Grande-Bretagne : un Parlement sans majorité entraînerait “une grande incertitude” pour les marchés, selon Luke Newman, de Henderson

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est de Londres, le 14 novembre 2014 (Photo : Andrew Cowie)

[05/05/2015 07:56:43] Londres (AFP) A quelques jours des élections législatives britanniques, les investisseurs tentent d’anticiper au mieux tous les scénarios, en particulier un Parlement sans majorité claire qui entraînerait “une grande incertitude” nuisible aux marchés, explique Luke Newman, de la société de gestion Henderson Global Investors.

Selon le co-gérant du fonds Henderson Gartmore United Kingdom Absolute Return, qui investit à la fois sur la hausse et la baisse des actions, les marchés semblent préférer une victoire conservatrice. Mais cette hypothèse amènerait aussi son lot de complications en remettant sur le devant de la scène la question de l’appartenance à l’Union européenne.

Question: Les événements politiques ont-ils impact sur les marchés britanniques ?

Réponse: “L’Histoire nous a montré que les changements politiques avaient un réel impact sur les marchés, ce qui est logique car les changements qu’ils induisent dans les décisions d’investissements ou au niveau fiscal peuvent affecter l’appétit des investisseurs.

Le référendum écossais l’an dernier fournit un bon exemple. Celui-ci n’a, in fine, pas changé la structure du Royaume-Uni, mais a généré bon nombre d’incertitudes.

L’impact a mis plus de temps à se faire sentir en Grande-Bretagne. Quand les investisseurs ont commencé à craindre qu’une indépendance de l?Écosse fasse progresser le sentiment autonomiste chez les électeurs en Angleterre et renforce le scénario d’une sortie de l’Union européenne, l’effet a été visible, surtout sur le marché des changes et depuis la livre sterling est restée sous pression.”

Q: Comment, en tant qu’investisseur, traduisez-vous dans vos portefeuilles les enjeux à l??uvre ?

R: “Je vois cette élection de deux façons: en tant que citoyen, je suis inquiet, mais en tant que gérant d’un fonds, je suis très stimulé. Du fait de l’éclatement actuel des partis politiques, le risque est de finir avec un gouvernement fragile, voire avec un gouvernement qui ne pourrait pas vraiment travailler.

Nous préparons cette échéance en nous focalisant sur les entreprises ou secteurs qui pourraient sortir gagnants ou perdants. Toute opinion politique mise à part, nous pouvons dire que les marchés sont inquiets de l’installation d’un parti travailliste qui a considérablement bougé vers la gauche sous la direction d’Ed Miliband.

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à Stockton-on-Tees le 27 avril 2015 (Photo : Oli Scarff)

Du coup il devient plutôt facile de voir comment gagner de l’argent en tablant sur une baisse (de certaines valeurs) si les travaillistes forment le prochain gouvernement. Il y aurait sans doute une régulation plus stricte de l’énergie et des frais de transports, une limitation aux possibilités pour l’administration d’externaliser des contrats, des restrictions légales sur le secteur des jeux et des paris. La construction de logement pourrait, elle, prospérer sous un gouvernement travailliste qui a été très clair sur le manque de logements abordables.”

Q: Les marchés préféreraient donc une victoire conservatrice ? Et quid d’un Parlement sans majorité claire, comme le prévoient les sondeurs ?

R: “Un Parlement sans majorité claire représente potentiellement la pire situation car cela impliquerait une grande incertitude pour la monnaie, la dette et les actions. Pour nous la flexibilité serait alors la clé, dans un environnement de chute des marchés. Il faudrait aller vite et opérer beaucoup plus du côté des baisses que des hausses.

Comme le parti de centre-droit de David Cameron est traditionnellement favorable au monde de l’entreprise, il y aurait sans doute une réaction positive des marchés à une victoire conservatrice. Il y a toutefois une complication en vue puisque David Cameron a été forcé de proposer un référendum sur l’appartenance à l’Union européenne avant 2017. Cela peut créer pas mal d’incertitudes défavorables aux investissements, car pourquoi investir si vous n’avez pas la garantie que le pays fera partie d’un bloc d’échange européen ?

Selon les derniers sondages, si le référendum avait lieu aujourd’hui les Britanniques choisiraient de rester dans l’Union. Mais si le résultat était inverse, il faudrait s’attendre à des conséquences négatives pour l’économie britannique.”

Propos recueillis par Angélina BOULESTEIX