Des entreprises tunisiennes au salon BATIVOIRE à Abidjan : L’approche individuelle chez les opérateurs tunisiens ne marche pas en Afrique ( Ghazzi Sabbagh)

Avec une usine à Zaghouan, 80 employés pour un chiffre d’affaires de 10 millions de dinars et une politique commerciale dynamique, VALPAINT déploie sa voilure sur l’Afrique de l’Ouest. L’entreprise vient de participer au Salon BATIVOIRE à Abidjan.

Entretien avec Ghazzi Sabbagh, directeur général de VALPAINT Tunisie, pour comprendre la démarche.

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WMC: Avez-vous ouvert à Abidjan ou pas encore? 

Ghazzi Sabbagh : Nous sommes dans la capitale ivoirienne depuis avril 2014. En fait, nous avons participé à un Salon en 2013 durant lequel nous avons rencontré beaucoup de professionnels. Au vu du besoin de ce marché vierge en peinture décorative, nous avons estimé que le pays est une grande voie ouverte pour l’entreprise avec sa large gamme de 22 produits.

Et si vous nous présentiez Valpaint…

Valpaint est une marque italienne qui a ouvert en Italie en 1988 et qui a installé une usine de production à Zaghouan en 2000. Nous avons commencé à travailler il y a 12 ans sur le marché tunisien et sommes le N°1 en peinture décorative. Aujourd’hui, la marque est présente en Algérie et en Libye et nous avons ouvert une filière au Maroc. L’année dernière, nous nous sommes installés à Abidjan et cette année nous sommes allés à Dubaï.

Comment se décide la conquête d’un nouveau marché? Pourquoi l’Afrique? Pourquoi la Côte d’Ivoire?

Déjà, retenez que nous sommes en Afrique du Nord, donc ce n’est que la continuité des choses! Nous sommes allés en Mauritanie puis nous avons mis le cap sur Dakar en 2012 et Abidjan en 2013. Nous avons vu les opérateurs, les professionnels, les besoins, le marché et avons décidé d’ouvrir à Abidjan.

Pourquoi Abidjan? C’est une question de feeling. Les gens aiment la vie, la beauté, les couleurs… C’est une plateforme idéale pour attaquer l’Afrique de l’Ouest.

Allez-vous y ouvrir une usine?

Non, ouvrir une usine n’est pas une chose simple. Nous sommes en train d’attaquer le volet commercial et de créer le besoin. Ensuite, dans 3 à 5 ans, nous verrons les volumes, les chiffres… En ouvrant Abidjan, nous ne ciblons pas seulement la Côte d’Ivoire, nous visons le Mali, le Ghana, le Burkina…

En Tunisie, vous êtes assez visible et misez beaucoup sur la publicité. En Afrique quelle est votre stratégie?

Le porte-à-porte. Il faut écouter les professionnels, les architectes, etc. Nous avons une force commerciale composée de 5 profils ivoiriens qui bougent sans cesse. Nous avons beaucoup hésité entre des profils ivoiriens et/ou tunisiens, et avons opté pour des jeunes ivoiriens.

Pourquoi?

Les Tunisiens n’ont pas la culture de l’expatriation. Ils ont des difficultés pour s’adapter. Par exemple, en ce moment même, je trouve des difficultés immenses pour trouver des gens qui veulent travailler en Ethiopie.

J‘imagine que ce ne sont pas les seuls obstacles que vous rencontrez. Sans soutien bancaire, sans diplomatie économique efficace, sans soutien politique n’est-ce pas encore plus difficile d’avancer?

Tant que nous n’avons pas d’appui politique de premier rang, nous ne pourrons aller ni plus vite ni plus loin. Regardez la notoriété de Mohamed VI en Côte d’Ivoire! Il est omniprésent et on parle de lui autant dans les marchés que dans les milieux des affaires. La dernière fois qu’il est venu ici, il s’est déplacé avec plus de 600 hommes d’affaires pour signer des contrats.

Aujourd’hui, je regarde notre action (celle de BATIVOIRE), outre que c’est déjà très bien qu’elle existe et m’interroge: Que sommes-nous en train de faire? Quelle est notre politique? Quelles sont nos ambitions pour l’Afrique? Quelles peuvent être nos ambitions en fonction des moyens dont nous disposons? Où est le soutien de l’Etat aux opérateurs? Quel est l’objectif du CEPEX?

Même pour récupérer les subventions, c’est la galère! Nous sommes en septembre 2015 et les dossiers d’aide à l’export d’il y a plus de deux ans ne sont pas encore traités. Au niveau de la Banque centrale, les obstacles sont énormes. Comment voulez-vous que l’on exporte quand n’importe quelle transaction devient titanesque, traîne en longueur…

Quel bilan faites-vous justement de cet évènement?

Pourquoi y a-t-il eu seulement un secrétaire d’Etat à l’inauguration du Salon? Pourquoi n’y a-t-il pas eu 3 ou 5 ministres avec à leur tête le chef du gouvernement tunisien? Nous avons perdu sur l’Afrique les 50 dernières années et je me demande si nous allons réussir à inverser les choses en continuant à être aussi passifs! Il y a une forme d’approche individuelle chez les opérateurs tunisiens qui ne marche pas dans ce genre de pays. Nous devons apprendre à avancer en groupe. Pourquoi ne faisons-nous pas de la Côte d’ivoire un modèle de réussite que nous modéliserons au reste des pays africains par la suite?

Pour finir?

Je dis à nos gouvernants : écoutez-nous! Soutenez-nous!