Tunisie – Bourse : Relancer l’actionnariat populaire à l’occasion de la cession des entreprises confisquées

marche-financier-110912.jpgA l’occasion de la mise en vente des biens confisqués, pourquoi ne pas favoriser l’actionnariat populaire? Un signal fort de démocratie économique, bien dans les attentes des petits épargnants. Et, du marché financier!

Dans un propos récent, Ridha Hanana, président de la Haute commission de lutte contre la corruption, est longuement revenu sur les perspectives de liquidation des biens mal acquis par le clan des BAT (Ben Ali-Trabelsi et consorts). On retient qu’une partie du patrimoine sera réalisée avant la fin 2012. Ce qu’a confirmé Slim Besbès, ministre des Finances par intérim, dans le gouvernement Jebali lors de son passage sur Mosaique FM mercredi 5 courant.

Six entreprises sont concernées. Il s’agit de Tunisiana, la société Ennakl, la Banque de Tunisie, Carthage Cement, City cars et enfin l’Ecole Internationale de Carthage. La cession se fera par appel d’offres. Ces entreprises sont devenues des trophées fétiches. Leur récupération a représenté le triomphe de la souveraineté populaire. Leur retour dans le portefeuille de l’Etat a été synonyme de la suprématie de la volonté populaire.

Un acte hautement démocratique serait qu’elle donne lieu à une transmission de propriété de l’Etat vers les petits épargnants, si représentatifs des couches populaires laborieuses longtemps exclues de la jouissance des fruits de la croissance. On peut en faire un vecteur de relance de l’actionnariat populaire. Outre la symbolique «Robin des Bois», qui a consisté à prendre au Tyran pour redonner au peuple, il y a une portée, plus profonde celle-là, en faveur de l’activation de la petite épargne.

Le souvenir des OPV cédées aux petits épargnants

La cession des entreprises concernées n’est pas sans rappeler la grande vague d’offres publiques de vente, ces «OPV» de bonne fortune qui ont fait les beaux jours de la Bourse de Tunis et le bonheur des petits épargnants. L’actionnariat populaire est une œuvre symbolique de justice économique. Et c’est un transfert de propriété qui a valeur de répartition des richesses publiques selon des repères démocratiques. Et ce n’est pas un indicateur pour pays en voie de développement. Aux Etats-Unis et en environnement anglo-saxon, huit citoyens sur dix ont un portefeuille de valeurs mobilières.

L’épargne financière est une épargne vivante. Acquérir des actions est une opération d’investissement qui permet au petit porteur de fructifier son épargne sur le long terme, au gré du dynamisme de l’entreprise concernée. Les augmentations de capital ultérieures, les améliorations de cours de l’action, les incorporations de réserves, sont toutes des opportunités d’amélioration du rendement du placement initial.

Trois des entreprises destinées à être cédées sont cotées en Bourse. Et pour elles, l’opération est de réalisation aisée. Pour les autres, leurs opérations d’introduction peuvent être de véritables aubaines autant pour l’Etat que pour les petits épargnants.

Quelle est la supériorité d’une telle démarche?

Les IDE donnent lieu à des transferts récurrents de dividendes: une saignée pour le pays

Céder des entreprises par voie d’appel d’offres international ouvre la voie à la participation d’investisseurs étrangers. A bien y réfléchir, les privatisations des cimenteries tunisiennes n’ont rien apporté de significatif à notre intégration économique. Voir dans les IDE un stock de capital libellé en devises est un mirage. Les IDE sont des flux. On a un premier flux entrant et une série perpétuelle de flux de transferts des dividendes, lesquels s’opèrent, eux aussi, en devises. Le bilan en devises est très nettement en faveur de l’investisseur et non du pays d’accueil, quand l’investissement ne génère pas de flux d’export conséquents.

En revanche, la cession à des petits porteurs, outre qu’elle n’occasionne pas d’expatriation de dividendes, ouvre la voie à une valorisation qui peut être très importante.

L’introduction de Tunisiana dans le cadre d’une OPV peut se révéler extrêmement juteuse pour le Trésor public. Un coefficient de valorisation de dix n’est pas à écarter. C’était le cas notamment pour la SPCD. Et les petits épargnants ont répondu présents à l’appel. On peut donc susciter une aubaine financière et démocratique, dans l’intérêt bien compris et des petits épargnants et de l’Etat.