En Tunisie, un effort important a été fait pour mettre en place les bonnes incitations et apporter l’appui nécessaire à l’investissement agricole. MAis des faiblesses existent au plan de l’accès à l’information quant à l’existence de ces dispositifs, l’appui à la commercialisation des produits et l’accessibilité aux marchés, une fois l’entreprise installée. C’est ce qu’a déclaré Yannick Fiedler, expert chargé de la promotion des investissements agricoles responsables à l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

S’exprimant en marge d’une conférence organisée vendredi 18 octobre à Tunis sur l’importance d’augmenter les investissements responsables dans l’agriculture pour réaliser les Objectifs du développement durable (ODD) à l’horizon 2030, il ajouté que la FAO a reçu une requête du ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche qui vise dans son plan quinquennal 2016/2020 à augmenter de 55% le volume des investissements agricoles, par rapport au plan précèdent, d’où l’idée de développer des investissements responsables dans le secteur agricole.

Le travail, a-t-il avancé, a été axé sur l’identification des besoins des investisseurs dans le secteur agricole afin de leur permettre de réaliser des investissements et de s’assurer de la durabilité et rentabilité de ces derniers.

Il a souligné que l’INRAT (Institut de la recherche agronomique) et la FAO ont procédé à une délimitation des champs prioritaires, à savoir la région du Nord-Ouest où le taux de chômage des jeunes diplômés est important, alors qu’il y a un fort potentiel au niveau des filières oléicole et laitière.

L’objectif, désormais, est de définir une vision pour ces jeunes entrepreneurs dans cette région, d’identifier leurs principaux besoins et d’établir un plan d’action ainsi qu’une feuille de route pour la FAO et l’APIA (Agence de Promotion des Investissements Agricoles).

Pour sa part, le professeur en économie durable et directeur du laboratoire d’économie rurale à l’INRAT Mohamed Elloumi a fait savoir que le projet s’inscrit dans le cadre d’une collaboration entre l’INRAT, la FAO et l’école d’agriculture de Berne (Suisse). Il vise à attirer les jeunes pour investir dans les secteurs agricole et agroalimentaire.

Les investissements agricoles responsables, a-t-il expliqué, doivent tenir compte de toutes les externalités (effets) négatives que peut générer un investissement et essayer de les éviter pour assurer une durabilité du développement qui sera créé (environnement…), vu qu’un investissement peut ne pas tenir compte de la durabilité des ressources.

Il a fait savoir que le travail a commencé à partir de deux constats. Le premier consiste en le vieillissement de la population agricole en absence de la relève vu le refus d’investir dans le secteur agricole et le deuxième concerne l’importance du nombre de diplômés chômeurs.

L’objectif est de créer une nouvelle génération d’agriculteurs et agro entrepreneurs, a-t-il encore dit.

Les principales filières (huile d’olive, lait, céréales) sont saturées dans certaines régions, notamment Sfax et le Sahel contrairement aux régions du nord-ouest et du Centre (Siliana, Zaghouan, Béja…) qui sont les plus pauvres et qui représentent des opportunités, notamment en termes de transformation.

Ces régions ont un créneau qui a misé sur la qualité et les jeunes peuvent trouver des niches de produits pour investir et valoriser ces derniers.

Il a fait savoir, dans ce cadre, que le projet a porté sur l’huile d’olive et le fromage de brebis dans la région de Béja, tout en créant un panier de biens permettant d’attirer une certaine clientèle pour la région. L’huile d’olive et le fromage peuvent être des produits d’appel mais il faut aussi des biens qui peuvent être valorisés sous forme de tourisme vert, gastronomies…

Des expériences ont déjà vu le jour dont des tables d’hôtes (offre de repas traditionnels à base de produits régionaux, issus autant que possible de produits soit d’exploitations agricoles, soit du terroir) qui se développent de plus en plus.

A Testour, autour de l’appellation d’origine contrôlée ” l’huile d’olive de Téboursouk “, ils sont en train de créer tout un panier de biens. “Ils produisent du fromage, du miel biologique de qualité et des essences forestières car la visite d’un client venu après un trajet de 80 kilomètres pour acheter de l’huile n’est pas rentable, alors que venir se promener, profiter de la gastronomie mais aussi acheter de l’huile et du miel…est bien plus rentable”, a-t-il encore dit.

Il a souligné, dans ce cadre, que l’idée de transformer le produit et de le rapprocher du client dans les centres urbains, via des points de vente collectifs, et accéder aux marchés étrangers fait l’objet d’une réflexion.

Il s’agit ainsi de créer, selon lui, des dynamiques d’accompagnement par la facilitation de l ’accès au financement et à l’information.