Mehdi Mahjoub, président directeur général de City Cars, concessionnaire de la marque automobile sud-coréenne KIA Motors, nous a récemment accordé une interview au cours de laquelle il a parlé du groupe City Cars –des moments difficiles, des succès, de la récente distinction internationale, des ambitions du groupe pour les prochaines années…-, mais aussi de la situation du secteur automobile en Tunisie (marché parallèle, quotas, voitures populaires, etc.).
WMC : Si vous nous parliez du parcours de la marque KIA depuis son introduction sur le marché Tunisien ?
Mehdi Mahjoub : KIA vient de souffler sa 7e bougie, le premier showroom a ouvert le 7 décembre 2009. En 7 ans, KIA a pris énormément de place chez les Tunisiens grâce à plusieurs facteurs.
C’est d’abord une équipe entièrement engagée autour des valeurs qui servent le client.
Ensuite, nous avons pu développer un réseau conséquent pour servir nos clients. Aujourd’hui, nous avons ouvert 14 agences à travers le territoire, et nous finirons l’année avec 17 points de vente. Je rappelle par ailleurs que lorsqu’on a lancé la marque, on a été le premier à offrir une garantie de 5 ans, une offre qui a énormément facilité le lancement et la réussite de la marque -pas chère, robuste avec une garantie de 5 ans.
“Je dirais que le succès de KIA s’explique par plusieurs paramètres, car un seul paramètre ne peut pas engendrer la réussite”.
Au fil des années, les modèles ont changé, le service s’est amélioré, on a été à l’écoute de nos clients pour le service après-vente. Tout ceci a permis à KIA de se hisser à la place de leader du marché des VP (véhicules particuliers) en 2016.
Je dirais donc que le succès de KIA s’explique par plusieurs paramètres, car un seul paramètre ne peut pas engendrer la réussite.
Premièrement, il faut avoir une marque fiable -et KIA est reconnue à travers le monde comme une marque fiable-, bien adaptée aux conditions du pays. Il faut aussi avoir une équipe compétente.
“Toutes nos approches, toutes nos communications, toutes nos actions sont orientées client, car c’est lui qui fait vivre l’entreprise à travers l’achat des voitures, à travers le service après-vente, à travers ce qu’il dit”.
Toutes nos approches, toutes nos communications, toutes nos actions sont orientées client, car c’est lui qui fait vivre l’entreprise à travers l’achat des voitures, à travers le service après-vente, à travers ce qu’il dit. En un mot, le client reste le plus important ambassadeur de la marque en dehors de l’entreprise et de son réseau.
On croit savoir que l’entreprise est passée par une grande crise en 2011. Expliquez-nous.
Tout à fait. En 2011, l’entreprise est passée par une mauvaise période qui aurait pu entraîner sa disparition, avec les dégâts qu’a subi le parc de stockage de 700 voitures, avec l’incertitude des clients par rapport à la marque, l’incertitude des banques et de nos partenaires.
Cette épreuve nous a permis de sortir beaucoup plus forts, beaucoup plus soudés que jamais. Ces événements nous ont rendus plus déterminés à surmonter tous les obstacles qui se dressent devant nous, et montrer que KIA est une marque forte aussi bien par ses voitures que par son équipe.
Les résultats 2016 ?
En 2016 nous avons réalisé le meilleur des résultats. KIA est classée N°1 en termes de volume de vente des véhicules particuliers -en 2015, on avait fini 2ème avec un écart de seulement 14 unités.
Notre objectif pour l’année 2017 est de garder notre première place, car c’est souvent plus facile d’atteindre la première place mais difficile de la conserver.
Quel est le modèle le plus vendu en Tunisie ?
La Rio arrive en tête avec plus de 3.000 unités vendues –sachant que la Rio 4 portes et la Rio 5 portes sont très appréciées par les jeunes et les agences de location de voitures.
