient, pour soulager les finances publiques, demander à la Banque centrale de Tunisie et autres acteurs du marché financier de racheter une partie de la dette tunisienne (50%).

5- Emprunts : La part des emprunts est estimée à 19,608 milliards de dinars, dont 16,608 milliards de dinars sous forme de crédits extérieurs et 2,9 milliards de dinars sous forme d’emprunts intérieurs et sous forme de ressources du Trésor de 100 millions de dinars. Les emprunts précités seront utilisés, selon le PLF 2021, pour financer le déficit budgétaire à hauteur de 8,007 milliards de dinars, le principal de la dette intérieure (4,995 milliards de dinars), le principal de la dette extérieure (6,506 milliards de dinars) et le remboursement de prêts et d’avances du Trésor (100 millions de dinars).

6- Dépenses : Globalement, le PLF2021 ne prévoit pas d’augmentation des dépenses ordinaires. Par les chiffres, le budget 2021 servira à financer des dépenses estimées à 41,016 milliards de dinars. Hors dettes, elles seraient de l’ordre de 30 milliards de dinars.

Mais cependant, aucun chiffre sur la part de la masse salariale dans le budget.

7- Développement : Les crédits alloués au développement sont estimés à 7 milliards de dinars dont 1,5 milliard de dinars réservés au financement des projets.

Concernant l’investissement privé. Le PLF2021 propose une mesure phare, celle de soutenir les très petites et petites entreprises à la faveur d’un régime fiscal privilégié.

8- Dette : Le taux d’endettement, non signalé dans le PLF 2021, pourrait dépasser, au cours de cet exercice, les 100% du PIB en 2021, soit environ 122 milliards de dinars. Quant au service de la dette public, il s’élèvera à 15,7 milliards de dinars. Ce montant assez élevé, voire une pointe en matière de remboursement, s’explique par l’arrivée à échéance de plusieurs prêts extérieurs contractés.

9- Déficit budgétaire : il serait de 8%, exigeant la mobilisation de 20 milliards de dinars. Il faudrait leur ajouter la mobilisation de 10 milliards de dinars pour boucler l’exercice 2020.

10- Social :

-Gestion de l’étape post-Covid-19 : elle consistera essentiellement en la mobilisation des moyens financiers nécessaires pour acheter les vaccins. La Banque mondiale a fait état de sa disposition à aider la Tunisie en la matière. Le vice-président du Groupe de la Banque mondiale pour la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord, Ferid Belhaj, a annoncé que « la Tunisie sera parmi les dix premiers pays à obtenir un soutien pour l’acquisition des vaccins Covid-19 ».

Cette pandémie a coûté en 2020 à la Tunisie 2,5 milliards de dinars, outre le manque à gagner en matière de recettes fiscales et parafiscales (6 milliards de dinars).

-Emploi : Le PLF2021 prévoit la suspension des recrutements dans la fonction publique à l’exception de certains secteurs (santé, sécurité dans les limites de 7 000 au total) et le non-remplacement des retraités.

Selon le PLF2021, le nombre des agents autorisés à exercer dans le secteur public (ministères, établissements publics, entreprises publiques…) a été fixé à 644 772.

-Des engagements syndicaux à honorer : au rayon des contraintes budgétaires, il y a lieu de signaler l’engagement du gouvernement à réviser à la hausse le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) et à régulariser la situation des ouvriers des chantiers, avec comme corollaires d’énormes besoins pour leur financement.

Abou SARRA