Tunisie : Plus de 700 Tunisiens décorés par la France en 82 ans

legion_honneur_1.jpgLa Légion d’Honneur française a fait son entrée en Tunisie en 1928. La France l’a octroyée à 720 tunisiens avant Elyès Jouini, décoré en septembre 2010. Les deux tiers des décorés l’ont été avant l’indépendance.

Le 21 septembre 2010, Elyès Jouini a reçu des mains de Jean Azéma, directeur général de Groupama, ses insignes de Chevalier dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur, titre que lui avait conféré le président Nicolas Sarkozy. Le vice-président de l’Université Paris-Dauphine n’est pas le premier tunisien –et probablement pas le dernier- à être décoré par la France. 720 l’ont déjà été avant lui, en 82 ans.

Le premier tunisien à avoir eu cet honneur –en 1928- c’est un certain Said Ben El Houssine Abcha, fonctionnaire du Service des Affaires indigènes de Tunisie. Sur les 721 légions d’honneur décernées par la France à des Tunisiens, 526 (72%) l’ont été sous l’occupation française. Elles ont décoré la poitrine de fonctionnaires de l’administration coloniale, de soldats ayant servi dans l’armée française, de représentants du pouvoir beylical et de la garde du Bey, du monde agricole, de commerçants, industriels, de –nombreux- membres de la communauté juive tunisienne, etc.

Instituée le 19 mai 1802 par Napoléon Bonaparte, la Légion d’Honneur, la plus haute décoration honorifique française, est décernée par l’Ordre National de la Légion d’Honneur.

D’abord limité aux militaires, l’octroi de cette distinction a ensuite été étendu aux civils qui représentent près de tiers des 110.000 légionnaires.

Exceptionnel, l’accès à l’ordre à un grade supérieur à celui de chevalier peut intervenir parfois en récompense d’une carrière hors du commun –comme cela avait été fait en janvier 2009 pour Simone Veil, élevée à la dignité de Grand officier-, ou pour honorer une personnalité étrangère. Le 31 août 1989, le président Ben Ali avait fait l’objet d’une telle marque de reconnaissance et de respect –tout comme son prédécesseur, le président Habib Bourguiba, en 1972.

Parmi les Tunisiens décorés avant l’indépendance, on trouve des personnalités politiques –des Premiers ministres (Khelil Bouhajeb, Hadi Lakhoua, etc.), des ministres du Travail (Ali El Adhari, Mohamed Dinguizli), de la Justice (Ali Sakka), de l’Agriculture (Abdelkader Belkhodja, Abdelaziz Menchari), de la Plume du Bey (Ahmed Ben Rais), du Commerce (Hadi Ben Rais), de la Santé Publique (Ali Bouhajeb)-, et d’autres venant d’horizons divers: Mohamed Attia (directeur du Collège Sadiki, 1951), Belhassen Daoud (président de l’Administration des Habous), Smael Hassine (commandant du Bataillon d’infanterie de la Garde beylicale).

Pendant longtemps, une tradition voulait que les descendants de trois générations successives de décorés de la Légion d’Honneur l’obtiennent par hérédité. Est-ce alors pour cette raison que plusieurs familles (Baccouche, Belgaroui, Belkhodja, Ben khalifa, Ben Rais, Ben Romdhane, Bessis, Djellouli, kaak, Lakhoua, Mokaddem, Mzali, Sakka) ont à leur compteur trois décorations et plus?

Parmi les 195 personnalités décorées au lendemain de l’indépendance figurent des hommes d’affaires (Hédi Djilani, président de l’UTICA, Youssef Krifa, ancien détenteur de la représentation de Citroën en Tunisie, feu Faouzi Belkahia, en tant que PDG de la Banque de Tunisie, Slaheddine Bensaid, PDG de SCET) et, plus encore, du monde politique. Dont en particulier des membres de l’entourage du président de la République –comme Abdelaziz Annabi, médecin personnel du président Bourguiba, Abdelwaheb Abdallah, décoré en 1998 alors qu’il était ministre conseiller, porte-parole de la présidence, Abbas Mohsen, directeur général du protocole à la présidence en 1989-, un Premier ministre (Hamed Karoui), de nombreux ministres (Chadli Ayari, ministre de l’Economie en 1972, Slaheddine Baly, ministre de la Défense en 1984, Habib Ammar, ministre de l’Intérieur en 1989, etc.).

Sur ce registre politique, une journée va rester dans les annales : le 5 mars 1996, qui a vu plusieurs ministres -Abdelaziz Ben Dhia (défense), Habib Ben Yahia (Affaires étrangères), Sadok Chaabane (Justice)-, dirigeants d’institutions –Habib Boularès (président de la Chambre des députés), Chadli Neffati (secrétaire général du RCD)- et membres du staff présidentiel –Abdallah Kallel (ministre d’Etat, conseiller spécial auprès du président), et Mohamed El Jéri (ministre directeur du cabinet présidentiel) décorés par la France.