Le Centre international de recherche agricole dans les zones arides (ICARDA) et l’Office de l’Elevage et des Pâturages (OEP) ont lancé, jeudi, à Tunis, le projet «Expansion de la génétique de la faible émission du méthane aux petits ruminants en Asie et en Afrique».

Porté par l’ICARDA, en partenariat avec des acteurs nationaux dans quatre pays; à savoir la Tunisie, la Mongolie, l’Inde et l’Ethiopie, le projet en question s’inscrit dans le cadre de l’initiative internationale qui consiste à réduire durablement les émissions de méthane dans le secteur de l’élevage par la voie de l’amélioration génétique.

D’une durée de 36 mois, ce projet se poursuivra jusqu’à septembre 2028. Coordonnée par l’Université de Wageningen (Pays-Bas), l’initiative fournira le soutien technique nécessaire et permettra de contribuer à la standardisation de la mesure du méthane entérique chez les ovins et les caprins.

En effet, le projet se propose de démontrer qu’il est possible d’assoir des initiatives d’amélioration génétique et des schémas de sélection qui permettent à la fois de booster la productivité et de réduire les émissions de méthane, tout en améliorant les revenus et le bien-être des petits éleveurs de petits ruminants.

La prise en compte des émissions de méthane n’y est pas encore intégrée sauf dans quelques essais préliminaires à titre de recherche, selon les porteurs du projet.

Le projet ancrera, pour une période de trois ans, la sélection du méthane dans les schémas de choix des élevages ovins et caprins.

A long terme, le projet favorisera le développement de lignées génétiques qui rassemblent productivité, une meilleure efficacité alimentaire et une émission réduite de méthane dans une vision globale d’un élevage intelligent face au climat.

Dans une déclaration à l’Agence TAP, le chargé de la gestion de l’OEP, Anis Zaïem a fait savoir que ce projet de recherche sera mis en œuvre dans les unités de production des fermes de l’Office  et chez des éleveurs privés qui ont adhéré aux programmes d’amélioration de la génétique initiés par l’office.

L’objectif est d’introduire la réduction du méthane dans l’activité de l’élevage en tant qu’élément primordial dans l’amélioration de la génétique, a indiqué Zaïem.

Les résultats du projet seront utilisés dans l’amélioration du rendement du secteur et la lutte contre les gaz à effet de serre (GES), a-t-il ajouté

Il a rappelé que ce projet s’inscrit dans le cadre des efforts et de l’adhésion de la Tunisie dans la réduction des GES et de lutte contre le changement climatique.

De son côté, Mourad Rekik chercheur principal en physiologie et reproduction des petits ruminants a estimé que le projet intervient à un  moment opportun. “La globalisation de méthane (CH4), un GES, qui a une durée de vie (environ 12 ans) beaucoup plus courte dans l’atmosphère que le dioxyde de carbone (CO2), favorisera  l’efficacité de la rapidité de l’action”, a souligné l’expert.

Toutefois, le méthane est beaucoup plus puissant que le CO2, avec un potentiel de réchauffement global (PRG) qui peut atteindre jusqu’à 84 fois supérieur à celui du CO2, a-t-il expliqué.

Parmi les moyens réduisant les émissions de méthane, le chercheur a cité l’immunisation contre les méthanogènes, l’utilisation des additifs alimentaires et les espèces fourragères réduisant le méthane, la sélection génétique, l’amélioration de la santé et du bien être des animaux et la meilleure gestion du fumier.

De son côté, le coordinateur du projet dans les quatre pays de mise en œuvre Joram Machaon, a mis l’accent sur l’importance des ovins et des caprins dans les pays africains et asiatiques qui détiennent un nombre important d’éleveurs, en termes de contribution au PIB et à la sécurité alimentaire.

Il a fait savoir que les secteurs de l’agriculture et de l’élevage qui sont affectés par les changements climatiques, contribuent également à ce phénomène. En fait l’élevage est responsable à lui seul de 14,5% à 16% des GES mondiales, notamment par le biais des émissions de méthane et d’oxyde nitreux, contribuant de manière significative au changement  et au réchauffement climatique.

Il a fait remarquer que l’Initiative mondiale sur la génétique du méthane (GMC) œuvre entre autres à réduire les émissions de méthane de 20% sur une période 20 ans, à accélérer les progrès génétiques, à mettre en œuvre des stratégies de sélection pour réduire les émissions de méthane chez les ruminants dans les pays du Nord et du Sud.

Machaon a rappelé que le projet est axé sur quatre paquets de travail; à savoir l’établissement d’une plateforme pour le phénotypage de l’émission du méthane, le développement d’une plateforme pour la gestion des données et informations, la génétique et la génomique de l’émission du méthane et le soutien technique et le développement des compétences.

Il convient de noter que dans le monde, les ovins et caprins représentent près de 55% des élevages des ruminants  et sont responsables d’environ 14% des émissions de méthane issues du secteur de l’élevage.

La majorité de ces petits ruminants est élevée par des petits agriculteurs et pastoralistes dans les pays à faible ou moyen revenus d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, selon les organisateurs..

La voie génétique est déjà bien ancrée dans les programmes de sélection des vaches laitières en Europe, l’Australie et la Nouvelle Zélande, d’après la même source.