Si la Tunisie réussit à bénéficier, à travers ses négociations avec l’Union européenne (UE) concernant l’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA), de programmes d’appui à des réformes structurelles, tous les défis, faiblesses et vulnérabilités du secteur agricole pourraient être relevés.

C’est ce qu’estime l’Institut tunisien des études stratégiques (ITES), dans une analyse de l’impact de l’ALECA sur le secteur agricole.

Plusieurs axes indispensables à développer…

Cependant, ces programmes d’appui doivent être similaires à ceux offerts aux pays européens candidats à l’adhésion à l’UE, note l’ITES, évoquant deux axes principaux de ces plans: la mise à niveau technologique de l’agriculture tunisienne et l’aménagement hydraulique du territoire agricole afin de rendre sa production indépendante des aléas climatiques.

Ils pourraient ainsi inclure la construction de nouveaux barrages et lacs collinaires afin de capter le maximum de ressources pluviales, de réduire la survenue d’inondations violentes, d’injecter l’eau des crues collectées à cet effet dans des lacs spécifiquement aménagés et la réinjecter dans les nappes souterraines superficielles ou profondes en déplétion.

L’ITES suggère de réhabiliter des barrages envasés par la surélévation de leur structure et la connexion de tous les barrages et grands lacs collinaires pour rendre leurs eaux mobiles afin de pouvoir les diriger à volonté vers les zones de besoin selon les cultures et les saisons.

Le développement des techniques d’irrigation économes en eaux, la lutte contre les intrusions d’eau de mer dans les nappes côtières et la préservation des sols cultivables contre la minéralisation… seraient inscrits parmi les axes de ces programmes.

L’ITS appelle aussi à adapter les engrais phosphates tunisiens aux normes phytosanitaires européennes, à développer des semences adaptées au climat tunisien et à lutter contre l’érosion pluviale et éolienne des sols cultivables par un aménagement approprié hydraulique et forestier.

Mécanisation de la récolte

Il est recommandé, d’après l’Institut, d’industrialiser et mécaniser la récole, de transformer et commercialiser les produits agricoles, de recycler les déchets et de développer l’infrastructure de transport afin de pouvoir dégager sans délai des produits périssables destinés à l’exportation.

Une agriculture mise à niveau européen sera en mesure d’affronter d’autres marchés de diversification, tels les marchés africain, moyen oriental, russe ou même asiatique, ce qui permettra à la Tunisie d’être en mesure d’assurer sa sécurité alimentaire, estime l’Institut.

Les faiblesses de l’agriculture tunisienne

L’agriculture tunisienne demeure “peu mécanisée”, peu financée” et “faiblement innovante”. C’est ce qui rend la peur de l’ALECA “réelle” “et légitime”, relève l’ITES.

Bien qu’elle dispose d’un savoir-faire séculaire, elle reste en grande partie traditionnelle sur plus de 70% du territoire agricole et semi industrielle sur ses 30% environ, ajoute la même source.
Basée sur les matières premières, l’agriculture traditionnelle, qui est répandue dans les zones de l’intérieur, ne permet pas des revenus stables et suffisants répondant aux aspirations des populations.

Face à l’émigration des jeunes vers les zones côtières ou vers l’extérieur du pays, l’agriculture traditionnelle s’appuie désormais sur une main d’œuvre féminine, elle même en voie de raréfaction et en voie de devenir de plus en plus chère.

Pour ce qui est de l’agriculture semi industrielle, elle se heurte à de nombreux facteurs limitant tels que la faible mécanisation, l’industrialisation insuffisante, la médiocrité des semences, l’incertitude de la pluviométrie et la population vieillissante des agriculteurs.

A ces facteurs déjà structurels, s’ajoutent les aléas climatiques peu prévisibles, telles l’insuffisance pluviométrique, la sécheresse et les calamités naturelles, outre les problèmes fonciers des terres collectives, des habous dissous et des terres domaniales, observe l’ITES.

Par conséquent, l’Institut tunisien des études stratégiques recommande d’obtenir une période de grâce aussi longue que possible pour l’agriculture traditionnelle voire l’exclure du champ des négociations.

Il suggère aussi de tirer le maximum de fonds structurels européens disponibles, de mettre en place un programme spécial pour rendre l’agriculture indépendante de la pluviométrie et entreprendre les réformes afin de tirer le meilleur profit de l’adhésion de la Tunisie.