Tunisie – Entreprise : 3 obstacles qui entravent la bonne gouvernance

Les résultats d’une étude sur l’«environnement juridique et fiscal et
gouvernance de l’entreprise en Tunisie» ont été débattus, jeudi 30 avril
2009, à l’Institut arabe des chefs d’entreprises.

Menée par M. Néji Baccouche, professeur à la Faculté de droit de Sfax,
l’étude a identifié trois principaux obstacles qui entravent la bonne
gouvernance et la compétitivité de l’entreprise. Ils sont d’ordre juridique,
institutionnel et fiscal.

S’agissant du premier obstacle, l’environnement juridique de l’entreprise ne
favorise guère sa bonne gouvernance dont les exigences sont insuffisamment
prises en compte, tant par le droit des sociétés que par les règles
d’ingénierie financière.

Le droit des sociétés est élaboré en fonction d’une tradition culturelle
tunisienne consacrant la primauté de la dimension familiale des PME
tunisiennes, le pouvoir absolu de leur gérant et leur corollaire l’absence
au sein de l’entreprise de contrepouvoirs capables d’éviter les abus et en
même temps crédibiliser l’entreprise auprès des tiers et des établissements
de crédit.

Cette situation lèse énormément les actionnaires de l’entreprise qui se
trouvent ainsi sous-informés alors que le gérant, lui, est hyper-informé des
tenants et aboutissants de l’entreprise.

Au plan financier, l’entreprise tunisienne est victime de sa dépendance du
crédit bancaire, synonyme de surendettement et de sur-bancarisation. Le
recours au marché financier est toujours marginal en Tunisie. Aux Etats-Unis,
les entreprises se financent au fort taux de 70% sur le marché financier et
30% auprès des banques.

Le deuxième obstacle réside dans l’inflation des structures d’appui, dans
leur duplicité et l’enchevêtrement de leurs missions. Ces structures, qui
apportent soit un appui logistique (API, APIA, CEPEX, ONTT, FIPA…), soit un
appui financier (FONAPRAM, FOPRODI, FODEC, BFPME, BTS, PMN, PMI…), pâtissent
d’une bureaucratisation excessive. L’auteur de l’étude préconise une
privatisation de leur gestion et leur soumission à une évaluation régulière.

L’objectif est de faire en sorte que «l’administration puisse se reconvertir
d’une administration procédurière et protectionniste à une administration
plus souple et efficace qui se soucie du résultat de son action».

Le troisième obstacle qui empêche la bonne gouvernance est d’ordre fiscal.
L’exigence de la transparence fiscale est : soit à cause de l’ampleur du
secteur informel, foncièrement en fraude, soit à cause du manque d’une
culture fiscale de transparence chez les décideurs au sein de l’entreprise.

Les activités du secteur informel sont, soit des entités qui échappent
totalement à l’emprise du fisc, soit des forfaitaires. L’existence de cette
catégorie de contribuables dont la contribution aux recettes fiscales de l’Etat
est très modeste, n’est pas de nature à rassurer l’entreprise transparente
ni de satisfaire au besoin financier de l’Etat. Elle crée de la frustration
chez le contribuable «honnête» ou chez celui qui ne peut pas frauder.

Le nombre des forfaitaires ne cesse d’augmenter. Il est estimé à 350 mille.
Le produit de l’impôt forfaitaire est tellement faible qu’il ne couvre
probablement pas les frais de sa perception.

Dès lors, ce sont les salariés dont le revenu est soumis à la retenue à la
source, ainsi que les entreprises soumisses au régime réel qui supportent la
charge fiscale au titre des impôt directs.

L’ampleur du secteur informel et le nombre des forfaitaires constituent,
avec leur faible contribution au titre des prélèvements obligatoires, une
source de concurrence déloyale et un autre facteur qui pénalise les
entreprises fiscalement «honnêtes».