Il faut savoir que quand une marque est appréciée par les agences de location, c’est un excellent indicateur, car cela veut dire que c’est une marque fiable, surtout si en plus elle est appréciée par les clients.
“Au cours cette année 2017, nous lancerons la nouvelle Picanto (dont l’arrivée est prévue pour juillet-août), la Ceed, et bien entendu la Rio, la Sportage, la Sorento”.
L’autre modèle phare de l’année 2016 est la Sportage, un 4×4 qui se place déjà sur le podium des SUV en seulement deux mois, avec 250 unités vendues.
Au cours cette année 2017, nous lancerons la nouvelle Picanto (dont l’arrivée est prévue pour juillet-août), la Ceed, et bien entendu la Rio, la Sportage, la Sorento.
La marque KIA est-elle touchée par le marché parallèle ?
Je ne parlerais pas de contrebande mais plutôt de marché parallèle, parce que les voitures qui entrent sur ce marché sont des voitures dédouanées d’une manière tout à fait légale. Mais ces revendeurs ne paient ni TVA ni impôts, c’est pour cette raison que ce marché est qualifié de «parallèle».
Il faut cependant préciser que la Chambre est contre la vente du droit du FCR sans pour autant s’opposer au principe du FCR lui-même.
Pourquoi ce marché est devenu de plus en plus important?
Le développement du marché parallèle est dû aux restrictions d’importation de véhicules. Donc, le marché parallèle est une résultante du système des restrictions. En effet, quand les besoins du marché tunisien sont de 75-80.000 voitures, et que le volume global alloué aux importateurs officiels est de 50.000 voitures, forcément on va se retrouver avec 30.000 voitures sur le marché parallèle.
“Notre position à la Chambre des concessionnaires de voitures, c’est d’appliquer la loi, d’ouvrir le marché…”.
Notre position à la Chambre des concessionnaires de voitures, c’est d’appliquer la loi, d’ouvrir le marché. Ainsi, le marché parallèle va retrouver sa part de marché historique de 10-15% (contre 40 à 50% aujourd’hui en volume et plus de 60% en valeur, du fait que le marché parallèle se concentre sur les voitures plus chères).
85% des importations des concessionnaires officiels concernent des voitures 4, 5 et 6 CV, les voitures haut de gamme ne représentent pas plus de 10% de nos importations, ce qui veut dire que 90% des voitures de luxe qui circulent sur nos routes proviennent du marché parallèle.
“La lutte contre le marché parallèle devrait se faire par leur inclusion dans le circuit officiel et en mettant en place des moyens permettant de s’assurer de la traçabilité des voitures commercialisées sur le territoire tunisien”
La lutte contre le marché parallèle devrait se faire par leur inclusion dans le circuit officiel et en mettant en place des moyens permettant de s’assurer de la traçabilité des voitures commercialisées sur le territoire tunisien (telle voiture est rentrée sur le territoire national au nom de qui et vendue à qui, ce qui est inexistant aujourd’hui).
Depuis janvier 2017, les concessionnaires peuvent démarrer l’activité de reprise des voitures d’occasion …
Avant, les concessionnaires avaient le droit de vendre des voitures d’occasion, mais la partie fiscale était contraignante, en ce sens que la loi stipulait qu’il faut payer la TVA sur le prix total de la voiture. Par exemple, si on achète une voiture de 10.000 dinars, et après l’avoir reconditionnée, vous la revendez à 12.000 dinars, là vous payez la TVA sur les 12.000 dinars et non sur la valeur ajoutée de 2.000 dinars.
“Le lobbying de la Chambre des concessionnaires a permis d’obtenir gain de cause; désormais et à partir de cette année 2017, la TVA ne sera due que sur la différence entre le coût d’achat et le prix de revente du véhicule d’occasion”.
Finalement, le lobbying de la Chambre des concessionnaires a permis d’obtenir gain de cause; désormais et à partir de cette année 2017, la TVA ne sera due que sur la différence entre le coût d’achat et le prix de revente du véhicule d’occasion (sur les 2.000 dinars dans notre exemple).
