Grèce : que faire de la dette?

photo_1351843922355-1-1.jpg
érité, le 3 octobre 2012 à Athènes (Photo : Aris Messinis)

[02/11/2012 08:18:03] ATHENES (AFP) A deux reprises récemment le gouvernement grec a été désavoué par ses créanciers sur la conclusion d’un accord permettant l’assainissement budgétaire du pays. Pourtant tout porte à croire que l’accord existe sans être annoncé. Le problème est ailleurs: la dette.

Quatre ans après le début de la crise financière internationale démarrée en 2008 aux Etats-Unis, la Grèce se retrouve dans une situation d’endettement bien pire qu’au démarrage du plan de sauvetage international hors norme lancé en mai 2010 pour éviter la faillite et un éclatement de la zone euro.

La Grèce ayant bénéficié de deux lignes de crédit de quelque 240 milliards d’euros au total de la part de l’UE et du FMI, a vu mécaniquement sa dette croître.

Et ce d’autant que les fondamentaux économiques du pays s’effondrent et que le programme de privatisations, censé aider le pays à la résorber, a pris un énorme retard.

Le cas grec va être un important sujet de discussion à la réunion des ministres des Finances et des gouverneurs des banques centrales du G20 dimanche et lundi à Mexico, a-t-on indiqué jeudi de source allemande.

A 129% du PIB en 2009, la dette va finir l’année 2012 autour de 170% du PIB, lequel chute, le pays ayant plongé dans une récession qui prend des airs de grande dépression (-7%), avec les indicateurs du chômage et de la production industrielle au rouge foncé.

Les prévisions à long terme de la dette grecque sont soit négatives, soit alarmantes et rendent d’ores et déjà inatteignable l’objectif –pourtant pas si modeste que ça– d’une dette à 120% du PIB en 2020, fixé par les bailleurs de fonds l’hiver dernier lors de la signature du deuxième accord de prêt.

Dans son dernier rapport publié début octobre, le FMI estime que la dette grecque s’élevera à 170,7% du PIB en 2012, qu’elle culminera à 181,8% en 2013, puis redescendra graduellement jusqu’à 152,8% du PIB en 2017. Un chiffre jugé déjà beaucoup trop haut par le Fonds.

photo_1351843837686-1-1.jpg
érité, le 30 octobre 2012 à Athènes (Photo : Louisa Gouliamaki)

En tout état de cause, comme le dit l’économiste français Elie Cohen (CNRS), de passage à Athènes cette semaine pour parler de la crise de gouvernance au sein de la zone euro, “personne n’imagine que la Grèce puisse rembourser une dette de 170% du PIB”.

“Chacun sait que la charge de la dette va retomber sur un certain nombre de pays européens et que le secteur public (les prêteurs institutionnels) va devoir payer”, a-t-il dit devant un amphithéâtre comble.

“Il y aura une restructuration de la dette”, a-t-il ajouté, en estimant que les Allemands “souhaitent que cela se passe le plus tard possible”, de préférence après leurs élections prévues fin 2013.

Le gouvernement grec a publié mercredi des prévisions encore plus noires qui ont fait l’effet d’une bombe, en marge de la présentation du budget 2013 au parlement.

Selon le projet de loi, intitulé “cadre de stratégie des finances publiques à moyen terme (2013-2016), “la progression de la dette sera fulgurante sans des interventions (adéquates) pesant sur la soutenabilité de la dette” et gonflant au fil de l’eau jusqu’à 220,4% du PIB en 2016, après 175,6% prévu en 2012 et 186,5% en 2013.

En chiffres absolus aussi, tout explose: de 329,5 milliards d’euros en 2010, elle culminera à 411,9 milliards en 2016, des chiffres qui montrent au passage que la restructuration de dette détenue par les créanciers privés (PSI), qui a eu lieu en mars, a essentiellement servi à contenir l’envolée de la dette plus qu’à la réduire.

Alors que les gouvernements de la zone euro affirment pour l’instant à l’unisson qu’il n’est pas question de restructurer la dette grecque, ce qui ferait perdre leur mise aux contribuables européens et accentueraient les tensions, les économistes envisagent tous les scénarios.

“Il y a des tas de manière de concevoir une opération de ce type” pour permettre à la Grèce de rester dans la zone euro, dit Elie Cohen. “C’est du bricolage, on peut abaisser les taux d’intérêt, rallonger les maturités” sans effacement.

photo_1351844076210-1-1.jpg
à Athènes après une réunion avec les créanciers de la Grèce, UE-FMI-BCE (Photo : Louisa Gouliamaki)

Une réduction des taux permettrait de tomber à 125% du PIB, mais pas avant 2022, selon un calcul de Platon Monokroussos, chef économiste d’Eurobank. Autre hypothèse, un rachat de 30 milliards de dette par la Grèce, mais il ne permettrait un passage sous la barre des 120% du PIB qu’en 2022 également.

Outre lors de la réunion du G20 à Mexico, la question grecque sera également au centre des discussions lors de la réunion des ministres des Finances de la zone euro le 12 novembre, cruciale pour Athènes qui attend le déblocage d’une tranche vitale du prêt UE-FMI, retardée depuis des mois.

En attendant, Alexis Tsipras, dirigeant de la gauche radicale grecque, le principal parti de l’opposition en Grèce, fait campagne pour l’organisation d’une conférence internationale en vue “d’annuler” purement et simplement une grande partie de cette dette, sur le modèle de ce que l’Allemagne a connu après la Seconde guerre mondiale”.