Ciel africain : la bataille a-t-elle commencé ?

Par : Autres

Ciel africain : la bataille a-t-elle commencé ?

 

royal13062005.jpgInvestisseurs,
hommes d’affaires et autres transporteurs aériens semblent, comme par magie,
s’intéresser au continent africain. Mais dans ces nouvelles stratégies, à la
différence des autres secteurs, le transport aérien ne sera pas l’apanage
des seuls Occidentaux. De l’Afrique du Nord à l’Afrique du Sud, en passant
par l’Europe, les pays du Golfe, toutes les compagnies –ou presque-
cherchent à se positionner sur le ciel africain, longtemps chasse gardée des
géants du transport aérien.

Dans les états majors de certaines compagnies, on ne cache plus la volonté
de conquérir le ciel africain, et ce à travers des politiques commerciales
et/ou d’alliances d’un genre nouveau. A se demander si l’Afrique était
redevenue plus fréquentable que par le passé ! Air France, Royale Air Maroc,
Air Afriqiya, Air Emirate, Air Algérie, et à un moindre degré Tunisair,
chacune de ces compagnies –sans doute d’autres également- est en train de
concocter de plans de conquête (pour les unes) et de reconquête (pour les
autres) de l’espace aérien africain qui, par enchantement se trouve d’un
coup dégagé de tout nuage.

Mais plusieurs questions se posent : Pourquoi le ciel africain suscite-t-il
un tel engouement ? Les Africains voyagent-ils davantage à l’intérieur du
continent ? Le climat des affaires est-il aujourd’hui plus sécurisé que par
le passé ou bien est-il plus florissant ? In fine, que peuvent faire les
petites compagnies africaines qui subsistent encore face au rouleau
compresseur des mastodontes du ciel mondial ? Les Africains, au Nord comme
au Sud, peuvent-ils s’entendre sur des alliances stratégiques ou
commerciales pour contrer la route à ces compagnies ?

On peut espérer avec ce qui se trame que c’est la fin des aberrations sur
les conditions de voyage à l’intérieur du continent. Car il n’est pas
fortuit de rappeler que pour aller d’une région géographique à une autre, il
est aujourd’hui plus facile de passer par l’Europe pour redescendre ensuite
en Afrique.

Selon les professionnels du secteur, il se crée de plus en plus des
transversales entre des pays (africains) qui n’avaient aucun rapport
commercial entre eux. Kenya Airways, Ethiopian airways ou la South African
Airways sont les compagnies les plus dynamiques en Afrique subsaharienne,
mais elles sont loin d’avoir la taille d’Air France, de British Airways ou
de la Lufthansa.

Air Algérie : la stratégie de reconquête serait-elle en marche ?

Il faut rappeler qu’Air Algérie a créé un lien entre l’Afrique du Nord et
une bonne partie de l’Afrique subsaharienne ; et n’eut été la guerre civile
qu’a connue ce pays, il ne fait aucun doute que cette compagnie serait parmi
les meilleures non pas en Afrique seulement. Avec la fin de la guerre
civile, la compagnie a mis en place un important programme d’achats d’avions
et une stratégie commerciale destinée à couvrir les pays du continent.

RAM et Air Sénégal International : l’armée et son commando !

Le Maroc a une politique aérienne qui commence à porter ses fruits,
essentiellement avec la création d’Air Sénégal international. La Royale Air
Maroc est l’une ou la seule compagnie africaine qui dessert l’Amérique du
Nord (Etats-Unis et Canada essentiellement), sans compter le fait que les
vols de la RAM à destination de l’Afrique enregistrent des taux de
remplissage des plus importants.

Et Air Sénégal International dans tout ça ? C’est ni plus ni moins une
émanation de la RAM. Pour rendre à César ce qui lui appartient, la RAM est
aujourd’hui la seule compagnie en Afrique du Nord qui puisse se targuer
d’être au niveau des compagnies européennes sur le plan de la stratégie à
l’international. Même si la RAM a eu son passage à vide en matière de
qualité de service et d’agressivité commerciale. Ils ont pris ce qu’ils
avaient de mieux chez eux (expertise, pilotes, cadres et agents commerciaux)
pour l’injecter dans Air Sénégal International qui possède deux hubs (Casa
et Dakar), et dessert l’Afrique de l’Ouest et l’Europe, deux zones sur
lesquelles la compagnie est très compétitive au niveau du service et des
tarifs.

Et ce n’est pas tout, la RAM est en train de créer un groupement entre
plusieurs compagnies ariennes pour contrer Air France qui contrôle Air
Ivoire dirigée par un cadre de la compagnie française. Ainsi la RAM semble
se battre seule contre les géants européens.

Air Afriqiya : un géant mondial en
devenir !

Air Afriqiya ou la Libye qui s’africanise ? Peu importe ! Tout compte fait,
il s’agit d’une compagnie créée par le gouvernement libyen et qui dessert, à
partir de Tripoli, Bamako, Khartoum, Ouagadougou, Paris, Bruxelles Genève,
Porto Novo ; avec des appareils neufs (deux A320 et un A300 loués chez
Nouvelair), des pilotes pour la plupart formés chez Nouvelair et bien
expérimentés, ainsi que des services largement comparables à ceux d’Air
France ou de British Airways sur l’Afrique. Air Afriqiya a très bien compris
l’importance du marché.

En outre, le management de la compagnie a eu l’intelligence de créer des
liaisons aériennes africaines et européennes ayant des relations plus ou
moins directes : en ouvrant des destinations africaines francophones, elle a
fait de même pour Paris, Bruxelles et Genève ; l’ouverture de Lagos et
Conakry en même temps que celle de Londres. Tripoli est devenu ainsi une
plaque tournante pour nombre de familles africaines vivant en Europe. Air
Afriqiya est en effet considérée comme une compagnie low cost, mais pas au
niveau du transport, des aéroports ou des horaires ou même des services.

Au niveau de la stratégie commerciale et du développement, la compagnie est
représentée dans le monde par des GSA (General Save Agency), lui permettant
de s’appuyer sur l’expérience d’agents locaux.

Et les autres ?

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, l’Egypte ne semble pas avoir
d’ambition africaine en matière de transport aérien. Quant à la Tunisie,
elle n’a montré des réelles envies en la matière qu’avec l’arrivée de la
Banque africaine de développement (sans oublier tout de même qu’elle a,
depuis plusieurs années, une ligne régulière Tunis-Dakar).

Par contre, et pour mieux comprendre combien le ciel africain –et au-delà
tout le potentiel africain- intéresse tout le monde aujourd’hui, la
compagnie aérienne des Emirats Arabes Unis, Air Emirate, semble s’intéresser
ces derniers temps à Air Gabon. Cela se passe de tout commentaire quand on
sait que le Gabon tout comme les EAU sont d’importants producteurs de
pétrole…

Vers des alliances africaines ?

Les compagnies aériennes nord-africaines ne semblent pas, malheureusement,
disposer de réelles stratégies d’alliance ou d’accord d’abord entre elles,
ensuite avec d’autres compagnies du sud du Sahara (notamment en Afrique de
l’Ouest) en matière d’assistance mais également de liens aériens avec
l’Afrique subsaharienne. L’objectif de cette alliance serait de renforcer
leurs positions sur le marché aérien africain face aux compagnies
européennes, lesquelles ne tolèrent aucune velléité commerciale sur le
marché européen.

 


Tallel Bahoury

 

 

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– 06 – 2005 :: 06:00  –  ©webmanagercenter