ère allemand des Finances à Berlin (Photo : Odd Andersen) |
[06/02/2013 13:13:20] BERLIN (AFP) Le gouvernement allemand a adopté mercredi un projet de loi sur la séparation des activités bancaires, imitant ainsi la France, une mesure critiquée par les instituts de crédit qui s’estiment victimes de la campagne électorale.
Le projet de loi prévoit la séparation des activités de banque de dépôt de celles réalisées par les banques pour leur propre compte quand ces dernières, considérées comme risquées, dépassent 20% du total du bilan ou équivalent à plus de 100 milliards d’euros.
“Entre 10 et 12 banques” sont concernées, a déclaré le ministre des Finances Wolfgang Schäuble lors d’un point presse à Berlin.
Toutefois, cela devrait surtout affecter la première banque du pays, Deutsche Bank, de par l’importance de sa division de banque d’investissement, et dans une moindre mesure Commerzbank et la banque publique régionale LBBW, a estimé Horst Löchel, professeur d’économie à la Frankfurt School of Finance, interrogé par l’AFP.
La loi doit entrer en vigueur en janvier 2014 mais les banques auront jusqu’à juillet 2015 pour procéder à la séparation effective de leurs activités de marché à risque.
“Nous avons aujourd’hui ouvert la voie à un important paquet législatif. Nous prenons à bras le corps les problèmes d’instabilité du système financier et du manque de responsabilité des banques et des banquiers”, a aussi affirmé M. Schäuble.
Andreas Schmitz, le président de la fédération allemande des banques privées (BdB), a lui vivement critiqué le projet de loi, qui est selon lui “hâtif” et qui fait “fausse route”.
“Le projet de loi affaiblit sur de nombreux points la place financière allemande et le modèle allemand de banque universelle qui a fait ses preuves”, a-t-il jugé dans un communiqué.
Le projet de loi est “surtout dû à la campagne électorale qui arrive”, a-t-il encore estimé, alors que des élections législatives sont prévues le 22 septembre en Allemagne.
La chancelière Angela Merkel, qui vise un troisième mandat, sera notamment opposée au social-démocrate (SPD) Peer Steinbrück, qui n’est autre que son ex-ministre des Finances durant la grande coalition des années 2005-2009 et un ardent partisan d’un durcissement de la réglementation financière.
äuble en conférence de presse au ministère à Berlin, le 6 février 2013 (Photo : Odd Andersen) |
“Ce qui a été décidé va sûrement être bien accueilli par l’opinion publique” a estimé le professeur Horst Löchel. Car les banques, en Allemagne comme ailleurs en Europe, sont très impopulaires depuis la crise financière de 2007-2009 où nombre d’entre elles n’ont dû leur salut qu’à des aides publiques.
Cependant la séparation des activités de dépôt de celles de marché “ne va pas s’attaquer au coeur du problème” de la gestion du risque et du crédit, sur lequel portent déjà les nouvelles exigences réglementaires internationales dites de Bâle III, selon M. Löchel.
La séparation des activités bancaires pour réduire encore davantage les risques dans le secteur a été proposée en Europe par le gouverneur de la Banque de Finlande Erkki Liikanen, qui a remis un rapport en ce sens à la Commission européenne en octobre.
La France et l’Allemagne entendent jouer un rôle pionnier en la matière, tandis que la Grande-Bretagne a menacé les banques lundi d’une telle séparation sous la pression du Parlement et de l’opinion publique.
M. Schäuble s’est dit mercredi “convaincu” que l’initiative franco-allemande sur la séparation des activités bancaires allait “faire avancer les efforts pour appliquer le rapport Liikanen au niveau européen”, alors que les banques allemandes préconisaient d’attendre une solution européenne commune.
Parmi les autres mesures du projet de loi allemand figure l’obligation pour les grandes banques de remettre au régulateur national, le BaFin, leurs “testaments”, c’est-à-dire des plans détaillant la façon dont elles souhaiteraient être réorganisées ou démantelées en cas de menace de faillite.
La loi prévoit aussi de renforcer la responsabilité pénale des dirigeants de banques ou des groupes d’assurances qui auraient pris délibérément des risques inconsidérés ayant entraîné des pertes. Ils risqueront désormais jusqu’à cinq ans de prison et des amendes.