EXCLUSIF AFP – Pour le PDG de Titan, il faut “dérouler le tapis rouge” aux investisseurs

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Amiens, le 30 avril 2008 (Photo : Denis Charlet)

[20/02/2013 18:26:07] NEW YORK (AFP) Le patron américain de Titan International, Maurice Taylor, revient auprès de l’AFP sur sa lettre au ministre français Arnaud Montebourg, affirmant qu’au lieu de négocier, le gouvernement devrait “dérouler le tapis rouge à tous ceux qui veulent mettre de l’argent dans des entreprises en France”.

Maurice Taylor a confirmé mercredi avoir écrit au ministre français du redressement productif, qui “n’arrêtait pas de m’envoyer des lettres”. “Ses lettres étaient très cordiales et tout, mais les politiciens font partie du problème, ils n’ont aucune idée de rien”.

“Je n’écris pas de lettres toutes roses”, la lettre à Arnaud Montebourg n’est pas “une lettre à une petite amie, on parle d’affaires”, insiste M. Taylor, dont la missive a provoqué de vives réactions en France.

Dans ses missives, le ministre français demandait au patron du groupe américain de “relancer les négociations”, raconte M. Taylor en prenant l’accent français. “Je lui ai dit +vous êtes dingue+”, ajoute-t-il. Il n’y a pas de négociations possibles puisque “nous sommes les seuls au monde à avoir voulu mettre de l’argent dans l’usine”.

“Nous sommes ceux qui avons le carnet de chèques et vous nous dites que nous devons d’abord rencontrer les syndicats? Vous êtes dingue”, insiste-t-il.

“Les ouvriers français travaillent bien mais le problème”, c’est que “la journée d’un ouvrier français fait sept heures payées mais les ouvriers prennent une heure pour déjeuner et faire des pauses, ils travaillent trois heures, et les trois autres heures ils s’assoient ou se promènent et discutent”.

“Quand j’ai dit ça au président du syndicat, il m’a dit, c’est comme ça en France. Je lui ai dit que les ouvriers (de l’usine Goodyear d’Amiens) étaient parmi les plus payés de France, ils ont de très bons salaires et de superbes prestations sociales”, a-t-il poursuivi sans être en mesure de donner le montant du salaire horaire en question.

Les ouvriers français, “on ne peut pas les suspendre, on ne peut pas les licencier”, déplore-t-il.

“Non seulement vous êtes parmi les plus chers, mais votre gouvernement autorise les Indiens et les Chinois à vendre leurs pneus en France”, alors qu’ils sont “subventionnés par leurs gouvernements” et que leur coûts de production sont moins élevés. A l’inverse, affirme-t-il, “les Français n’ont pas le droit de vendre leurs pneus en Chine”.

“Les fermiers français veulent un bon rapport qualité-prix pour leurs pneus” agricoles, spécialité de Titan International, et du coup “ils achètent ces pneus” chinois ou indiens.

Goodyear a annoncé fin janvier que l’usine d’Amiens Nord allait fermer, menaçant 1.173 postes. Des négociations entre le groupe et Titan International, un groupe établi dans l’Illinois, au nord des Etats-Unis, avaient échoué à l’automne dernier après plusieurs années de discussions.

Arnaud Montebourg “me dit +on ne sait pas si on veut que vous veniez produire en France, vous devez d’abord parler aux syndicats+, je lui dit +mais qu’est-ce que c’est stupide!+”, raconte-t-il. “Il faudrait dérouler le tapis rouge à toutes les entreprises qui veulent investir de l’argent en France. Et maintenant” les ouvriers d’Amiens “vont tous perdre leur emploi, et ils ne seront jamais payés autant qu’ils le voudraient”.

“Bientôt, même Michelin ne produira plus de pneus en France parce que c’est trop cher. Aux Etats-Unis aussi c’est difficile, mais la différence c’est que les ouvriers américains travaillent huit heures, ils ont une heure de pause, on peut compter sur six heures et demi de travail effectif”.

“Je reviens d’Australie, j’y ai rencontré de jeunes Français et Espagnols qui y ont déménagé parce qu’il pouvaient y trouver du travail. C’est pour ça qu’en France, bientôt, tout le monde sera assis dans des cafés à boire du vin rouge mais on ne gagnera plus d’argent”, conclut M. Taylor.