FMI : l’enquête sur le directeur général Dominique Strauss-Kahn tombe mal

[21/10/2008 06:56:43] WASHINGTON (AFP)

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ésident de la Fed Ben Bernanke, le 11 octobre 2008 à Washington (Photo : Nicholas Kamm)

L’ouverture d’une enquête pour favoritisme sur le directeur général du Fonds monétaire international (FMI) Dominique Strauss-Kahn tombe mal alors que cet économiste respecté ambitionnait un nouveau rôle pour le FMI à la faveur de la crise du système financier.

Lundi, M. Strauss-Kahn a présenté ses excuses dans un courriel adressé au personnel du FMI pour avoir commis “une erreur de jugement” en entretenant des relations intimes avec une subordonnée.

“D’abord, je présente mes excuses et j’indique que je regrette beaucoup l’incident”, a déclaré M. Strauss-Kahn dans ce courrier électronique obtenu par l’AFP. “L’incident constitue une erreur de jugement de ma part dont je prends l’entière responsabilité”, a-t-il ajouté.

Cependant, le dirigeant du FMI a tenu à préciser: “je crois fermement que je n’ai pas abusé de ma position”. Il a ajouté qu’il soutenait “complètement le processus (l’enquête) qui est en cours”. “Je vais évidemment suivre les indications du conseil d’administration sur la meilleure manière de résoudre ce problème”, a-t-il ajouté.

“Je veux présenter mes excuses à la personne concernée pour mon erreur en ayant débuté cette relation. Elle est une économiste talentueuse et une professionnelle avérée. Je reconnais la situation difficile créée pour elle. Je présente aussi mes excuses à ma femme et ma famille”, a ajouté M. Strauss-Kahn.

Le conseil d’administration de l’organisation de Washington a confirmé lundi avoir demandé cet été l’ouverture d’une enquête sur “la possibilité d’un comportement personnel inapproprié visant le directeur général”.

La procédure doit déterminer si M. Strauss-Kahn aurait favorisé une subordonnée avec laquelle il avait entretenu des relations intimes.

“L’enquête vise à savoir dans quelles conditions elle a quitté le FMI puisqu’elle a adhéré au processus de guichets-départ de l’été passé”, a précisé à l’AFP une source proche de M. Strauss-Kahn.

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à Washington (Photo : Karen Bleier)

Selon cette source, l’enquête ne s’intéresse pas “au premier volet” de l’affaire, à savoir la liaison entre le dirigeant du FMI et une ancienne haute fonctionnaire du FMI d’origine hongroise, Piroska Nagy.

L’été dernier, 591 personnes sur 2.900 ont quitté l’institution, qui est très déficitaire et lutte pour regagner son lustre perdu.

Les investigations sont menées par un cabinet d’avocats extérieur au FMI à l’initiative du doyen de l’institution, Shakour Shaalan, qui représente l’Egypte et d’autres pays arabes au conseil d’administration.

Le cabinet devrait rendre ses conclusions d'”ici la fin du mois”, a indiqué M. Shaalan, dans un communiqué où il a fait état d’une rencontre dans la journée entre M. Strauss-Kahn et les directeurs exécutifs du FMI.

“Lui-même et les directeurs ont convenus qu’il était du meilleur intérêt du Fonds et des 185 pays membres que l’enquête soit complète, indépendante et se termine rapidement”.

Pour l’ancien ministre français des Finances, l’affaire tombe mal. Début octobre, en pleine tempête financière, il avait plaidé pour une réforme des instances régulant le système financier. La France, par la voix de son président Nicolas Sarkozy et la Grande-Bretagne, via son Premier ministre Gordon Brown ont défendu l’idée d’un rôle prééminent pour le FMI dans la refonte du système.

“Il faut qu’on change les choses sur les pratiques de régulation, d’organisation du système financier, de contrôle du système financier (et…) sur l’organisation de la gouvernance mondiale”, avait déclaré M. Strauss-Kahn, lors de l’assemblée générale du FMI. Il avait proposé de mettre en oeuvre ces idées “dès maintenant”, soulignant, sans faire mystère de l’intérêt du FMI, qu’il “y a des institutions qui sont disposées à y participer”.

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ésident de la BCE Jean-Claude Trichet, le 10 octobre 2008 à Washington (Photo : Handout)

L’enquête en cours pourrait fragiliser la position de M. Strauss-Kahn même si son entourage a indiqué à l’AFP “ne pas disposer d’éléments” laissant supposer qu’elle soit motivée par une volonté de le déstabiliser ou d’affaiblir le rôle du FMI.

Pour Mark Weisbrot, co-directeur du Center for Economic and Policy Research (centre de recherche classé à gauche), l’important c’est qu’elle “n’aboutisse pas à distraire les gens des vrais problèmes, à savoir que le FMI n’est pas compétent pour jouer un tel rôle”.

Le FMI vient de recevoir mandat d’analyser la crise financière qui a éclaté d’abord à l’été 2007 sur le marché américain des crédits immobiliers à haut risques et de proposer des solutions pour prévenir les tempêtes financières.

“Je ne pense pas qu’ils soient qualifiés pour ça. Pendant la dernière grande crise, en Asie, ils ont provoqué d’énormes dégâts. Ils ont un historique de prescription des mauvaises politiques quand l’économie va mal”, a expliqué à l’AFP M. Weisbrot.

Pour M. Weisbrot, DSK est malgré tout dans une meilleure posture que Paul Wolfowitz, l’ex-patron de la Banque mondiale contraint de démissionner en mai 2007 après avoir été accusé d’avoir indûment assuré l’avancement de sa compagne, employée de la BM. “Wolfowitz avait dégoûté tout son staff. Je n’ai pas l’impression que les employés du FMI aient des griefs contre DSK”, a-t-il ajouté.