Le marché du livre tunisien à l’international : problèmes et solutions

Par : Tallel
 

Le marché du livre tunisien à l’international : problèmes et solutions

(2ème partie)

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Des livres coûteux

 

Il est
pourtant vrai que les livres scolaires utilisés en France, dont nous
possédons des échantillons dans les écoles françaises en Tunisie sont de
plus en plus élaborés (couleurs, illustrations..) et par conséquent coûteux.
Samir Graba considère-t-il que les éditeurs de livres scolaires devraient
suivre cette tendance chez nous? «Pas nécessairement », répond il. « Il
paraît même qu’il existe une révision dans les pays occidentaux pour revoir
cette tendance car quand le livre est trop luxueux, l’élève le parcourt très
vite avant la fin de l’année scolaire et c’est anti-pédagogique » .
Maintenant pour la consommation locale, il faut, selon Graba, également
tenir compte du pouvoir d’achat: «vous savez que le budget moyen de livres
pour un seul élève tunisien est environ 30DT. Il faut multiplier ce montant
au moins par dix dans les écoles françaises de Tunisie. Néanmoins les
imprimeries tunisiennes et la mienne en particulier, possèdent la
technologie nécessaire de sous traiter des livres scolaires de cette
envergure à l’exportation. Je travaille déjà avec Hachette par exemple et le
produit que je fabrique est tout à fait satisfaisant ».

Karim Ben Smaïl n’est pas du tout du même avis. Il pense qu’au contraire, au
niveau pédagogique, le plus important est de ne pas éditer des ouvrages
rébarbatifs et tristes, mais de cultiver chez l’élève le sens esthétique
afin qu’il respecte le livre: « En effet la période de l’enfance et de
l’adolescence, est la plus belle de la vie. Durant cette dernière, l’élève
rêve et idéalise. Je discutais récemment avec notre Ministre de la Culture
et il m’avait justement demandé ce qu’il faudrait faire pour que les élèves
cultivent la notion du «beau et de l’esthétique », il faut commencer par
leurs mettre entre les mains des livres bien faits. L’approche plus souvent
retenue est celle du livre peu coûteux, mais il y a des économies qui
coûtent cher ! Cette préoccupation doit donc être au centre de notre projet
pour une société créative et ouverte ».

 

Quelques
écrivains tunisiens commencent par ailleurs à se faire connaître à
l’étranger. Pour K. Ben Smaïl il est tout à fait légitime pour un écrivain
tunisien de rechercher à s’y faire éditer, notamment en France compte tenu
du lectorat important. Il faut cependant savoir, concède-il qu’il est tout à
fait possible de publier dans les deux pays : « nous avons récemment cédé
nos droits sur un livre de Mohamed Talbi. Certains thèmes comme l’Islam sont
devenus universels, notamment après les récents évènements et le lecteur
occidental veut en savoir plus et c’est tant mieux pour nous. En fait, il
est important de dire dans le même contexte, qu’il existe un autre moyen
indirect d’exporter le livre c’est de racheter ses droits des maisons
d’édition étrangères. En plus si nous éditons et commercialisons ces livres
à un prix nettement inférieur à celui de l’édition importée le gain pour le
lecteur est manifeste. Ce moyen permet aussi et surtout à notre pays
d’économiser des devises précieuses équivalant à une exportation indirecte.
Nous avons commencé à adopter cette politique avec succès mais un long
chemin reste à parcourir car pour racheter les droits des livres à succès,
il faut que l’éditeur ait confiance en nous et nous mette longtemps à
l’épreuve avant de consentir à conclure un tel accord de cession de droits,
car l’image de marque et la réputation de la société d’édition risque de
recevoir un coup en cas de choix malheureux.»
 

 

Hatem
Karoui

(La
Tunisie-Economique

Novembre-Décembre 2005)

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