Liban : les bâilleurs de fonds veulent marginaliser le Hezbollah

 
 
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Le roi Abdallah ben abdel Aziz à Abou Dhabi, le 19 décembre 2005 (Photo : Rabih Moghrabi)

[26/07/2006 07:46:11] BEYROUTH (AFP) Des pays arabes et occidentaux ont décidé de prendre les devants pour financer les reconstructions au Liban dans l’espoir d’affaiblir le Hezbollah, tenu par beaucoup pour responsable de l’actuel conflit et de renforcer le gouvernement pro-occidental de Fouad Siniora.

“Les pays pétroliers du Golfe et les puissances occidentales veulent renforcer M. Siniora et les forces politiques libanaises pro-occidentales opposés à la stratégie du Hezbollah”, estime le politologue Joseph Bahout, chercheur associé à l’Institut des études politique (IEP) de Paris.

L’Arabie saoudite a annoncé mardi qu’elle ait déposé un milliard de dollars dans les coffres de la Banque du Liban (BdL, banque centrale) pour renforcer ses réserves et soutenir la livre libanaise.

Le royaume a également décidé d’octroyer une aide de 500 millions de dollars pour la reconstruction du Liban dévasté par l’offensive israélienne qui a touché en particulier le sud du pays, à majorité chiite. Sur les quelque 800.000 déplacés, l’immense majorité est chiite.

L’annonce d’aide du royaume wahabite est intervenue à la veille de la conférence internationale mercredi à Rome sur le Liban, à laquelle participent notamment le secrétaire général de l’Onu Kofi Annan et la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice.

Cette conférence réunit 13 pays et 3 organisations internationales, l’Onu, l’Union européenne et la Banque Mondiale. Elle constitue une concrétisation, sous les bombes, des promesses d’assistance au Liban faites depuis un an. Mais, au lieu de venir en soutien aux réformes économiques, elle a prévu de se pencher sur le chantier de la reconstruction d’un pays “sinistré” par les bombardements israéliens, selon l’expression du Premier ministre libanais.

“Le message des Occidentaux et de l’Arabie Saoudite est clair”, affirme M. Bahout: “Il ne peut pas y avoir de reconstruction si le Liban reste otage du tandem syro-iranien par le biais du Hezbollah”.

Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a promis que les ravages causés par l’offensive israélienne “pourront être réparés grâce à une aide non accompagnée de conditions politiques”, dans une allusion à l’Iran, indéfectible soutien du parti chiite.

Le soutien financier promis à M. Siniora, dépourvu de forces sécuritaires pour neutraliser le Hezbollah, son partenaire dans le gouvernement, apparaît comme un moyen pour rogner l’influence du parti de Dieu dans les couches les plus défavorisées au Liban, qui ont depuis longtemps perdu confiance dans la capacité de l’Etat à les aider.

“L’ampleur de la catastrophe humanitaire dont les chiites sont les principales victimes va remettre en question les jusqu’auboutistes de cette communauté et renforcer la tendance modérée”, assure un homme d’affaires chiite, Mouïn Hamzé. “Il y a aussi chez les chiites une riche bourgeoisie d’émigrés libanais qui ont largement investi au Liban et qui sont convaincus que le Liban ne pourra pas attirer de nouveau des investissements en l’absence d’une pacification définitive” à la frontière libano-israélienne, ajoute-t-il.

Mais pour nombres d’analystes, la carte économique ne sera pas suffisante pour amener à composition un Hezbollah appuyé par une large majorité de chiites, pour qui ce parti est le seul à même de faire face militairement à Tsahal, l’armée la plus puissante du Moyen-Orient.

“Sur le plan militaire, le Hezbollah maintient ses capacités et a même intensifié les tirs de roquettes sur le nord d’Israël”, souligne ainsi Walid Charara, auteur d’un livre sur le Hezbollah.

 26/07/2006 07:46:11 – © 2006 AFP