Bien entendu, chaque concessionnaire est en train de se préparer, car il faut disposer d’un showroom séparé, disposé d’une équipe dédiée à l’activité de reprise et de vente de voitures d’occasion et avoir sur le marché un argus de référence (nous avons demandé à des experts tunisiens de nous en préparer un).
Le fait de revendre des voitures d’autres marques que le vôtre ne poserait pas de problème ?
Il n’y aura pas de problème, au contraire il y aura des recettes pour l’Etat, puisque vous achetez à un prix et vous en revendez à un autre prix supérieur; ensuite, il doit y avoir un service après-vente, donc il y aura forcément des recrutements; des infrastructures, et donc des investissements…
Les voitures d’occasion disposeront, après mise à niveau, d’une garantie minimum de six mois.
“Il faut également souligner que notre but chez KIA est de ne pas racheter que des voitures de notre marque, mais au contraire de reprendre les voitures d’occasion d’autres marques…”
Il faut également souligner que notre but chez KIA est de ne pas racheter que des voitures de notre marque, mais au contraire de reprendre les voitures d’occasion d’autres marques pour la vente d’une KIA neuve.
Chez City Cars, nous sommes en train de préparer un showroom et des ateliers multimarques entièrement dédiés à l’activité de l’occasion.
A propos de la voiture populaire…
Avant de relancer le programme de la voiture populaire, nous avions (concessionnaires de voitures) demandé de revoir deux choses: la marge du concessionnaire et le droit d’accès à la voiture populaire.
Pour la première demande, nous avons obtenu une marge brute de 1.000 dinars par véhicule au lieu des 500 dinars d’il y a 20 ans.
“Or, en 2017, celui qui paie un impôt de 5.000 dinars ne peut pas accéder facilement à l’achat d’une voiture populaire de plus de 20.000 dinars”.
Concernant les conditions d’accès à la voiture populaire, la loi de 1994 stipulait que l’accès à la voiture populaire était réservé aux personnes dont l’impôt ne dépassait pas les 5.000 dinars par an pour des voitures vendues à l’époque à 10.000 dinars. Or, en 2017, celui qui paie un impôt de 5.000 dinars ne peut pas accéder facilement à l’achat d’une voiture populaire de plus de 20.000 dinars.
Les négociations de la profession avec les autorités ont finalement permis d’aboutir au relèvement de ce plafond à 8.000 dinars, loi en attente d’adoption par l’ARP.
“L’augmentation du prix de la voiture populaire est due à l’importante chute du cours du dinar par rapport à l’euro et au dollar, et du fait que le client tunisien ne veut plus acheter une voiture sans options”
Il faut rappeler que l’augmentation du prix de la voiture populaire est due à l’importante chute du cours du dinar par rapport à l’euro et au dollar, et du fait que le client tunisien ne veut plus acheter une voiture sans options (aujourd’hui on ne peut pas vendre un véhicule non climatisé, un véhicule sans direction assistée par exemple).
Revenons sur les dernières distinctions de City Cars…
Pour ses performances au cours de l’année 2016, City Cars a obtenu le prix «The Award of distinction», c’est-à-dire l’importateur qui s’est le plus distingué au cours de l’année 2016. Cette distinction vient couronner nos efforts dans la qualité de service, l’application de la garantie, le volume des ventes et le fait que nous disposions d’un siège qui répond à 100% aux normes d’exigence de la marque KIA. La cérémonie s’est déroulée le 21 février 2017 à Singapour.
Un dernier mot peut-être?
Chez City Car, notre objectif premier est d’être le numéro 1 en Tunisie en termes de satisfaction client.
Dans ce métier on peut être le numéro 1 en termes de volume de vente, mais si on n’est pas le numéro 1 en matière de satisfaction client, cette position ne durera pas.
