La succession à la Banque du Japon sombre dans la confusion

 
 
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Le gouverneur de la Banque du Japon Toshihiko Fukui, le 15 février 2008 à Tokyo

[03/03/2008 09:30:38] TOKYO (AFP) Une crise de succession a brusquement éclaté à la Banque du Japon (BoJ) qui, payant les pots cassés d’un interminable conflit de politique intérieure, pourrait se retrouver sans gouverneur dans deux semaines alors même que tout laissait présager une transition sans accroc.

La troisième banque centrale du monde fait les frais de la guerre des nerfs à laquelle se livrent le gouvernement conservateur nippon, affaibli et impopulaire, et l’opposition de centre-gauche qui tente par tous les moyens de forcer la convocation d’élections législatives anticipées.

Selon la loi, le nouveau gouverneur de la BoJ doit être proposé par le gouvernement, puis approuvé par chacune des deux chambres du parlement.

Ce processus doit en principe être bouclé avant l’expiration, le 19 mars, du mandat de cinq ans de l’actuel gouverneur Toshihiko Fukui, lequel préside jeudi et vendredi le dernier comité de politique monétaire de sa carrière.

Le problème vient du fait que le gouvernement ne contrôle plus que la Chambre des députés. Le Parti démocrate du Japon (PDJ), principale force d’opposition, a en effet conquis le Sénat lors d’élections en juillet 2007.

Pour éviter de décapiter la BoJ en pleine crise financière mondiale, le PDJ semblait s’être résigné à accepter la nomination du favori du gouvernement, l’ex vice-ministre des Finances et actuel gouverneur adjoint, Toshiro Muto, malgré de sérieuses réserves quant à son indépendance.

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Le gouverneur adjoint de la Banque du Japon Toshiro Muto, le 20 novembre 2006 à Tokyo

D’après les médias nippons, tout était ficelé pour que le gouvernement annonce la nomination de M. Muto fin février, et pour que le parlement entérine ce choix début mars. Mais l’affaire a soudainement tourné au vinaigre.

Le président du PDJ, Ichiro Ozawa, a en effet été rendu furieux par un stratagème légal mis en oeuvre dans la nuit de vendredi à samedi par le gouvernement pour faire passer en force, sans nécessité de vote par le Sénat, le budget de l’Etat pour l’année 2008-2009.

“Les relations de confiance avec le gouvernement et le camp majoritaire ont été complètement rompues”, s’est emporté samedi M. Ozawa.

Un autre responsable du PDJ a dans le même temps affirmé que le PDJ était désormais “à 100%” certain de bloquer la nomination de M. Muto.

Le Premier ministre Yasuo Fukuda a appelé lundi l’opposition au dialogue pour tenter de trouver une solution. Selon les médias, un compromis pourrait consister à nommer à la tête de la banque centrale l’ancien gouverneur adjoint de la BoJ, Yutaka Yamaguchi, qui a les faveurs du PDJ.

Mais la situation demeure extrêmement incertaine.

“Il s’agit d’une épreuve de force entre le parti au pouvoir et l’opposition, et il n’existe aucun moyen à ce stade de deviner si la nomination de Muto est effectivement devenue impossible”, ou bien si un nouveau revirement est envisageable, estiment dans une note les économistes de Barclays Capital à Tokyo.

Le problème est aggravé par le fait que M. Fukui n’est pas le seul dirigeant de la BoJ à partir. Ses deux adjoints, dont M. Muto, voient également leurs mandats de cinq ans expirer le 19 mars, et leur remplacement doit suivre le même processus que pour le gouverneur.

Faute de nouvelles nominations, le comité de politique monétaire sera réduit de neuf à six membres, tous issus de l’université ou du secteur privé et sans expérience préalable à la banque centrale ou dans l’administration.

“Le comité de politique monétaire continuera à fonctionner, mais il n’est pas certain qu’il se sentira investi de l’autorité suffisante pour changer la politique monétaire en l’absence de ses trois membres de plus haut rang”, explique Richard Jerram, économiste chez Macquarie Securities.

 03/03/2008 09:30:38 – © 2008 AFP