Jeux de hasard : la justice européenne porte un nouveau coup aux monopoles

 
 
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L’enseigne d’un point de vente du Pari Mutuel Urbain (PMU), photographiée en mai 2006 à Montpellier (Photo : Dominique Faget)

[06/03/2007 18:47:09] BRUXELLES (AFP) La justice européenne a porté un nouveau coup aux monopoles d’Etat sur les loteries et les paris sportifs, en jugeant mardi que l’Italie ne pouvait interdire les activités des opérateurs privés agissant sur son territoire pour le compte de bookmakers étrangers.

Cet arrêt, connu sous le nom de Placanica, était très attendu, à l’heure où la Commission remet en cause de nombreux monopoles nationaux.

Massimiliano Placanica avait été poursuivi en 2004 devant un tribunal italien pour “exercice illégal d’activité de collecte”.

Le gouvernement lui reprochait de gérer, sans concession légale, un centre permettant aux parieurs d’accéder par voie télématique aux services de Stanley, société cotée à Londres, premier tenancier de maisons de jeux au Royaume-Uni.

M. Placanica pouvait d’autant moins posséder une concession que les appels d’offres prévus par les autorités italiennes sur les paris sportifs excluent les sociétés cotées. Stanley avait été recalée par l’Italie en 1999.

La Cour a admis qu’un Etat interdise l’activité de certains opérateurs car la défense de l’ordre “moral, religieux ou culturel, ainsi que les conséquences moralement et financièrement préjudiciables pour l’individu et la société qui entourent les jeux et les paris peuvent justifier de telles restrictions”.

Toutefois, a-t-elle prévenu, ces restrictions doivent être “proportionnées”. A ce titre, l’exclusion des sociétés cotées “va au-delà de ce qui est nécessaire” pour éviter les activités criminelles ou frauduleuses.

“Satisfaite que cet arrêt apporte plus de clarté juridique”, la Commission a assuré mardi qu’elle en “tiendrait compte à l’avenir”.

C’est que depuis un an, le commissaire au Marché intérieur Charlie McCreevy a fait de la lutte contre les monopoles une de ses priorités, notamment dans les paris hippiques. Après avoir épinglé l’Italie, l’Allemagne, le Danemark, la Finlande, la Hongrie, les Pays-Bas et la Suède en avril 2006, il s’est attaqué en octobre à la France et à l’Autriche.

Selon une source proche du dossier, la Commission enverra en mars un nouvel avertissement à cinq d’entre eux (Danemark, Finlande, Hongrie, Pays-Bas et Suède), avant de passer aux autres en juin ou octobre.

“De nombreux Etats membres bafouent ouvertement les règles du marché intérieur”, a réagi l’eurodéputé conservateur britannique Malcolm Harbour.

Selon lui, “les Etats membres ne peuvent, d’un côté encourager les gens à participer aux activités de paris qu’ils sponsorisent, et de l’autre invoquer la protection du consommateur pour supprimer les paris sportifs”.

Mardi, les monopoles nationaux étaient pourtant loin de s’avouer vaincus. Pour Philippe Vlaemminck, avocat de la Française des Jeux, l’important est que la Cour ait reconnu qu’un Etat pouvait mener une “politique d’expansion” dans les jeux de hasard.

Elle a en effet admis que “dans un environnement contrôlé par l’Etat”, un opérateur historique avait le droit de “faire de la publicité, de recourir à de nouvelles techniques de distribution, comme l’internet, et de proposer une offre de jeux attrayante”.

Pour Me Thibault Verbiest, qui défend plusieurs opérateurs privés, les loteries européennes ont pourtant “perdu du terrain”.

Le fait que la Cour dise “clairement” qu’un Etat ne pouvait imposer de sanctions pénales aura selon lui un impact important. Notamment en France, où le Conseil constitutionnel a validé samedi la loi Sarkozy sur la délinquance qui comprend des dispositions contre le jeu en ligne.

A la Bourse de Londres, où beaucoup d’entre elles sont cotées, les groupes de jeux et de paris en ligne ont gagné du terrain mardi après cet arrêt: Ladbrokes notamment a gagné 2,33% à 405,75 pence, et PartyGaming 5,15% à 35,75 pence.

 06/03/2007 18:47:09 – © 2007 AFP