CITET : Relancer l’écolabel tunisien

La GIZ, à travers sa présence en Tunisie, a entamé en 2016 un programme de coopération triangulaire «Développent du tourisme durable» entre l’Allemagne, le Costa Rica et la Tunisie. Ce programme s’inscrit dans le cadre du projet «Fonds pour la promotion de l’emploi des jeunes en Tunisie» et le projet «Fonds régional en Amérique Latine et dans les Caraïbes».

Le CITET œuvre pour le renforcement des capacités de la Tunisie et des pays arabo-africains et méditerranéens dans le domaine de la protection de l’environnement et de la gestion durable des ressources naturelles.

Imen Ben Souayeh y gère le projet Ecolabel tunisien, elle vient de participer à un voyage d’études sur le tourisme durable en Allemagne, l’occasion pour Webmangercenter de faire le point sur le label tunisien et évoquer les urgences à sa relance. Entretien par Amel Djait 

Webmanagercenter : Après un voyage d’études au cœur du tourisme durable en Allemagne, quels enseignements tirez-vous? En quoi le modèle allemand est-il si performant?  

Imen Ben Souayeh: L’approche intégrée de la durabilité des destinations touristiques, «l’impressionnante» synergie et la conciliation harmonisée et équilibrée entre le secteur public et le privé. C’est cela qui constitue l’outil par excellence de la mise en œuvre de cette politique de durabilité.

Que cela soit dans les villes «green city», les parcs et réserves naturelles, les animations de sites archéologiques pour faire revivre l’histoire ou les diverses formules d’hébergements, tout est au service des mêmes objectifs: qualité, durabilité, respect de la nature et de l’environnement…

La question de la durabilité est inculquée dès le premier âge. Elle est ainsi devenue un comportement naturel. 

Et en termes d’avancées techniques?

Vous savez, le progrès technique dans le domaine de l’environnement en Tunisie ne nous manque pas. Le plus important, c’est le changement des comportements et la responsabilisation de l’Etat en tant qu’acteur «exemplaire».

C’est lui qui devrait piloter ce processus de changement et collaborer avec le secteur privé en toute harmonie et non en concurrence. C’est là tout l’enjeu clé de la transition écologique durable.

Le modèle de durabilité en Allemagne s’appuie aussi sur une labellisation multiple. Qu’en pensez-vous? Une profusion de labels est-elle toujours positive et lisible?

La labellisation multiple donne plus la liberté aux demandeurs de choisir le label le plus adapté à leurs besoins et à leurs performances (Écolabels de type I, type II ou type III). Vous savez, en la matière c’est vite fait. Le classement se fait selon leur degré de crédibilité. Il est aisé de voir s’ils sont de simples auto-déclarations ou des labels fiables reposant sur des critères vérifiables et contrôlables.

Pour éviter de tomber dans le phénomène du «green washing»(*), il est préférable de se lancer dans une démarche crédible, reconnue et vérifiable.

Le CITET à développé un label national qui n’a jamais réussi à s’imposer. Boudé par les professionnels, celui-ci est toujours au statut quo. Avez-vous des projets le concernant?  

Un petit flash back sur ce projet est nécessaire pour comprendre l’état actuel de ce label. Le CITET a développé le système d’attribution de l’Ecolabel tunisien, un système de certification facultatif aux termes duquel est délivré l’Ecolabel après vérification de la conformité de l’hôtel ou l’hébergement touristique à un ensemble de critères techniques et écologiques (Décret n°2007-1355 du 4 juin 2007, portant création et fixant les conditions et modalités d’attribution de «l’Ecolabel tunisien»).

C’est un Ecolabel de type I /typologie selon l’ISO 14024. Le type I est similaire à l’écolabel européen et beaucoup d’autres écolabels dans le monde.

Ce label est crédible du point de vue de l’élaboration du référentiel de certification lui-même (les critères), et du point de vue des procédures d’octroi de la certification engageant la partie tierce, INNORPI.

Ce label a engagé le cadre institutionnel et juridique avec plus de 6 textes en la matière, un organisme de gestion (INNORPI), un organisme technique et scientifique (CITET), et un comité consultatif (ministère de l’Environnement. 

Pour un résultat assez pâle, sommes toutes?

Tout a commencé par un programme pilote en 2010. Sur 5 hôtels, 4 ont été certifiés. Avec la révolution, les priorités du secteur touristique tunisien ont changé. A ce jour, la reprise est très lente. Actuellement, 4 autres hôtels sont en cours de certification.

Nous travaillons à l’élaboration d’une étude stratégique quinquennale du programme de l’Ecolabel tunisien (une sorte de revue critique de tout le programme et d’un plan d’action et de marketing 2015-2016).

Nous sommes en phase de mise en œuvre de ces plans. Nous souhaitons faire adhérer le plus d’acteurs possibles et surtout partager le plan de communication et de marketing, car c’est aussi à ce niveau que nous devrons agir en priorité.

Pour finir, nous sommes en train de lancer une révision des critères pour intégrer plus de critères sociaux afin de boucler la chaîne de la durabilité.

Que manque-t-il à ce label pour se nationaliser et éventuellement s’internationaliser? 

Nous avons tout un plan de communication et de marketing qui attend d’être mis en œuvre. Ce ne sont pas les idées qui manquent. Une bonne gouvernance du processus est en train d’être mise en place avec une approche participative de tous les acteurs impliqués, publics et privés.

Sur le plan international, nous devrions commencer par deux actions prioritaires: la possibilité de reconnaissance mutuelle avec d’autres écolabels existants (le «green sign» ou «greenline» pour drainer un peu plus la clientèle allemande. D’autre part, nous sommes en train d’étudier l’adhésion au «Global Ecolabelling Network» (GEN), une association qui regroupe tous les organismes chargés des écolabels de Type I dans le monde. Cette adhésion permet aux membres d’obtenir une reconnaissance internationale de leurs écolabels.

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*Greenwashing  ou l’écoblanchiment, ou verdissage (en anglais,greenwashing), est une expression désignant un procédé de marketing ou de relations publiques   utilisé par une organisation (entreprise, administration publique nationale ou territoriale, etc.) dans le but de se donner une image écologique responsable. La plupart du temps, l’argent est davantage investi en publicité que pour de réelles actions en faveur de l’environnement (wikipédia).