Tunisie : Le coup de pub de Slim Riahi et de l’UPL (2/2)…Le fruit sera définitivement mûr

slim-riahi-upl-1.jpgNous avons fait connaissance dans un premier article avec la première phase du plan de communication arrêté par Slim Riahi pour sortir lui-même et son parti, l’UPL, d’un anonymat quasi général. Voici la deuxième et troisième étape de son plan.

La grande campagne d’affichage, d’annonces et de spots centrée sur l’UPL (Union Patriotique Libre) ne pouvait que susciter la curiosité de l’opinion qui a commencé à se poser nombre de questions sur l’UPL et de son principal dirigeant, Slim Riahi.

Qui est l’UPL? Qui se cache derrière ce mouvement politique? Pourquoi cette campagne? D’où vient l’argent qui a servi à la financer? Quel est le programme de l’UPL? Ces questions et bien d’autres ne pouvaient que nourrir de nombreux articles et chroniques. Et bien des discussions dans les salons et cafés.

Une période qui marque, donc, la deuxième phase de la stratégie mise en place par Slim Riahi, au cours de laquelle tout s’est dit et son contraire. Des choses vraies, mais aussi des rumeurs sur le mouvement, son secrétaire général (Slim Riahi), l’origine de l’argent dépensé, les objectifs du moment et ses intentions futures.

Une bulle médiatique

Evidement la bulle médiatique produisant les effets que l’on connaît, de nombreux contenus médiatiques ou pas ont tenté d’avoir toujours une réponse à tout. D’autant que Slim Riahi continuait à susciter l’intérêt de l’opinion par ses faits et gestes: des tribunes dans la presse, des aides aux déshérités, des prises de participation, des intentions de rentrer dans le capital des entreprises.

Cette montée fulgurante a permis aux contradicteurs d’asséner des coups que l’UPL et Slim Riahi ne pouvaient que juger bas, du genre, Slim Riahi aurait été associé à des opérations douteuses, il aurait des relations pas très catholiques avec les régimes déchus de Ben Ali et de Kadhafi, il aurait fleureté avec des services de renseignements, etc… Et ce dans un pays où avoir de l’argent et l’étaler aux yeux de tous ne signifie pas toujours être d’une moralité sans faille.

Peu importe, il est préférable d’être cité dans les médias et objet de discussion dans l’opinion que d’être un illustre inconnu. C’est le propre de la communication. Surtout si l’on veut faire de la politique! En fait, cause toujours, tu m’intéresse. Car viendra le temps de l’explication. Cela fait partie du plan de communication arrêté au départ.

La troisième et dernière étape, c’est celle qui consiste, donc, à mettre fin à tout ce bouillonnement en allant vers les médias, ces médiateurs, qui devront mettre de l’ordre dans toute cette gabegie. On privilégie, dans ce contexte, l’interview et la conférence de presse. Deux avantages à cela: une interaction faite des questions-réponses et une maîtrise de la parole: les journalistes peuvent poser les questions qu’ils souhaitent, on répondra comme l’on souhaite et l’on fera passer les messages que l’on veut.

On imposera, de ce fait, une image «voulue» qui n’a rien à voir avec cette image «subie» que Slim Riahi a traversée durant la deuxième phase de son plan.

Grands moments, à ce propos, l’interview donnée par Slim Riahi à Nessma Tv, le dimanche 28 août 2011, et la conférence de presse donnée par le mouvement, le lundi 29 août, marquée par l’absence du premier intéressé. C’est, en effet, un des dirigeants du l’UPL, Mohsen Hassan, universitaire et dirigeant d’entreprise, qui s’est prêté au jeu des questions-réponses avec la presse et non l’intéressé.

C’est l’occasion de livrer à l’opinion les réponses attendues. On s’attardera sur le parcours de Slim Riahi et de son mouvement; sa naissance à Bizerte d’un père militant pour la cause panarabe; son séjour à Sfax avant son départ pour la Libye; son séjour en Grande-Bretagne; ses affaires; ses engagements pour l’unité du monde arabe; ses promesses en matière de développement régional…

Pourquoi cette absence du premier intéressé, à ce premier rendez-vous avec les journalistes de la place, alors que la presse a couru pour trouver réponse à de nombreuses interrogations. Slim Riahi a-t-il voulu éviter de croiser le fer avec la presse? Cette absence exprimait-elle un souci de montrer que l’UPL «transcende» la personne de Slim Riahi? Pour montrer que l’essentiel est dans les idées et non dans les personnes?

Mohsen Hassan, qui semble faire office d’un porte-parole de l’UPL et qui est venu parler au nom du mouvement, n’a-t-il pas déclaré, au cours de la conférence de presse du lundi 29 août, que «Slim Riahi, ayant des engagements hors de Tunis, ne pouvait pas assister à la conférence», ajoutant que l’UPL «n’est pas représentée par une seule personne. Tous les membres du parti peuvent parler en son nom».

On ne peut que se perdre en conjectures. Cela dit, ce dernier épisode tient du «story telling». Cette approche communicationnelle, inaugurée par l’ancien Premier ministre britannique, Tony Blair, et maîtrisée par le président français Sarkozy, est une approche qui veut que la communication soit basée sur une structure narrative du discours qui s’apparente à celle des contes et des récits (voir à ce propos le livre de Salmon, Christian, Story telling, la machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits, Paris, Editions de la découverte, 240 pages). En clair: par son absence, Slim Riahi est venu raconter une histoire aux journalistes.

Quoi qu’il en soit, le suspens est entretenu. Le chef n’apparaît, comme dans les shows politiques américains, qu’au dernier moment. Il faut encore faire patienter la foule afin que l’adhésion soit la plus totale. Une sorte de délivrance qui a toujours été bien menée par les spécialistes de la propagande politique. Gageons que Slim Riahi paraîtra au moment où son agenda «communicationnel» exigera qu’il apparaisse. A ce moment là le fruit sera définitivement mûr. A la méthode de Pavlov.

Mais le marketing politique ne résoudra pas tout pour autant. Il faudra, le temps de la communication terminé, retrousser les manches et se battre sur le terrain pour gagner des partisans et… des électeurs. Car s’il est difficile d’arriver au sommet de la montagne, il est encore plus difficile de s’y maintenir.

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