Ingénieurs : Mokhtar Laâtiri n’est pas mort !

laatiri2404.jpgLes
ingénieurs tunisiens auraient tort d’entrer en deuil, car le fondateur de l’ENIT,
la première graine de toutes les écoles d’ingénieurs en Tunisie, n’est pas
mort. Son esprit, son engagement, sa haute estime de sa profession, son
franc-parler de technicien, la religion qu’il a faite du devoir de
sincérité, son enjouement, sa ‘’grande gueule’’… vivront à jamais dans la
tradition qu’il a su créer et dans chacun de nos ingénieurs.

Pour nous, à de nombreux égards, il est le Prométhée tunisien.
Rappelez-vous la mythologie grecque où la nature prométhéenne est
caractérisée par un idéal d’action et de foi en l’homme tel qu’il est
symbolisé par le mythe de Prométhée, ce personnage de la race des Titans qui
est l’initiateur de la première civilisation humaine et qui déroba le feu du
ciel et le transmit aux hommes.

Nous nous rappelons des innombrables rencontres qu’il anima, flamboyant, le
cheveu passablement hirsute, la moustache impérieuse, le costume trois
pièces impeccable mais cravate défaite quand le temps était printanier, le
burnous traditionnel sombre par-dessus quand le temps était hivernal…

‘’Sî Mokhtar’’ ne mâchait jamais ses mots, ses interventions étaient
passionnées car les idées se bousculaient, nombreuses, dans son esprit
hautement érudit et touche-à-tout. Il ne laissait personne indifférent et
avait ce don exceptionnel de rester inoubliable pour tous ceux qui l’ont
approché, même une fois.

Visionnaire, il a vu avant tout le monde, alors que la Tunisie vivait les
premières décennies de l’indépendance, que le pays avait un besoin immédiat
de techniciens de haut vol pour ponctuer son œuvre de développement. Pas
seulement les ingénieurs qui étaient vitaux pour la construction de notre
pays et dont il disait qu’il leur fallait huit années d’études avant de
devenir tels, mais aussi la micro-informatique dont il ‘’voyait’’ que
l’aspect généralisé et personnel allait devenir la règle…

Ben Ali l’honora de son vivant, comme l’on honore ceux qui sont
invariablement restés fidèles au drapeau et dont l’érudition en faisait des
interlocuteurs de premier rang. Conseiller à la présidence, il était
attentivement écouté car là on savait que c’était le sommet de son ambition
: être écouté.

Ne vous en faites pas, ‘’Sî Mokhtar’’, l’écho de votre voix et de vos
idées ne s’arrêtera pas de résonner en Tunisie.