La filière des dattes en Tunisie se trouve, dans la conjoncture actuelle, face à de grandes difficultés internes et externes, liées essentiellement à un excès de production sur le marché local et un blocage des exportations à cause de l’épidémie du coronavirus.

Dans deux des grandes régions de production des dattes, Kébili et Tozeur (sud de la Tunisie), les agriculteurs font face à d’autres défis et à une situation qui devient de plus en plus difficile.

Il s’agit, selon le président du syndicat régional d’Agriculteur de Kébili, Issam Bennaceur, des coûts de production élevés, de la rareté des ressources en eau, du manque de main d’œuvre et aussi de l’absence d’un fonds de compensation et d’indemnisation des accidents qui surviennent sur les lieux du travail.

“Les agriculteurs souffrent, aujourd’hui, de grandes difficultés financières, surtout qu’ils ne parviennent pas à commercialiser la totalité de leur production de la saison écoulée”, a déclaré Bennaceur à TAP.

“Pour le cas de Kébili, nous n’avons presque rien commercialisé de notre récolte 2019-2020. En fait, 80% de notre récolte qui était destinée à l’exportation vers l’Europe se retrouve bloquée, actuellement, au Maroc, à cause de la crise sanitaire. Des milliers de tonnes de dattes, non commercialisés sur le marché local, sont aussi placés dans les frigos des agriculteurs de la région”, a-t-il noté.
Selon ses dires, la situation va empirer avec le cumul de la nouvelle récolte de cette saison et ce qu’elle va engendrer comme problèmes de commercialisation.

Pour la région de Tozeur, le président du syndicat régional d’Agriculteur dans ce gouvernorat du sud, Fadhel Ben Slama a évoqué un autre problème, celui du grand nombre d’intermédiaires entre les producteurs et les consommateurs finaux.

“Le prix de vente des récoltes de dattes, proposé par les grossistes et intermédiaires, actuellement pour la nouvelle récolte, ne dépasse pas les 2 dinars, pour le kilo, ce qui couvre à peine juste la moitié des coûts de production”, a-t-il dit.

Le président de l’Union régionale de l’agriculture de Tozeur, Taoufik Toumi, a appelé, ainsi, les agriculteurs des oasis à ne pas se précipiter et vendre leurs récoltes de dattes.

“Il faut attendre jusqu’à ce qu’un prix de vente sera décidée, lors d’une réunion qui sera tenue, en octobre, entre les exportateurs et l’organisation agricole”, préconise le responsable.

D’après lui, “le prix de vente (kg) acceptable, devra se situer entre 3,800 dinars et 4 dinars, comme l’année dernière, par rapport au coût de production du kilo, estimé à 3,500 dinars”.

Le SYNAGRI avait récemment, exprimé, dans un communiqué, sa grande inquiétude concernant “la situation des producteurs de dattes au sud tunisien, en particulier la variété “Deglet Nour”, en raison des pressions financières et sociales auxquelles ils sont soumis par rapport au démarrage en retard de la saison de commercialisation des dattes”.

Il a appelé l’Etat à intervenir pour ajuster l’offre et la demande et fixer des prix de référence qui garantissent les droits des différents intervenants.

Le syndicat a aussi évoqué la nécessité d’élargir les domaines d’intervention du Fonds de promotion de la qualité des dattes pour inclure toutes les étapes du processus de production, de revoir le système de crédit agricole saisonnier pour le petit agriculteur, et d’activer le Fonds d’indemnisation des dégâts agricoles causés par les catastrophes naturelles ainsi que de permettre à l’agriculteur oasier d’en adhérer.

En Tunisie, 50 000 agriculteurs exercent dans la filière des dattes et 6 millions de palmiers se trouvent dans les régions de Kébili, Tozeur, Gabès et Gafsa (une superficie de 56 mille ha). La production moyenne nationale s’élève à 340 mille tonnes, dont presque le 1/3 est destiné à l’exportation.