En Suède, les enfants se préparent à l’hôpital sur Internet

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à Stockholm (Photo : Jonathan Nackstrand)

[12/02/2015 11:57:12] Stockholm (AFP) Quand Felicia Zander, 10 ans, retourne à l’hôpital, c’est toujours avec une certaine appréhension. Après une hémorragie cérébrale, elle y a multiplié les séjours pendant plus d’un an, subissant une douzaine d’anesthésies générales.

Avant chaque radiographie, IRM ou opération, la fillette consultait fébrilement Narkoswebben (“le web de l’anesthésie”) un site internet interactif qui expliquait, à l’aide de films et de personnages animés, tout ce qui allait se passer, jusqu’à la crème glacée qu’on lui donnerait en salle de réveil.

Quand il a été créé, en 2006, Narkoswebben était le seul site à proposer ce type d’informations. Il reste sans équivalent et est consulté par près de 15.000 internautes par mois, principalement en Suède et dans les pays nordiques, mais aussi dans le reste du monde grâce à des traductions.

Au Canada, un médecin a créé une application similaire. Et “aux Pays-Bas, ils voudraient traduire le site” de A à Z, comme cela s’est fait pour l’anglais, l’espagnol et l’arabe, explique Gunilla Lööf, sa créatrice, une infirmière dynamique de l’hôpital pour enfants Astrid-Lindgren de Stockholm.

Le site rassemble toutes les informations relatives à l?hôpital pouvant être utiles aux moins de 18 ans. Il les présente de manière ludique à travers des films, des dessins animés et des jeux, en 27 langues.

Les enfants peuvent suivre l’expérience de Ville, petit marcassin qui s’est cogné la tête contre une pierre et passe un scanner cérébral. Le dessin animé raconte en mots simples la procédure qu’il doit subir, allongé sur un lit qui “avance vers un grand trou où on prend des photos de l’intérieur du corps”.

Felicia s’est passionnée pour les “aventures à l’hôpital” de Pajette, un clown qui va être opéré de l’appendicite. Dans le film qui lui est consacré, elle a pu découvrir toute la procédure de l’anesthésie.

Les informations qu’elle a trouvées lui ont paru tellement intéressantes qu'”avant une intervention, Felicia a même vérifié que l’infirmière avait bien consulté le site et savait ce qu’elle devait faire”, s’amuse encore sa mère, Maria Zander.

– ‘C’est pas dangereux’ –

Parcourir le site “me calmait, un peu comme si je pouvais maîtriser la situation”, reconnaît Felicia. “Avoir une anesthésie, ça fait peur, mais ce n’est pas dangereux”, affirme-t-elle.

Le personnel de l’hôpital n’a pas toujours le temps de bien expliquer et rassurer les enfants. “Je rencontrais trop souvent des parents et des enfants angoissés sans avoir le temps de les rassurer”, se souvient Gunilla Lööf.

“Il y a énormément d’informations à donner autour d’un séjour en milieu hospitalier. Mon objectif était de les rassembler et de les présenter autrement qu’en les débitant rapidement avant une intervention”, poursuit-elle. “Et pour toucher les jeunes, il faut aller là où ils sont: sur Internet”.

Selon des statistiques officielles, tous les Suédois entre 13 et 21 ans consultent Internet régulièrement. Près de la moitié des enfants suédois ont accès à une tablette, et 95% des plus de onze ans possèdent leur propre téléphone portable.

Zule Sicardi, anesthésiste dans une clinique du centre de Stockholm, a constaté les bienfaits du site sur ses jeunes patients.

“Le site est très, très utile: les enfants qui l’utilisent sont plus confiants, la situation leur est familière”, remarque-t-elle. “Ils y trouvent tout type d’informations sur le corps humain. Ça leur permet d’en parler autour d’eux”.

Felicia a montré Narkoswebben à ses cousins et à des proches. “Ça leur a permis de comprendre ce qu’elle vivait”, assure sa mère.

La section “13+”, pour les ados, offre un blog et un forum.

Seul problème, le site est conçu pour un ordinateur alors que les jeunes de la génération Z sont aujourd’hui sur tablette et smartphone.

“C’est un outil qui fonctionne bien, il est unique au monde”, reconnaît Per-Arne Lönnqvist, professeur en anesthésie pédiatrique, à l’hôpital Astrid-Lindgren.

“Mais il faudrait que le site soit utilisable sur des téléphones et des tablettes, sinon il risque de ne plus pouvoir toucher autant de monde”, prévient M. Lönnqvist, qui a été abordé par des collègues tchèques intéressés pour l’adapter à leur langue.