Circulez …tout est à revoir


Par Ame Djait Belkaid

circulation1.jpgJe
conduis depuis plus de 20 ans. Entre la route et moi, c’est une longue
histoire d’amour et d’amitié. Conduire est synonyme de liberté, de détente,
d’utilité et de nécessité.

 

Il est vrai qu’une voiture c’est des entretiens techniques qu’on oublie, des
dates de vidanges qu’on dépasse, des roues qu’on ne change jamais quand il
faut, des pleins d’essence ou de gasoil qui coûtent tous les jours, un peu
plus chers. Des enfants qui contestent quand on n’a pas forcément envie de
les balader, parce qu’on a du mal à boucler le mois, ou qu’il faut changer
la plomberie qui vient de sauter.

 

Une voiture c’est aussi des assurances, des taxes, des PV, des amendes, des
sabots… Je serais d’ailleurs déraisonnable si je ne mentionnais pas les
amendes, les radars, les fourrières et les petits tuyaux pour s’en sortir.
Bref, un gros budget qui plombe la caisse.

 

Ma voiture est aussi la plus fidèle des compagnes. En cas de coups de
colères, de blues, de fêtes, d’heureux ou malheureux évènement, elle est là,
immuable et salvatrice. J’ai bien envie de la changer, mais comme je suis
une âme sensible, ma vieille carcasse vieillit et pas forcément bien, je ne
me décide toujours pas à la vendre.

 

Elle me laisse fréquemment en panne sur les routes et autoroutes du pays. Je
sais que cet été encore, je vais au devant de gros ennuis. Gare à moi, si
j’oublie l’eau dans le radiateur mais je m’en accommoderais, et au besoin,
j’aurais toujours une excuse pour faire de l’auto-stop ou être en retard.

 

Par contre, ce qui m’angoisse, c’est conduire. C’est absurde, pour une
passionnée de volant comme moi, mais conduire à Tunis est terrible. Nous ne
sommes ni au Caire avec sa circulation chaotique, ni à New Delhi où conduire
c’est jouer pour de vrai, à «Video Game», mais Tunis se défend pas mal non
plus.

 

Elle est incroyable la circulation à Tunis. Les Tunisiens au volant c’est
carrément dément !

 

On ne respecte pas les limitations de vitesse, les sens interdits, les
priorités, les enseignes, les vieux, les jeunes, les écoliers, les sorties
d’usine, les ambulances, … On brûle les feux rouges, on ne respecte pas le
code de la route, on ne sait toujours pas à qui est la priorité autour des
ronds points qu’on a plantés dans tout le pays, on n’utilise pas le
clignotant quand on tourne, on klaxonne à tort tout le temps. Midi, minuit,
sans soucis.

 

On se gare malgré les arrêts et stationnements interdits. Bon, c’est vrai
qu’il y en partout des stationnements interdits. C’est à se demander
pourquoi ils nous proposent autant de voitures si on ne peut les parquer
nulle part.

 

Tout le monde double tout le monde, dans n’importe quel sens, à droite, à
gauche et même en face. Sur les passages cloutés, ce ne sont jamais les
piétons qui ont la priorité. Bien au contraire, à la vue d’un piéton, les
voitures accélèrent. Les avenues sont pour les voitures et les autoroutes
pour les piétons

 

Tous les jours sur l’autoroute, des dizaines de piétons inconscients des
risques qu’ils courent, surtout quand il s’agit de jeunes enfants ou de
vieillards, escaladent les gardes fous, sautent les barrières et surgissent
de la végétation sauvage bordant l’autoroute pour la traverser dans un sens
ou dans l’autre.

 

Sur les avenues ce sont les piétons qui déambulent. Incroyablement
indisciplinés, ils ne peuvent pas voler non plus. Chez nous les trottoirs
sont aussi faits pour garer les bagnoles, surtout les gros 4×4 qui prennent
toute la place.

 

C’est une torture que de prendre sa voiture tous les jours à Tunis. Bloqués
pendants des heures dans une circulation infernale, on subit un peu la
musique des autres, quand ce n’est pas la déferlante d’insultes et autres
gros mots, en cas d’accrochages qui peuvent tourner aux jeux de mains
assurément très vilains.

 

En Tunisie, on vous klaxonne quand vous respectez la limitation de vitesse,
on vous bouscule quand on a un plus gros bolide, on vous agresse quand vous
vous arrêtez aux stops et autres feux rouges. Il arrive que sur une
autoroute, vous ayez une voiture qui vienne de face et fréquemment on vous
double à droite.

 

Si par malheur, vous vous étonnez puis impatientez quand une voiture sans
conducteur trône au beau milieu de la route, prenez votre mal en peine et
patientez. Il doit être juste en train d’acheter une recharge téléphonique
ou une bouteille d’eau. Surtout, ne grimacez pas et ne vous énervez. Il
montera dans sa voiture calmement avec au mieux, un petit geste amical, au
pire un geste qui en dit long sur son manque de civisme et de respect des
autres.

 

Comme nous allons assurément vers un bel été rempli de fêtes, soirées et
mariages je ne peux qu’anticiper sur les terribles accidents de la route et
les cortèges entiers de jeunes qui rentrent de fêtes après des journées et
soirées bien arrosées.

 

D’ailleurs, j’ai décidé de parler exclusivement de la circulation par beau
temps. J’ai beau chercher, expliquer, et justifier je ne comprends toujours
pas pourquoi et comment, Tunis plonge dans le chaos dès qu’il pleut pendant
plus de 20 minutes !

 

Alors en attendant l’hiver, bonne route !