La Compagnie de Phosphate Gafsa (CPG), avec des pertes financières de 480 millions de dinars (MDT) à fin 2019, ne peut plus tenir ses principaux engagements, notamment le paiement des cotisations sociales (34 MDT) et des impôts (36 MDT).

Au niveau de la production, la société a enregistré une baisse de 3,6 millions de tonnes par an, contre un volume de plus de 8 millions de tonnes en 2010.

Ainsi, classée cinquième à l’échelle mondiale au niveau de la production, la compagnie a perdu la plupart de ses marchés traditionnels.

Interrogé par l’agence TAP, le directeur général adjoint de la CPG, Rafâa Nassib, a souligné que la société est aujourd’hui incapable de répondre aux besoins du Groupe chimique tunisien et de la société tuniso-indienne ” Tifert ” en phosphates, et ce sous l’effet de la baisse de 60% de la production par rapport à 2010, contre une hausse des coûts de production de manière vertigineuse, à la fin de 2019, à 197,6 dinars la tonne (contre 48 dinars en 2010).

Nassib estime donc important de trouver une solution au problème du transport du phosphate par voie ferrée, notant qu’”il faut œuvrer rapidement pour mettre à niveau le système du transport de phosphate, qui constitue un facteur essentiel pour le retour de la production, de manière à permettre à la Tunisie de retrouver sa position à l’échelle internationale dans le domaine de la production de phosphate et des engrais.

Quant au PDG de la CPG, lors d’une séance d’audition de la Commission de l’industrie, de l’énergie, des ressources naturelles, de l’infrastructure de base et de l’environnement de l’Assemblée, vendredi 3 juillet 2020, il a expliqué que le secteur du phosphate en Tunisie souffre des problèmes structurels surtout au niveau du transport.

Il a souligné que la régression structurelle du système du transport ferroviaire des phosphates commerciaux destinés aux usines de transformation s’élève à 70% par rapport à l’année 2010, ce qui a entraîné une diminution significative du volume global des ventes.

Les causes principales de la détérioration de la situation figurent les recrutements non productifs dans la société succursale (7 000), la hausse de la masse salariale des agents de la compagnie et de la Société Tunisienne du transport des produits miniers et des sociétés de l’environnement à environ de 70% du chiffre d’affaires de la société, ce qui représente un risque pour la pérennité de la société.

Il évoque aussi la charge croissante que représente la création de 4 sociétés d’environnement, dans les délégations de Metlaoui, Mdhila, Redaif et Om Araies), ainsi que trois sociétés à Gabès, Sfax et Gafsa, lesquelles emploient 12 200 agents avec une masse salariale de l’ordre de 170 millions de dinars en 2019. Il attire l’attention sur l’impact négatif de la non activation des sociétés d’environnement et de plantation.

L’entreprise n’a pas pu en outre recouvrer ses dues qui se sont élevées, en 2019, à près de 850 MDT, dont 392 MDT auprès du GCT (Groupe chimique tunisien) et 458 MDT auprès de la société Tifert.

Le responsable a évoqué l’incapacité de la Société tunisienne du transport des produits miniers à suivre le même rythme de l’extraction et de la production, ainsi qu’au niveau du transport des quantités nécessaires de phosphates à l’intérieur du bassin minier (déficit annuel de 14 millions de tonnes), outre les raisons liées à la diminution de la productivité des ouvriers suite à l’opération de recrutement à caractère social de 2013, laquelle a entraîné une baisse du niveau de la réparation et de l’exploitation.

Ali Khemili, le DG de la compagnie, a évoqué le retard important dans la réalisation des grands projets notamment ceux visant à augmenter la capacité de production de la société précisant que parmi les causes de ce retard figurent les problèmes fonciers.

Il note que parmi les mesures prioritaires pour surmonter les difficultés de la CPG, figurent la sécurisation des sites de production, et la garantie de la sécurité des agents et de la préparation des unités de production, en assurant leur maintenance et leur mise à niveau au niveau technique, soulignant l’impératif de lutter contre les protestations sociales “non justifiées”.

Khemili a donné un aperçu sur la situation de la compagnie, ou les revendications échappent au cadre de négociation avec les parties syndicales et le recours à l’arrêt anarchique de la production par les ouvriers.

Les protestations relatives à la revendication de l’emploi dégénèrent au point d’interdire aux travailleurs l’accès aux centres de production pour les plus simples raisons (coupure d’eau ou d’électricité) ainsi que le blocage et parfois l’arrêt total du transport par les agents des sociétés de l’environnement et de jardinage pour des raisons inacceptables (retard de versement des salaires, revendication d’un statut…)

De leur côté, les députés ont critiqué l’absence de l’Etat et son incapacité à appliquer la loi face à tous ces problèmes et difficultés que vit la CPG.

La présidente de la Commission de l’énergie, Abir Moussi, a affirmé que la commission œuvre à résoudre ce problème et compte auditionner la partie sociale.

A cet égard, la Commission prévoit l’organisation de plusieurs séances pour débattre de cette question en présence des responsables gouvernementaux (ministères de l’Energie, des Finance, des Affaires sociales, de l’Environnement et du Développement) et programmera une visite au bassin minier de Gafsa, selon Moussi.