Tunisie – Des associations comme outils de propagande politique : Ennahdha, un cas d’école

ennahdha-rached-2013.jpgLes associations tunisiennes de Belgique sont à 90% sous le contrôle direct du parti islamique tunisien, Ennahdha. En témoigne Me H.H, avocat tunisien résident en Belgique qui affirme: «Pratiquement 90% des associations tunisiennes ici sont d’appartenance nahdhaoui. Après la révolution, il y a eu création d’une quarantaine d’associations tunisiennes prétendument démocratiques. Aucune d’elle n’a condamné l’assassinat du leader politique Chokri Belaïd dans les médias belges».

Et H.H de s’étonner: «Dimanche 3 février 2013 au soir, au journal télévisé de 20 heures sur la chaîne nationale Al Wataniya, un reportage a été diffusé informant le public qu’une délégation de l’ANC s’est déplacée à Bruxelles pour débattre avec la communauté tunisienne en Belgique des textes de la future Constitution. Personne d’entre nous n’a été informé de cette visite et aucune affiche n’a été collée ni au consulat ni à l’ambassade ni par les canaux habituels de diffusion de l’information. L’ambassade est en face de là où je réside et je défie quiconque de démentir cette information».

Après vérification de la communauté tunisienne à Bruxelles, il s’est avéré que deux représentants du seul parti Ennahdha sont venus à Bruxelles invités par une association appelée «Entraide belgo-tunisienne, ASBL EBT» pour débattre au nom de la communauté tunisienne en Belgique et en son absence des textes de la Constitution. «Ce sont donc des militants du parti au pouvoir aujourd’hui qui discutent de notre future Constitution en notre nom. Pour nous, c’est une escroquerie, car demain ils voteront en notre nom à ce train là».

Me H.H semble avoir dit vrai, car l’un des moyens les plus importants d’implantation du parti islamiste en Tunisie ou dans les pays européens où vit une importante communauté tunisienne est bien sûr le tissu associatif.

En Tunisie, 260 associations islamistes ont vu le jour après le 14 janvier, et parmi elles 24 associations salafistes scientifiques qui diffusent la pensée salafiste à travers des cours organisés dans des cités populaires ou des conférences publiques auxquelles elles invitent des prêcheurs aussi bien tunisiens que saoudiens, égyptiens, marocains ou mauritaniens.

Les associations d’appartenance islamiste ont aussi investi le terrain social et opèrent également dans l’économique où elles assurent la mission de défendre la finance islamique sous toutes ses formes et d’instaurer une culture économique à l’instar de celle existante en Arabie Saoudite et dans d’autres pays du Golfe arabe. A tire d’exemple, nous pouvons citer l’Association TAIF présidée par une experte de la Chariaâ, qui a récemment promis la mise en place imminente d’un projet de loi organisant l’assurance “Takaful” dans le but de créer un système cohérent pour la promotion des mécanismes de la finance islamique en Tunisie.

Les associations seraient, d’après une étude réalisée sur le salafisme en Tunisie, très actives dans les zones pauvres du Grand Tunis, Sousse, Sfax et Bizerte où elles se substituent aux services sociaux en offrant des aides lors des fêtes religieuses, de la rentrée scolaire ou dans le cas de catastrophes naturelles, telle la grande vague de froid dans le nord-ouest. Leurs activistes dispensent également des leçons d’éducation religieuse aux jeunes et aux moins jeunes dans des écoles coraniques. Une grande partie de ces associations opère dans le cadre du «Front tunisien des associations islamistes».

Parmi les associations assez actives en Tunisie, 10 au moins sont en relation directe avec des personnalités et des organisations saoudiennes qui les financent et les soutiennent; il y en a également qui sont soutenues par le Qatar et des organisations islamistes internationales. Les moyens financiers colossaux mis à leur disposition leur permettent d’être aussi puissantes et présentes dans tous les coins et recoins de la Tunisie.

Le but des associations islamistes et particulièrement salafistes est de parvenir à terme à forger des courants de pensées conservateurs qui puissent influencer les programmes d’éducation, l’enseignement et les lois. C’est en somme le retour en arrière de la Tunisie et une revanche des Wahhabites sur un pays qui leur a toujours échappé par sa dimension méditerranéenne, progressiste, tolérante et ouverte.

Un haut cadre d’Ennahdha avait assuré, il y a quelques mois, «la diaspora tunisienne en Europe et aux Amériques nous est acquise, nous sommes trop présents et nous travaillons beaucoup sur la proximité». Il a bien raison, ce sont les maîtres des plus grands instruments d’encadrement et d’endoctrinement des masses: les associations.