Un regard d’ensemble sur la qualité du discours des candidats à la présidentielle anticipée du 15 septembre 2019 tend à montrer que la Tunisie souffre de l’absence de leaderships patriotes, multidisciplinaires et géo-stratèges.

Ceux qui meublent, actuellement, le paysage politique ne se soucient que de “naniser” leurs adversaires, de cultiver l’art du discours réducteur et de mobiliser tous les moyens disponibles, y compris des pages Facebook sponsorisées, pour accéder à la magistrature suprême. Ils manœuvrent comme s’ils étaient ailleurs, voire dans une zone offshore.

Les grandes questions qui préoccupent réellement les Tunisiens sont occultées. Parmi celles-ci, figurent la refondation de l’Etat et l’impératif de le faire migrer de l’Etat prédateur-clientéliste vers l’Etat de droit et des institutions, la menace écologique qui pèse sur la pays, la menace terroriste et islamiste, la réforme de l’éducation, la réforme de l’administration publique…

La menace écologique est trop sérieuse pour l’occulter

De tous ces problèmes, c’est celui de la menace environnementale qui est le plus grave. Pour en saisir l’ampleur, par l’effet du réchauffement climatique et un de ses corollaires, la montée des eaux de la mer, une bonne partie du littoral risque tout simplement de disparaître.

Et pourtant, malgré la fragilité structurelle du territoire du pays et des menaces qui pèsent sur lui, par l’effet de la désertification, de l’érosion et de l’érosion marine, aucun candidat à la présidentielle n’a jugé utile d’en parler. En tout cas jusqu’à présent.

En effet, toutes les études et analyses nationales et internationales ont prouvé que si rien n’est fait, la Tunisie sera, sérieusement, exposée aux conséquences désastreuses du changement climatique.

Les Européens tirent la sonnette d’alerte

Nos partenaires européens s’inquiètent plus que nous du péril écologique. De passage à Tunis, il y a trois mois, Genevieve Pons, directrice générale Institut Delors, avait tiré la sonnette d’alerte.
Intervenant lors du traditionnel forum annuel de L’Economiste Maghrébin (2 et 3 mai 2019) organisé sur le thème «La Tunisie et le nouvel ordre commercial mondial», elle a appelé la Tunisie à accompagner sa transition démocratique par une autre écologique. «Car, dit-elle, la Tunisie sera fortement impactée par ce réchauffement et se doit de s’y préparer. Le changement climatique sera perceptible à travers la montée des eaux de la mer et l’épuisement des nappes phréatiques. Il risque d’impacter fortement deux activités vitales pour la Tunisie : la pêche et le tourisme».

Pour se prémunir, elle propose la migration vers les énergies vertes, l’option pour l’efficacité énergétique, la réutilisation des eaux usées, l’investissement dans les bus électriques, la rationalisation des eaux d’irrigation et la recharge des nappes souterraines.

Le 13ème plan 2016-2020 y a pourtant pensé

Néanmoins, à l’époque du gouvernement Habib Essid, 2015-2016, il y a eu une prise de conscience de cette menace écologique. Elle a été consignée dans le 13ème Plan de développement (2016-2020).

Ce plan a prévu un ensemble d’actions tendant à atténuer l’impact du changement climatique. Au nombre de celles-ci, figurent l’option pour les énergies vertes (solaire éolien…), le dessalement de l’eau de mer, l’acheminement des eaux du nord vers le centre et l’engagement d’actions pour protéger le littoral à Bizerte, au Sahel, à Sfax, au sud…

Malheureusement, nous sommes à une année de la fin de ce 13ème plan de développement, mais aucune -ou presque- de ces actions n’a été concrétisée de manière convaincante.

Même les projets solaires engagés sont trop minuscules et trop loin des mégaprojets développés dans ce domaine au Maroc et en Egypte par exemple.